l'ADN lors des cycles cellulaires
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Sources :
Le cycle cellulaire chez les animaux et les végétaux, Jean Clos, Marc Coumans et Yves Muller, Biologie-Géologie (revue de l'APBG), n°3-2002, p497-564
Biologie végétale, tome 2 : Organisation végétative, D. Robert et A.M. Catesson, Doin, 1990
Biologie moléculaire de la cellule, Alberts et al., 1994, Médecine-Sciences Flammarion
Biologie du Développement, S.F. Gilbert, 1996, De Boeck Université
Microbiologie, Prescott, Harley et Klein, 1995, De Boeck Université

Plan :


1. l'ADN lors du cycle cellulaire chez Escherichia coli (Meselson et Stahl, 1958)
2.
l'ADN lors du cycle cellulaire chez les eucaryotes (Taylor , Woods et Hughes, 1957)

1 . l'ADN lors du cycle cellulaire chez Escherichia coli


Ultrastructure d'une bactérie

La structure du nucléoïde bactérien observé en ME - sous forme d'une zone plus claire, moins opaque aux électrons et souvent attachée à la membrane cellulaire (voir cours de seconde) - reste mal connue.

Pour une image au MET voir par exemple le site de Markus Drechsler (E. coli au MET en coloration négative à l'uranylacétate).

Il contiendrait environ 60% d'ADN, un peu d'ARN et près de 40% de protéines (mais ce n'est pas le cas de toutes les bactéries, certaines contiennent un nucléoïde d'ADN presque pur). La forme "théorique" ou plutôt le modèle, qui cadre avec les résultats expérimentaux, serait une boucle unique entortillée et empaquetée grâce à des protéines de type non-histones (différentes des protéines de la chromatine et du chromosome eucaryote) (voir chromosome). La taille de l'unique molécule d'ADN en boucle serait d'environ 1400µm chez Escherichia coli.

De petits ADN circulaires ou plasmides sont le plus souvent présents dans le cytoplasme. Ils ne sont pas indispensables à la division cellulaire mais contiennent des gènes pouvant être exprimés.


Pour simplifier, par commodité, et comme c'est l'usage, nous représenterons l'ADN bactérien comme une unique boucle d'ADN de petite taille non enroulée.

Cours de seconde:
Comment les cellules se multiplient-elles ?

Le cycle cellulaire comprend les événements situés entre deux divisions.

Il commence donc, pour une cellule, lors de sa séparation d'avec sa cellule sœur; et finit lors de sa séparation en deux cellules filles.

Le cycle cellulaire commence par un allongement de la cellule, sans augmentation de diamètre, qui atteint ainsi 2 fois sa longueur initiale : c'est la croissance cellulaire. Comme il n'y a pas d'augmentation de diamètre on peut penser que la masse initiale double pendant cette croissance étant donné que la bactérie peut être assimilée à un cylindre de diamètre constant. Pendant cette croissance l'ADN est dupliqué et de nombreuses protéines dites protéines de division sont synthétisées.

Si l'on bloque la réplication de l'ADN on empêche la division et la cellule s'allonge démesurément en formant un long filament. La division cellulaire commence presque toujours, quelque soient les conditions de culture de la bactérie et donc quelque soit la durée du cycle cellulaire, 20 minutes avant la fin de la réplication.


Le cycle cellulaire - d'une durée de 60 min - d'une souche d'Escherichia coli à croissance lente

Si la division est fort mal connue, la réplication de l'ADN est de loin le mécanisme le mieux connu de tout le cycle cellulaire des Procaryotes. Elle a particulièrement été étudiée chez Escherichia coli.

L'expérience historique de Meselson et Stahl a permis de préciser le type de mécanisme de réplication de l'ADN.


Expérience de Meselson et Stahl (1958)
Bordas p 101; Nathan p 112

Escherichia coli est cultivée pendant de nombreuses générations (= durée d'un cycle cellulaire puisqu'une génération sépare une cellule mère de sa cellule fille) sur un milieu de culture contenant des désoxyribonucléotides marqués à l'15N (témoin 1). Cette souche de départ est transférée pendant un génération sur un milieu contenant uniquement des désoxyribonucléotides marqués à l'14N (expérience 1). Enfin on transfère des bactéries issues de cette culture à nouveau sur un milieu contenant uniquement des désoxyribonucléotides marqués à l'15N (expérience 2).

La mesure de la quantité de désoxyribonucléotides incorporés dans l'ADN lors de la phase de réplication (croissance cellulaire) se fait à l'aide de prélèvement de bactéries dont l'ADN est extrait et centrifugé sur gradient de densité; l'ADN se plaçant plus ou moins bas dans le tube selon sa densité. La bande d'ADN, fluorescente sous U.V. est révélée par éclairement U.V. du tube. Une densité de 1,8 signifiant un ADN ne contenant quasiment que de l'15N et une densité de 1,65 signifiant un ADN ne contenant quasiment que de l'14N.

Le tube 2 correspond à un témoin d'une souche cultivée pendant de nombreuses génération sur sur milieu contenant des désoxyribonucléotides marqués à l'14N. Le tube 5 correspond à une génération supplémentaire sur milieu contenant des désoxyribonucléotides marqués à l'14N (expérience 3).

densités

(selon les auteurs!!!!)

tube 1

(témoin 1)

tube 2

(témoin 2)

tube 3

(expérience 1)

bactéries de la souche témoins 1 cultivées 1 génération sur 14N

tube 4

(expérience 2)

bactéries de la souche témoin 1 cultivées 2 générations sur 14N

tube 5

(expérience 3)

bactéries de la souche témoin 1 cultivées 3 génération sur 14N

1,65 - 1,710
-
*********
*********
-
********
********
1,72 -1,717
-
-
*********
*********
********
****
1,80 - 1,724
*********
*********
-
-
-
-


Une illustration de l'interprétation du mécanisme de réplication semi-conservative de l'ADN dans l'expérience de Meselson et Stahl.

interprétation:

Les témoins correspondent à des bactéries dont la quasi-totalité de l'ADN est composé de désoxyribonucléotides possédant de l'14N (témoin 2) qualifié d'ADN "léger" ou de l'15N (témoin 1) qualifié d'ADN "lourd".

Dans l'expérience 1 (tube 3) la position de l'ADN intermédiaire en densité entre l'ADN léger et de l'ADN lourd permet de dire que le mécanisme de réplication de l'ADN, qui s'est normalement déroulé une seule fois depuis le transfert sur milieu léger, est semi-conservatif. En effet, les molécules d'ADN obtenues lors de la réplication contiennent TOUTES pour moitié de l'14N et de l'15N. Ce qui peut s'expliquer aisément si l'on imagine un système de réplication qui conserve un des brins anciens dans chaque nouvelle molécule et synthétise un brin nouveau complémentaire. Les deux molécules d'ADN issues d'une telle réplication sont donc identiques et pour un brin (nouveau) composées d'14N et pour l'autre brin (ancien) composées d'15N. On peut parler de molécules hybrides 14N-15N.

Lors d'une seconde réplication avec des désoxyribonucléotides contenant de l'14N (milieu "léger"), les molécules hybrides sont aussi répliquées selon un mécanisme semi-conservatif qui donnera une molécule d'ADN léger et une molécule d'ADN hybride à partir de chaque molécule ancienne (hybride).


Une troisième réplication sur "milieu léger" donnera aussi ces deux types de molécules mais dans un rapport différent. Il y aura une molécule hybride pour 3 molécules d'ADN léger.


Généralisation

La réplication de l'ADN est une synthèse de deux molécules d'ADN identiques à partir d'une molécule d'ADN. Chaque molécule d'ADN fille est composée d'un brin ancien et d'un brin nouveau complémentaire du brin ancien; on dit que la réplication est semi-conservative. La réplication de l'ADN est catalysée par un gros complexe enzymatique contenant plus de 20 enzymes mais surtout l'ADN polymérase. La réplication commence en un point origine et se poursuit en général dans deux sens opposés au niveau de fourches de réplication.


L'ADN polymérase nécessite une molécule d'ADN à répliquer, des désoxyribonucléotides, de l'énergie (ATP) et un petit fragment d'ARN complémentaire d'une petite séquence de l'ADN à répliquer (amorce). Il existe plusieurs ADN polymérases chez les bactéries (au moins 3) et plus encore chez les eucaryotes.

La réplication se déroule avec une fidélité excellente: chez E. coli on estime le nombre d'erreurs de copie à 1 pour 109 à 1010 nucléotides, ce qui fait, pour un génome évalué à 4,7.106 paires de bases, une erreur pour 1.000 à 10.000 réplications. Il existe des systèmes de réparation de l'ADN qui utilisent aussi une ADN polymérase. La vitesse de polymérisation (ajout des désoxyribonucléotides pour former le nouveau brin) est de l'ordre de 20 à 1.000 nucléotides par seconde chez E. coli.

Le problème du déterminisme du cycle cellulaire est aussi celui du lien entre la croissance cellulaire et la réplication de l'ADN.... il est loin d'être résolu. En tout il ne sera pas traité dans ces pages.

 


Essai d'analyse de l'expérience de Meselson et Stahl à l'aide des données récentes sur la synthèse d'ADN chez E. coli avec une incursion vers l'histoire des sciences

Comment les cellules se multiplient-elles ?

Nous avons vu en seconde que E. coli vit en colonies habituellement, ou, mieux, que cet organisme pouvait être considéré comme pluricellulaire, et que le rythme de multiplication de chaque cellule dépend de son âge dans l'organisme (la colonie) et des conditions nutritionnelles. Une cellule d'E. coli contient en moyenne 6 molécules d'ADN plus ou moins en réplication.

Que signifie donc la mise en culture sur milieu lourd ou léger pendant une génération ?

Le raisonnement interprétatif de l'expérience suppose qu'un nombre n de bactéries s'est multiplié en 2n pendant la durée de l'expérience et que la quantité d'ADN q a été multipliée de la même manière en 2q.

On est ainsi amené naturellement à se pencher sur l'article original. On découvre alors un continent peu exploré qui relève de l'histoire des sciences... qui nécessite bien sûr un peu de maîtrise de l'anglais scientifique depuis la seconde moitié du XXème siècle.


Vous apprécierez de suivre une
conférence (en anglais - demande un bon niveau!!!!) donnée par Meselson le 22 avril 2005 à l'ENS sur le rôle de la méïose


Les nos portés ci-dessous entre parenthèses seront utilisés pour des renvois aux articles

En travaux

(1) article original :
The replication of DNA in Escherichia coli, Meselson and Stahl, 1958, Proc. N. A. S. (PNAS), 44 (7): 671

(4) Parmi les références citées (10) sur la méthode d'équilibre sur gradient de concentration voir une autre publication de l'équipe : Equilibrium sedimentation of macromolecules in density gradients, M. S. Meselson, F. W. Stahl, and J. Vinograd, 1957, PNAS, 43, 581

Deux articles récents:
-
(2) Meselson and Stahl: The art of DNA replication, Tinsley H. Davis, 2004, PNAS 101 (52): 17895.; louangeur, c'est de la petite histoire ; mais qui permet de mieux se figurer le lien entre le modèle de Watson et Crick, le travail de Linus Pauling (Stahl, jeune postdoc, travaillait - infructueusement - , sur les bactériophages, dans son équipe) et Max Delbrück (qui orienta Meselson, alors jeune doctorant, vers le concept d'une expérience qui pourrait être interprétée avec le modèle de la double hélice). Pour l'histoire voir le paragraphe 1.2.2 du cours de 1ère S
-
(3) Density matters: The semiconservative replication of DNA, Philip C. Hanawalt, 2004, PNAS 101 (52): 17889; article panégyrique

Sur les conditions de l'expérience des questions apparaissent:


Quelles sont les voies de synthèse de l'ADN envisagées ici et comment l'azote est-il concrètement utilisé ?

Biosynthèse et dégradation des nucléotides in Principes de biochimie, Lehninger, Nelson et Cox, 1994, Médecine-Sciences, Flammarion, p 715 et s)

De nombreux composés cellulaires sont probablement marqués à l'14N ou à l' 15N. La technique employée ne permet pas de les explorer.

Le milieu de culture contient :
- dans la première phase de l'expérience comme seule source d'azote du 15NH4Cl.
- dans la seconde phase de l'expérience , et comme source d'azote supplémentaire par rapport au (14N ou 15N)H4Cl, des ribosides (A et U pour l'expérience 1 et A, G, U et C pour l'expérience 2).
Les ribosides fournis contiennent bien évidemment du 14N, l'isotope stable (tableau de Mendeleïev).
- comme source d'autres éléments 0.049 M de Na2HPO4, 0.022 M de KH2PO4, 0.05 M de NaCl, 0.01 M de glucose, 10-3 M de MgSO4, et 3 X 10-6 M de FeCl3
(réf 13 de 1).

On notera aussi que le milieu n'était pas fourni en une seule fois mais que la concentration en bactéries était maintenue plus ou moins fixe par addition de milieu marqué.

(1) « Bacteria uniformly labeled with N15 were prepared by growing washed cells for 14 generations (to a titer of 2 X 108/mL) in medium containing 100 µg/mL of N15 H4Cl of 96.5 per cent isotopic purity. An abrupt change to N14 medium was then accomplished by adding to the growing culture a tenfold excess of N14H4Cl, along with ribosides of adenine and uracil in experiment 1 and ribosides of adenine. guanine, uracil, and cytosine in experiment 2, to give a concentration of 100µg/mL of each riboside. During subsequent growth the bacterial titer was kept between 1 and 2 X 108/mlL by appropriate additions of fresh N14 medium containing ribosides. Samples containing about 4 X 109 bacteria were withdrawn from the culture just before the addition of N14 and afterward at intervals for several generations. Each sample was immediately chilled and centrifuged in the cold for 5 minutes at 1,800 X g. After resuspension in 0.40 ml. of a cold solution 0.01 M in NaCl and 0.01 Min ethylenediaminetetra-acetate (EDTA) at pH 6, the cells were lysed by the addition of 0.10 mL. of 15 per cent sodium dodecyl sulfate and stored in the cold.»

Chez les bactéries la synthèse d'ADN se fait à partir de désoxyribonucléotides triphosphates, d'une amorce ARN et de complexes enzymatiques de type ADN polymérases (3 sont connues chez E. coli depuis les années 1970). D'autres complexes protéiques nécessaires sont aujourd'hui connus (primosome, hélicases, topo-isomérases...).

La synthèse des nucléotides n'est bien sûr pas réalisée selon une voie unique; on distingue habituellement les voies de novo, à partir de précurseurs (aa, ribose*, CO2 et NH3) et les voies de récupération à partir des bases et acides nucléiques libérés par destruction des acides nucléiques. Les nucléotides ne sont pas synthétisés à partir des bases libres mais les noyaux azotés sont synthétisés à partir du ribose-5-phosphate.
- Le noyau purine* est construit pas fixation d'un ou de quelques atomes à la fois sur le ribose (travaux de J. Buchanan dans les années 1950). Cette synthèse fait intervenir des aa comme le glutamate et l'aspartate.
- Le noyau pyrimidine* est synthétisé sous forme d'orotate (lui-même issu de l'aspartate) attaché au ribose phosphate.

Les désoxyribonucléotides* sont ensuite synthétisés à partir des ribonucléotides* (par la ribonucléotide réductase). Les nucléotides à thymine proviennent des désoxyribonucléotides dCDP et dUMP . Ces deux éléments expliquent qu'il ne soit pas utile d'ajouter ni des désoxyribosides ni une thymidine.


Le pool de nucléotides cellulaires étant considéré comme infime la cellule doit donc activer ses voies de biosynthèse de nucléotides pendant la réplication. Cette biosynthèse assure donc l'incorporation de l'azote marqué dans de nombreuses molécules du métabolisme azoté et non pas uniquement dans l'ADN.

* voir cours de seconde sur les acides nucléiques


Quel est le composé observé à la suite des traitements et sous quelle forme est l'ADN mis en évidence grâce aux UV ?

En travaux

La technique ne permet pas de savoir la cause exacte de la différence de densité.

La séparation de molécules en fonction de leur densité par sédimentation dans un gradient de densité de ClCs a été longuement étudiée par Mat Meselson qui en a fait son sujet de thèse (deuxième partie) sous la direction de Linus Pauling (2).

L'application faite à la possible séparation des molécules d'ADN nouvellement formées par réplication a été une suite logique.

Pour appréhender les principes de l'analyse des pics d'absorption observés je conseille la lecture d'un article de 1957 (4): Equilibrium sedimentation of macromolecules in density gradients, M. S. Meselson, F. W. Stahl, and J. Vinograd, 1957, PNAS, 43, 581

La technique ne présente des pics gaussiens - qui furent obtenus en (1) après de multiples essais INFRUCTUEUX rapportés mais non documentés (voir ci-contre) - que si on imagine obtenir un seul type de substances de MÊME DENSITÉ et HOMOGÈNES. Pour l'ADN considéré, les molécules peuvent être de plus ou moins grande taille, contenir plus ou moins d'atomes lourds, être plus ou moins hydratées (ne pas oublier que l'ADN contient une grande quantité d'eau : 80% du poids de la molécule d'ADN (voir page sur la cellule)...

Il faudrait donc considérer que dans l'expérience (1) les molécules d'ADN ont été effectivement fragmentées de façon homogène par le pipettage (voir ci-contre) et qu'ensuite le traitement utilisé pour lyser les bactéries (voir plus haut (1) réfrigération, centrifugation, NaCl, EDTA, dodecylsulfate de sodium...) n'a pas modifié la teneur en eau de l'ADN (ou l'a modifié de façon homogène)...

Si l'on considère que la densité n'est pas due à l'ADN mais à l'eau de solvatation qui emprisonne une quantité relativement homogène de (14N ou 15N)H4Cl qui résiste au lavage on peut interpréter aisément les résultats obtenus DE FAÇON TOUT À FAIT HYPOTHÉTIQUE. Une densité intermédiaire après un bref passage sur un milieu de 14NH4Cl. Après un passage plus long, on sépare une certaine quantité d'ADN qui n'est plus solvaté que par de l'eau enrichie au 14NH4Cl. La méthode n'étant pas quantitative il est fort difficile de comprendre quel mécanisme est plus ou moins révélé ici.

Si l'on tient compte ensuite du nombre moyen de molécules d'ADN dans chaque cellule (environ 6) le "temps de génération" utilisé serait donc plutôt le temps nécessaire au renouvellement de l'eau de solvatation de l'ADN ....


Une année entière de résultats non interprétables a précédée l'obtention de clichés de bonne qualité interprétables dans le bon sens. Ceci semble être du au pipettage de l'ADN qui aurait provoqué une importante fragmentation des molécules.
Comme le souligne Nissim Amzallag on aimerait maintenant connaître les résultats non interprétables dans le cadre de l'hypothèse qui a fait l'objet de la publication.

(voir extrait de la réf 2 ci-contre ------->)


« Les résultats admirablement clairs furent obtenus par un heureux hasard. Les pics bien délimités sont dus à la séparation de l'ADN lors de l'échantillonnage ; un ADN non fragmenté ne se serait pas séparé aussi bien. Stahl compare le pipettage de l'ADN au "lancer de spaghettis au-dessus des chutes du Niagara". Le stress du pipettage a provoqué une importante fragmentation de l'ADN, même s'ils n'ont pas pris conscience sur le moment combien cette action a été critique dans l'obtention de pics »
« the ''delightfully clean data'' were serendipitous. The clean data peaks they observed resulted from the DNA fragmenting during handling; unfragmented DNA would not have separated as nicely. Stahl likens pipetting DNA to ''throwing spaghetti over Niagara Falls.''
The stress of the pipetting caused tremendous shearing of the DNA, although they did not realize this at the time, nor did they realize how critical this would be to obtaining clean peaks.»
(2)


Une question déjà soulevée par Schachman se posait alors que le rôle du CsCl qui aurait pu intéragir avec l'ADN.
(voir texte de la note 12 ci-contre--->)

Mais nos connaissances modernes sur l'eau dans l'ADN portent le questionnement bien au-delà.


« Our attention has been called by Professor H. K. Schachman to a source of error in apparent molecular weights determined by density-gradient centrifugation which was not discussed by Meselson, Stahl, and Vinograd. In evaluating the dependence of the free energy of the DNA component upon the concentration of CsCl, the effect of solvation was neglected. It can be shown that solvation may introduce an error into the apparent molecular weight if either CsCl or water is bound preferentially. A method for estimating the error due to such selective solvation will be presented elsewhere.» (note12 de 1)

Des affirmations que je pense pouvoir avancer à partir des sources citées ci-dessus :


Les expériences de Meselson et Stahl ont été conçues dans le but de conforter l'hypothèse de la double hélice de Watson et Crick.

Les mécanismes compliqués de déroulement et de coupure-collage de la chaîne d'ADN en amont du point de réplication (topoisomérases)(2) sont venus apporter de possibles confortations des hypothèses admises pour ces expériences mais la taille des fragments d'ADN envisagés reste un problème.

D'autres interprétations mériteraient d'être explorées chimiquement dans l'optique d'un ADN cytoplasmique sous une phase plus condensée et moins dépendante de l'imaginaire dépassé d'une molécule unique d'acide désoxyribonucléique double brin (voir ci-dessous le raisonnement de Taylor qui est aussi simpliste pour les chromosomes de la vesce).


en travaux


2. l'ADN lors du cycle cellulaire chez les eucaryotes

Chromosomes

Comment les cellules se multiplient-elles ?

Les différents états de l'ADN ont déjà été vus en seconde : chromatine pendant l'interphase et chromosome pendant la mitose.

Cours de seconde sur les divisions de croissance


Le cycle cellulaire des eucaryotes à surtout été étudié chez la levure de bière. Les données obtenues chez les cellules en culture et les cellules embryonnaires sont les plus nombreuses pour les animaux. Selon l'organisme, l'âge de la cellule, et le type cellulaire, on a des différences fondamentales. Seuls quelques points communs seront présentés ici.

 

Le cycle cellulaire des cellules eucaryotes est beaucoup plus variable que celui des cellules procaryotes. Deux phases sont toujours observées:

  • une phase de croissance, la plus longue, très généralement continue, qui correspond à l'interphase nucléaire (et pendant laquelle l'ADN est répliqué);
  • et une phase de division (cytodiérèse) concomitante avec la mitose, division du point de vue nucléaire, très généralement brusque et plus courte que la phase précédente

En interphase le noyau est au repos du point de vue de la division mais pas de la synthèse car c'est en phase S de l'interphase qu'a lieu la réplication de l'ADN qui précède toute division (sauf dans le cas de la deuxième division de la méiose, voir cours de terminale).

L'expérience de Taylor met en évidence une caractéristique essentielle de cette phase de réplication: c'est une réplication semi-conservative. Elle fait appel aux mêmes mécanismes que la réplication chez les procaryotes. Du fait de la longueur du génome, elle commence en de multiples points origine simultanément. (Il faudrait plus de 500 h à raison de 50 nucléotides à la seconde pour répliquer un seul chromosome humain à partir d'un seul point origine).

Les molécules d'ADN polymérases et les nombreuses enzymes associées sont bien moins connues que chez les procaryotes.


Expérience de Taylor (1957)
Bordas p 100*
*cette expérience scolaire n'est pas l'expérience historique de Taylor qui sera analysée plus bas

Les cellules eucaryotes cultivées in vitro sont des fragments racinaires de Bellevalia romana, une plante de la famille du Lys. La réplication de l'ADN est suivie à l'aide de thymidine tritiée (la thymidine est le nucléoside (thymine + sucre)) marquée par le tritium (3H ou 3T) isotope lourd et radioactif de l'hydrogène.

L'incorporation du désoxyribonucléotide radioactif est suivi par des autoradiographies qui sont des expositions de préparations cellulaires à une plaque ou un film photographique. Les composés argentés de l'émulsion photographique précipitent lorsqu'ils rencontrent un électron émis par radioactivité ß- par les atomes de 3H incorporés dans le thymidine radioactive. Les grains d'argent forment des points noirs que le développement révèle. L'emplacement des points noirs indique donc de façon approximative la position des molécules de thymidine tritiée de la préparation cellulaire. Les temps d'exposition des émulsions photographiques sont bien sûr beaucoup plus longs que pour une impression par les photons.

Les racines de Bellevalia romana, sont cultivées pendant la durée d'un cycle cellulaire sur un milieu "chaud", c'est-à-dire contenant de la thymidine tritiée. Les cellules en métaphase de mitose sont repérées et certaines sont autoradiographiées. L'aspect d'un chromosome est représenté ci-dessous à gauche. Certaines de ces cellules sont replacées immédiatement sur un milieu "froid", c'est-à-dire dépourvu de thymidine radioactive , pendant la durée d'un deuxième cycle cellulaire. L'aspect d'un chromosome d'une autoradiographie d'une cellule en prophase de mitose est présentée ci-dessous à droite.

Illustration de l'interprétation de l'expérience de Taylor
(en orange: le centromère (qui n'est pas visible); les points noirs correspondent aux grains d'argent de l'autoradiographie)
(schémas d'après Principe de Biochimie, Lehninger et al, 1994, Flammarion-Médecine-Sciences)

Explication de l'expérience:

Tout en n'oubliant pas que le chromosome est une structure complexe de compaction de l'ADN nucléaire (comme le représente le schéma ci-contre - l'ADN d'une cellule humaine est estimé à environ 2 m soit quelques centimètres par chromosome pour un diamètre de 2 nm soit un rapport longueur sur diamètre de quelques dizaines de millions !!!!) on s'intéresse à la composition de chaque chromatide.

 

Les chromatides radioactives sont composées d'une molécule d'ADN hybride. C'est-à-dire que la molécule d'ADN hybride à incorporé dans UN de ses brins, le brin nouvellement formé, de la thymidine tritiée. Cette incorporation n'a lieu que pendant la phase S du cycle cellulaire (synthèse de l'ADN) et ne touche donc que les cellules qui étaient dans cette phase de l'interphase peu après le début de la mise en culture. Lorsque les cellules sont retirées du milieu chaud et observées, seules celles qui se trouvent maintenant en métaphase peuvent présenter de tels chromosomes.

Le fait que les deux chromatides, issues de la réplication de l'ADN en phase S de l'interphase, sont TOUTES LES DEUX hybrides (c'est-à-dire composées d'un brin ancien, non radioactif et d'un brin nouveau ayant incorporé de la thymidine tritiée radioactive) peut être expliqué par un mécanisme semi-conservatif de la réplication de l'ADN, comme chez les Procaryotes.


Place de la réplication dans le cycle cellule d'une cellule eucaryote et aspect très schématique des chromosomes au cours des différentes phases nucléaires.

 

 

 

Le "piège" pour un élève inattentif vient de ce que certains auteurs qualifient, improprement, de chromosome, tout filament d'ADN de la cellule. Ce mot doit être réservé aux structures colorables et donc composées d'ADN et de PROTÉINES de la cellule en phase M du noyau (voir chromosomes ou l'ancien cours de spécialité de terminale).


Les étapes de la mitose sont classiquement regroupées en 4 phases qui présentent bien sûr des limites parfois floues ou chevauchantes:

* la prophase où la chromatine se condense et forme les chromosomes qui deviennent COLORABLES et VISIBLES en microscopie optique; ce sont des chromosomes doubles (à deux chromatides issues de la réplication en phase S de l'interphase); l'enveloppe nucléaire se désagrège par fragmentation des citernes du réticulum qui entourent le nucléoplasme ;


* la métaphase où les chromosomes MIGRENT car ils sont TIRÉS par les microtubules kinétochoriens et se disposent de part et d'autre du plan équatorial de la cellule en division; ce plan décrit de façon précise l'orientation des deux cellules filles (il est matérialisé par un anneau ou un disque de filaments d'actine, voir page suivante); si la cellule est étirée, ce plan peut diviser la cellule longitudinalement ou transversalement ce qui donnera une division en épaisseur ou en longueur, déterminante pour la croissance des cellules végétales à paroi par exemple; entre les deux pôles de division, situés symétriquement par rapport au plan équatorial, se mettent en place des microtubules qualifiés de fusoriaux car ils dessinent un fuseau de division;


* l'anaphase où les chromosomes doubles SE SCINDENT au niveau des centromères, chaque chromosome fils (composé d'une chromatide) est TIRÉ vers l'un des pôles de la cellule par ses microtubules kinétochoriens qui glissent le long des microtubules du fuseau de division;

* la télophase où les chromosomes se déroulent et les filaments d'ADN redeviennent NON COLORABLES sous forme de chromatine; l'enveloppe nucléaire se met à nouveau en place autour du nucléoplasme.


Essai d'analyse de l'expérience de Taylor à l'aide des données récentes sur les chromosomes avec une incursion vers l'histoire des sciences

Une fois encore l'effort qui consisterait, pour une classe (TPE SVT-anglais ?), tout comme pour un enseignant (curieux), à travailler sur le texte original, serait d'une extrême richesse.
Quelques exemples de pistes:


l'article original est accessible :
The organization and duplication of chromosomes as revealed by autoradiographic studies using Tritium-labeled Thymidine, J. Herbert Taylor, Philip S. Woods and Walter L. Hughes, 1957, PNAS, 43 (1), 122-128

« Experimental Design and Results.
Roots remained in the isotope solution for 8 hours, which is approximately one-third of the division cycle. Since about 8 hours intervene between DNA synthesis in interphase and the next anaphase, few if any nuclei which had incorporated the labeled thymidine should have passed through a division before the roots were transferred to the colchicine solution. In the presence of colchicine, chromosomes contract to the metaphase condition, and the sister chromatids (daughter chromosomes), which ordinarily lie parallel to each other, spread apart. The sister chromatids remain attached at the centromere region for a period of time, but they finally separate completely before transforming into an interphase nucleus. Because colchicine prevents anaphase movement and the formation of daughter cells, but does not prevent chromosomes from duplicating, the number of duplications following exposure to the isotope can be determined for any individual cell by observing the number of chromosomes. Cells without a duplication after transfer to colchicine will have the usual 12 chromosomes at metaphase (c-metaphase), each with the two halves (sister chromatids) spread apart but attached at the centromere. Cells with one intervening duplication will contain 24 chromosomes, and those with two duplications will contain 48 chromosomes.
Two groups of roots were fixed. The first group remained in the colchicine solution 10 hours. The second group remained in the colchicine for 34 hours. In the first group, cells at metaphase had only 12 chromosomes, which indicated that none of these had duplicated more than once during the experiment. The chromosomes in these cells were all labeled, and, furthermore, the two sister chromatids of each chromosome were equally and uniformly labeled (Fig. 1, a and b). The amount of radioactivity in the chromosomes varied from cell to cell, as would be expected in a nonsynchronized population of cells, but within a given cell the label in different chromosomes was remarkably uniform.

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Un aperçu (très mauvaise qualité juste pour donner envie d'aller voir l'article original en libre accès) des microphotographies obtenues par Taylor, Woods et Hughes (fig 1 et 2 de l'article ; les n° ont été changés); série a (à gauche) :avec mise au point sur les chromosomes; série b (à droite) : avec mise au point sur les grains d'argent de l'émulsion photographique.


In the second group, cells contained either 12, 24, or 48 chromosomes. Those with 12 chromosomes usually were not labeled, but when labeling occurred, sister chromatids were uniformly labeled as in the first group. In cells with 24 chromosomes, all chromosomes were labeled; however, only one of the two sister chromatids of each was radioactive (Fig. 2, a and b). Evidently the pool of labeled precursor in the plant had been quickly depleted after the plant was removed from the isotope solution, and these cells with 24 chromosomes had gone through a second duplication in the absence of labeled thymidine.

In the few cells with 48 chromosomes, analysis of all 48 was not possible. However, in several cases where most of the chromosomes were well separated and flattened, approximately one-half of the chromosomes of a complement contained one labeled and one nonlabeled chromatid, while the remainder showed no label in either chromatid. The appearance of cells with 48 chromosomes in a 34-hour period in colchicine also indicates that there was some variation in the predicted 24-hour division cycle.
In cells with 24 and 48 chromosomes a few chromatids were labeled along only a part of their length, but in these cases the sister chromatids were labeled in complementary portions (Fig. 2, b, arrow). This is the expected situation following sister chromatid exchange and demonstrates that resolution is sufficient to see crossing over in cytological preparations. A careful search of numerous cells with 12 chromosomes failed to yield a decisive case of half-chromatid exchange, which should produce a portion of a chromatid without a label at the first c-metaphase following incorporation of the isotope.»

Remarque: dans le texte, l'auteur parle de duplication de la cellule à la place des duplication de l'ADN à l'interphase, ce qui est déjà un vocabulaire qui suppose l'interprétation qui tend ici à être prouvée. C'est plus que déroutant. Il devrait parler du doublement soit du nombre de chromosomes, soit de la masse d'ADN.
« Protocole expérimental et Résultats: (les références des figures ont été changées pour cadrer avec les photos ci-contre)
Les racines sont placées dans la solution isotopique pendant 8 heures, ce qui correspond à peu-près au tiers de la durée d'un cycle de division. Étant donné que l'intervalle entre la synthèse de l'ADN pendant l'interphase et l'anaphase qui suit est d'environ 8 heures, il n'y a que peu ou pas de noyau qui, ayant incorporé la thymidine marquée, puisse s'être divisé avant que l'on ne transfère les racines dans la solution de colchicine. En présence de colchicine, les chromosomes se contractent sous une forme métaphasique, et les chromatides sœurs (chromosomes fils) qui, ordinairement, sont allongés parallèlement l'une contre l'autre, s'écartent. Les chromatides sœurs restent attachées au niveau de la région du centromère pendant un certain temps, mais ils finissent par se séparer complètement et se transforment [comme] dans un noyau interphasique. Puisque la colchicine empêche les mouvements anaphasiques et la formation des cellules filles, sans empêcher la duplication des chromosomes, le nombre de duplications qui suivent l'exposition à l'isotope peut être déterminé pour chaque cellule en comptant le nombre de chromosomes. Les cellules sans aucune duplication auront, après transfert dans la colchicine, le nombre normal de 12 chromosomes lors de la métaphase (c-métaphase), chaque cellule ayant les deux moitiés de chromosomes (chromatides sœurs) qui se séparent mais restent attachées par le centromère. Les cellules ayant réalisé une duplication contiendront 24 chromosomes, et celles avec deux duplications contiendront 48 chromosomes.
Deux groupes de racines sont fixés. Le premier groupe est placé dans la solution de colchicine durant 10 heures. Le second groupe pendant 34 heures. Dans le premier groupe, les cellules en métaphase ont seulement 12 chromosomes, ce qui indique qu'aucune de ces cellules ne s'est dupliquée plus d'une fois pendant cette expérience. Les chromosomes dans ces cellules étaient tous marqués et, de plus, les deux chromatides sœurs de chaque chromosome étaient également et uniformément marquées (Fig. 1, a et b). La quantité de radioactivité au niveau des chromosomes était variable selon les cellules, comme on pouvait s'y attendre pour une population de cellules non synchronisées, mais, à l'intérieur de chaque cellule, le marquage des différents chromosomes, était remarquablement uniforme.
Dans le second groupe les cellules présentaient 12, 24 ou 48 chromosomes. Celles avec 12 chromosomes n'étaient habituellement pas marquées, mais, lorsqu'elles l'étaient, les chromatides sœurs étaient uniformément marquées comme dans le premier groupe. Dans les cellules avec 24 chromosomes, tous les chromosomes étaient marqués; cependant, une seule des chromatides sœurs de chaque chromosome était radioactive (Fig.2, a et b). Il est donc évident que la quantité de précurseur radioactif dans le plante a chuté rapidement après que l'on eut transféré les plantes en dehors de la solution isotopique, et donc les cellules avec 24 chromosomes ont réalisé une seconde duplication en absence de thymidine marquée.
Dans les quelques cellules avec 48 chromosomes, l'analyse des 48 chromosomes n'a pas été possible. Cependant dans les quelques cas où la plupart des chromosomes étaient bien séparés et étalés, environ la moitié des chromosomes d'une cellule présentaient une chromatide marquée et une autre non marquée, alors que les autres ne montrait aucun marquage sur les chromatides. L'apparence des cellules à 48 chromosomes après une période de 34 heures d'exposition à la colchicine montrent aussi qu'il existe quelques variations dans la durée du cycle de division de 24 heures.
Dans les cellules à 24 et 48 chromosomes quelques chromatides n'étaient marquées que sur une portion de leur longueur, mais, alors, la chromatide sœur était marquée au niveau de la zone complémentaire (Fig 2, b, flèche). ceci est le cas attendu de la conséquence d'un échange entre chromatides sœurs et cela prouve que la résolution est suffisante pour voir des crossing-over dans les préparations cytologiques. Une recherche attentive des nombreuses cellules avec 12 chromosomes n'a pas permis de mettre en évidence des échanges de demi-chromatides, qui auraient dû présenter une portion de chromatide sans marquage lors de la première c-métaphase qui suit l'incorporation de l'isotope.»


L'interprétation des résultats est tout d'abord plus compliquée que ce qui est scolairement présenté (plus haut par exemple !!!): voici 4 points

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour ceux qui ont accès à des publications scientifiques payantes, une revue "moléculariste" des rôles de la colchicine et l'accès aux références bibliographiques est :
Unraveling cell division mechanisms with small-molecule inhibitors, Michael A Lampson and Tarun M Kapoor (Université de Rockfeller), 2006,Nature Chemical Biology 2, 19-27

(1) - l'organisme utilisé est la vesce: Vicia faba qui possède 12 chromosomes.

(2) - la durée du cycle cellulaire de la vesce est d'abord considérée comme uniforme et égale à 24 heures, ce qui est plus ou moins remis en cause dans les résultats obtenus (il semble qu'il y ait des différences entre les cellules d'un même tissu - voir la fin de l'avant dernier paragraphe ci-dessus).

(3) - le rôle de la colchicine est plus complexe que je ne le pensais (je croyais savoir qu'elle inhibait la polymérisation de la tubuline des microtubules, empêchant ainsi le déplacement des chromosomes et la cytodiérèse). A faible concentration la colchicine bloque la dynamique des microtubules (forces qui seraient engendrées par leur déplacement ou leur polymérisation-dépolymérisation...!). À plus forte concentration la colchicine empêche la formation des microtubules. En fait ses conséquences semblent être bien plus variées et il n'est pas excessif de penser que l'action proposée sur la tubuline soit loin d'être la seule (voici le paragraphe 1 ci-dessus): « En présence de la colchicine, les chromosomes se contractent sous une forme métaphasique, et les chromatides sœurs (chromosomes fils), qui ordinairement sont allongés parallèlement l'une contre l'autre, s'écartent.. Les chromatides sœurs restent attachées au niveau de la région du centromère pendant un certain temps, mais ils finissent par se séparer complètement et se transforment [comme] dans un noyau interphasique ». Si l'on se repose sur la qualité des observations de Taylor, la colchicine semblerait plutôt provoquer une accélération du processus mitotique de condensation-séparation-décondensation des chromosomes, tout en empêchant la séparation des chromosomes en deux masses et la cytodiérèse.
Il ne faut pas oublier que la totalité de l'interprétation des figures observées repose sur le rôle que l'on attribue à la colchicine. En effet, si l'on n'utilisait pas de colchicine, rien ne permettrait de dire, en présence de chromatides diversement marquées, qu'il ne s'agit pas d'un marquage différentiel selon les cellules...
(cette idée est intéressante à creuser pour les élèves : il suffit de poser la question: Que se passe-t-il en l'absence de colchicine ? Ce qui revient à montrer l'importance d'avoir un rôle précis consensuel et uniforme pour cette substance).


Dans le cadre d'une interprétation moins moléculaire, le but n'est pas de rechercher les éléments complexes de contrôle qui permettent de synchroniser les différentes étapes identifiées: formation des chromosomes, attachement aux microtubules, migration, séparation, regroupement et cytodiérèse; mais de se reposer sur la dynamique (donnée comme phénomène) qui est une catastrophe de division et de rechercher les attracteurs qui pourraient être impliqués et les conflits qui généreraient les points stables, donnant naissance aux structures observées (voir quelques pistes dans la page générale sur les molécules).


Un aperçu (très mauvaise qualité juste pour donner envie d'aller voir l'article original en libre accès) des microphotographies obtenues par Taylor, Woods et Hughes (fig 1 et 2 de l'article ; les n° ont été changés)
série a (à gauche) :avec mise au point sur les chromosomes,
série b (à droite) : avec mise au point sur les grains d'argent de l'émulsion photographique

série 1 : Un chromosome à deux chromatides marquées d'une cellule à 12 chromosomes après une exposition de 10h à la colchicine. Les chromatides sont interprétées comme étant encore partiellement accolées.

série 2 : plusieurs chromosomes d'une cellule à 24 chromosomes après 34h d'exposition à la colchicine; pour l'interprétation de la différence entre chromatides et chromosomes (voir plus bas) on s'appuie sur l'interprétation liée à l'ADN (ce qui est un raisonnement erroné): la forme en "étoile à 3 branches" en haut à gauche ne peut, du fait de l'hypothèse interprétative d'un marquage sur une seule chromatide, que correspondre à deux chromosomes partiellement accolés; le chromosome le plus à droite, celui du centre et celui le plus en bas, seraient des chromosomes avec deux chromatides assez bien séparées et l'une des chromatides seulement marquée; le chromosome en L ouvert correspondrait à deux chromatides d'un même chromosome largement éloignées mais réunies au sommet...

série 3 : dans une cellule de la série 2 un distingue bien des zones marquées sur chaque chromatide qui semblent s'être échangées; les auteurs les interprètent comme des crossing-over qui interviendraient en prophase de MITOSE ce qui est très peu conventionnel !!!! (voir le dernier paragraphe du texte ci-dessus). Comme ces figures ont été observées uniquement pour les cellules à 24 et 48 chromosomes on peut penser que la perturbation des dynamiques qui ont conduit à cet échange est du à la colchicine et que ce n'est pas un phénomène usuel lors des mitoses. mais il y a certainement quelque chose à creuser ici.


(4) - l'interprétation des figures métaphasiques transitoires obtenus avec de la colchicine et fixées (l'observateur ne s'intéresse qu'a cette phase qui permet de dénombrer les chromosomes et évaluer la radioactivité des chromatides séparées artificiellement par la colchicine) est aussi délicate:

+ le fait qu'il y ait des cellules à 12, 24 et 48 (rarement) chromosomes montre que le cycle de 24 h n'est pas absolu OU que la colchicine ne bloque pas uniformément la cytodiérèse ... Un dénombrement et une exploration du phénomène serait bienvenu.
+ la présence de 12 chromosomes (avec les deux chromatides marquées uniformément) dans toutes les cellules du premier groupe (exposées à la solution de colchicine pendant 10 heures
- voir paragraphe 2 ci-dessus) semble indiquer que le cycle cellulaire ne s'est pas déroulé dans sa totalité POUR LES CELLULES OBSERVÉES. On obtient des résultats interprétables dans le sens souhaité par l'auteur pour toutes les cellules qui ont atteint le stade métaphasique artificiel grâce à la colchicine. Mais qu'en est-il des autres ? On aimerait avoir une idée de la distribution de la radioactivité dans ces cellules.
+ dans les cellules du second groupe (exposées pendant 34 heures à la solution de colchicine), la présence de 12, 24 et 48 chromosomes est plus difficilement interprétable;

* les cellules à 12 chromosomes sont presque toutes non marquées et sont supposées par l'auteur (paragraphe 3 ci-dessus) s'être divisées (après réplication de leur ADN en absence de précurseur isotopique), mais on peut aussi supposer qu'elles ne se sont pas divisées ou divisées sans incorporer le marqueur. Les rares qui ont incorporé le marqueur (et sur les deux chromatides) pourraient aussi bien résulter d'une non division.
* les cellules à 24 chromosomes (tous les chromosomes sont marqués au niveau d'une seule chromatide) sont interprétées comme ayant des chromosomes répliqués deux fois avec séparation partielle des chromosomes et sans cytodiérèse.
* dans les quelques cellules à 48 chromosomes où la mise au point et l'obtention d'autoradiographies interprétables étaient possibles., quelques groupes de chromosomes semblaient présenter des résultats en accord avec l'interprétation précédente : la moitié marqués et uniquement au niveau d'une chromatide.

On est loin d'être sûr de la substance chimique à laquelle la radioactivié est associée.

* le tritium marque la thymidine (voir extrait 1ère colonne ci-contre) qui est censée s'incorporer au chromosome. Mais sous quelle forme ?

En effet, si l'on suppose que la thymidine est intégrée dans le chromosome il faut imaginer soit une voie de dégradation (fig 21-39 in Principes de Biochimie, Lehninger) suivie d'une synthèse de novo à partir de la cytidine ou de l'uridine ; soit, préférentiellement, une voie de récupération (ces voies de récupération sont beaucoup plus simples que les voies de synthèse)...

On peut affirmer que le Tritium marque le chromosome; mais dire qu'il marque l'ADN paraît peu sûr; en tout cas la radioactivité pourrait très bien se retrouver au niveau de plusieurs composés.

Un élément très surprenant: après la période de marquage on est surpris que les racines ne soient pas mis dans une solution IDENTIQUE MAIS NON RADIOACTIVE afin de réaliser un phénomène de "chasse". L'auteur affirme que les racines sont placées directement dans une solution minérale contenant de la colchicine (et donc sans thymidine). C'est un argument de plus pour douter de l'incorporation de la radioactivité sous forme de thymidine.

« Tritium-labeled thymidine of high specific activity (3 X 101 mc/mM) was prepared by catalytic exchange of tritium from the carboxyl group of acetic acid to a carbon atom in the pyrimidine ring of thymidine (details of the method to be described elsewhere).
Seedlings of Vicia faba (English broad bean) were grown in a mineral nutrient solution containing 2-3 jug/ml of the radioactive thymidine. This plant was selected because it has 121arge chromosomes, one pair of which is morphologically distinct, and because the length of the division cycle and the time of DNAsynhesisl in the cycle are known.4 After growth of the seedlings in the isotope solution for the appropriate time, the roots were thoroughly washed with water and the seedlings were transferred to a nonradioactive mineral solution containing colchicine (500 jug/ml) for further growth. At appropriate intervals mots were fixed in ethanol-acetic acid (3:1), hydrolyzed 5 minutes in 1 N HC1, stained by the Feulgen reaction, 'and squashed on microscope slides. Stripping film was applied, and autoradiographs were prepared as described previously (
voir extrait de l'article de la note5 ci-contre --->).

Autoradiographic and microphotometric studies of desoxyribose nucleic acid during micro gametogenesis in Lilium longiflorum, J. H. Taylor and R. D. McMaster, Chromosoma, 6, 489, 1954 »

« [slides] were coated with stripping film (Kodak Ltd., London) composed of a 5µm-layer of emulsion backed with a 10µm-layer of gelatin. All manipulations were performed before a white sheet of paper to improve visibility, since the safehght intensity must be very low. Maintenance of the humidity at 80-90 % further increases the facility with which stripping can be accomplished.
Care was used in all manipulations not to scrape or rub the emulsion surface, since friction causes fogging of the film. The film, which is obtained loosely attached to glass plates, was marked off into rectangular pieces 1" • 11/2 '' with a scalpel. To strip a piece of film from the glass, one edge was scraped loose and grasped with cover glass forceps. After stripping the film was uncurled by drawing lightly across a finger and dropped, emulsion side down, onto the surface of a bowl of water at 24-25° C. Within 2 minutes the film flattens on the surface of the water and swells to an equilibrium condition. The slide containing the tissue can then be dipped into the water under the film and raised obliquely so that one edge contacts the rectangular piece of film about 1/4 inch from its narrower edge..ks the slide is raised out of the water, the film drapes over the slide free of air bubbles, and laps under each edge of the slide about 1/4-1/2 inch. The film can be positioned if necessary, without stretching, within the first few seconds after removal from the water, by slipping along the edges of the slide with the fingers. After the film was applied the slides were dried thoroughly in a dark box by a stream of air from a hair drier, and were stored at 4--6°C. in bakelite slide boxes sealed with masking tape. All slides were faced in the same direction and separated from each other by a blank slide to eliminate radiation from adjacent slides. Drierite (anhydrous CaSO4) was placed in one end of the box to maintain a low humidity and thereby limit fading of the latent image.»

autres remarques...


* la technique d'obtention des autoradiographies est très complexe et minutieuse (on peut aussi se référer à l'article de 1954 (2,5 Mo ! 33 pages, voir extrait 2ème colonne ci-contre) où Taylor et McMaster décrivent la technique de marquage au 32P et d'observation microscopique des coupes d'anthères de Lis)
* les photographies de chromosomes présentées dans l'article sont très partielles( MO X2.200), bien loin des clichés plus ou moins vrais que l'on fourni dans l'enseignement actuellement. Il n'y a pas eu de comptage statistique ni de description détaillée complète des résultats. En fait les données sont bien pauvres en regard des interprétations. Cet article n'est pas vraiment un exemple de "bon" article scientifique, tel qu'on le conçoit maintenant.

 

* on peut noter avec quelle prudence Taylor parle de strand (brin) pour éviter de parler de la molécule d'ADN (maintenant cette terminologie est couramment employée pour parler d'une chaîne de nucléotide mais ce n'était pas le cas alors). La prudence avec laquelle il conclut son résumé est aussi remarquable (voir ci-contre le résumé et sa traduction). mais on peut aussi voir que ses hypothèses sont maintenant celles reconnues par tous. Il serait intéressant de proposer d'autres explications à ces résultats.

Summary.-Tritium-labeled thymidine was prepared and used for labeling chromosomes during their duplication. Analysis of autoradiographs showed that both daughter chromosomes resulting from duplication in the presence of labeled thymidine appeared equally and uniformly labeled. After an ensuing duplication in the absence of the labeled DNA precursor, the label appeared in only one of each two chromatids (daughter chromosomes). These findings indicate that DNA is synthesized as a unit which extends throughout the length of the chromosome.
The units remain intact through succeeding replications and nuclear divisions, except for occasional chromatid exchanges. Each chromosome is composed of two such units, probably complementary to each other. After each replication the four resulting units separate, so that each daughter chromosome always contains an "original" and a "new" unit. To explain the results, a model with two complementary units and a scheme of replication analogous to the Watson-Crick model of DNA is proposed.

Résumé:
De la thymidine marquée au tritium a été préparée et utilisée pour marquer des chromosomes lors de leur duplication. L'analyse d'autoradiographies montra que les deux chromosomes fils, résultant de la duplication en présence de thymidine marquée, apparaissaient comme également et uniformément marquées. Après une duplication supplémentaire en absence du précurseur marqué de l'ADN, le marquage n'apparut plus que sur une des deux chromatides (chromosomes fils). Ces résultats suggèrent que l'ADN est synthétisé comme une unité qui s'étend sur toute la longueur du chromosome.
Les unités restent intègres lors des duplications successives et les divisions nucléaires, excepté lors des échanges occasionnels de chromatides. Chaque chromosome est composé de deux de ces unités, probablement complémentaires l'une l'autre. Après chaque réplication les quatre unités résultantes se séparent de façon à ce que chaque chromosome fils contienne toujours une unité "originale" et une unité "nouvelle". Pour expliquer ces résultats, un modèle est proposé avec deux unités complémentaires et un schéma de réplication analogue au modèle de Watson et Crick pour l'ADN.

Du point de vue de l'histoire des sciences...

 


Le modèle de Taylor-Woods-Hughes de chromosome à l'image d'une molécule d'ADN réplicante du modèle de Watson et Crick
(fig 4 et 5 de l'article)

Taylor était bien conscient qu'en comparant un chromosome de la Vesce avec l'ADN d'un phage et une molécule d'ADN comme Watson et Crick il faisait une audacieuse hypothèse (voir extraits ci-contre).

Il est souvent rapporté que Meselson connaissait les résultats de Taylor au moins par celui qui l'avait "branché" sur l'ADN (Max Delbrück) (2) ce qui permet de faire des rapprochements entre les différents modèles proposés aux différentes échelles. Comment envisager ces modèles de façon plus moderne en proposant des modèles différents pour chaque échelle ?

« It is immediately apparent that this pattern of replication is analogous to the replicating scheme proposed for DNA by Watson and Crick. We cannot be sure, of course, that separation of the two polynucleotide chains in the double helix is involved, for the chromosome is several orders of magnitude larger than the proposed double helix of DNA.

[...]

The findings reported here are consistent with those recently reported for the distribution of PI2-labeled phage DNA by Levinthal (9). His data indicated that about 40 per cent of phage DNA is contained in one piece which is divided equally in the formation of two daughter particles, but undergoes no further distribution during the production of about 150 particles that result from the infection of a bacterium.
A phage particle would be analogous to a chromosome before duplication, and the first two daughter particles, each of which would be labeled, would be analogous to the two sister chromatids.Since the chromosome is much larger and contains much more DNA than the phage, it is remarkable that they behave in a similar manner in distribution of their DNA during »

En travaux