Sources:
L'eau dans la cellule vivante; État physique,
fonctions, Pascale Mentré, 2002, in L'eau dans les
aliments, M. Le Mestre, D. Lorient et D. Simatos coord., Tec
& Doc (ISBN: 2-7430-0523-8)
L'eau dans la cellule, Pascale Mentré, 1995, Masson
Encyclopedia Universalis, article "vie",
G. Canguilhem.
La théorie cellulaire, G.
Canguilhem in La connaissance de la vie, Hachette, 1952 (pp
47-98)
Comment les cellules construisent l'animal, Rosine CHANDEBOIS,
1999, Phénix éditions, Paris
Le gène et la forme (ou la démythification de
l'ADN), Rosine CHANDEBOIS, 1989, Ed. Espaces 34
Le cycle cellulaire chez les animaux et les
végétaux, Jean Clos, Marc Coumans et Yves Muller,
Biologie-Géologie, 3-2002, p 497-564
Un site en anglais (de Martin Chaplin) particulièrement riche:
http://www.sbu.ac.uk/water/index.html
Un site à recommander avec des vidéos et un texte clair
:http://www.cerimes.fr/e_doc/cellule/cellule.htm
Avertissement
Contrairement aux apparences, relayées par le titre et les
intertitres, cette page n'est qu'un essai de synthèse
d'éléments modernes et anciens qui, bien souvent,
dépassent le cadre de la théorie
cellulaire mais, pour cette fois encore, sans chercher à
le dépasser.
La cellule vivante n'est pas plus une chambre (cellula en latin), qu'une solution aqueuse, ni encore qu'une unité d'un programme du vivant. Une cellule est tout simplement un moyen commode que scientifiques et philosophes ont trouvé pour décrire le vivant. C'est une unité structurale et fonctionnelle. La cellule comme unité de structure découle du premier axiome de la théorie (tout être vivant est composé d'au moins une cellule). La cellule comme unité fonctionnelle est le plus petit élément VIVANT, qui possède TOUTES les caractéristiques du vivant. Si on reprend la formulation qui m'est chère, c'est la plus petite unité AU TRAVAIL: plus petite unité qui réalise un travail de nutrition, de relation et de reproduction. Le deuxième axiome de la théorie cellulaire (toute cellule est issue d'une autre cellule) permet de repousser la question de la vie hors du champ biologique et vers le champ philosophique, mais n'est pas une réponse. La biologie doit se contenter de cette propriété du vivant qu'elle ne peut relier à aucun objet sans sortir de sa méthode (qui est expérimentale et qui ne peut répondre à la question de la vie). La question de la pluricellularité est solutionnée en disant que chaque cellule est vivante mais n'est pas un être vivant, autonome. Seule la totalité de l'être vivant, composé d'innombrables cellules, peut être qualifié d'être vivant. C'est aussi une fuite ou une esquive et non une réponse. Un début de réponse (philosophique) peut être apporté si l'on considère l'organisme pluricellulaire comme une société de cellules.
Plan de cette page: |
1 Deux barrières à ouvrir pour une nouvelle conception de la cellule: 1ère barrière entrouverte: l'unité structurale de la cellule ne vient pas de ses membranes (fluides) ou de structures macromoléculaires plus ou moins complexes baignant dans une solution aqueuse mais de son eau qui est, pour sa quasi-totalité, "coincée" au sein de la foule de macromolécules qui remplit la cellule: cette eau est interfaciale (structurée) et c'est elle qui contrôle le fonctionnement cellulaire: 2. Des chiffres anciens, un regard nouveau (en cours) |
Ce schéma personnel ne doit pas
être utilisé sans mon accord; je suis
intéressé
par toute remarque à son sujet
Ce schéma a pour but de fixer les ordres de
grandeurs des dimensions et des objets observables ou imaginés
aux différentes échelles (il a
été réalisé pour une cellule eucaryote
mais peut aussi s'appliquer, en tenant compte de l'absence de noyau
et de structures membranaires internes, à la cellule
procaryote):
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une cellule est un sac rempli d'eau et de molécules organiques et minérales en solution aqueuse, siège d'innombrables réactions chimiques qui façonnent sa forme et son activité |
une cellule est entièrement structurée, dynamique (en évolution: naissance, vie et mort), autonome (au fonctionnement intégré mais dont l'unité dépasse la somme des parties), vivante (au travail: de relation, de nutrition et de reproduction); les molécules ne sont plus en solution mais complexées, transportées, associées à des structures d'ordre supérieur |
les structures intracellulaires sont des assemblages moléculaires stables : des complexes fonctionnels comme les ribosomes ou structurants comme les membranes (auxquelles sont associés des complexes fonctionnels enzymatiques par exemple). Ces structures sont dispersées ou regroupées dans le hyaloplasme, qui est fluide (ou à l'état de gel). |
La totalité de la cellule peut être décrite à l'aide d'assemblages moléculaires et fonctionnels comme une membrane ou un ribosome: il n'y a pas d'espace, sauf vésicules particulières, où règne un milieu aqueux où puisse s'appliquer la chimie des solutions; lorsqu'on décrit un système moléculaire en interaction avec l'ADN, il faut prendre en compte toutes les relations de voisinage structural et non pas seulement les molécules que l'on pense pouvoir s'accoler directement à l'hélice d'ADN: l'action des molécules peut être mécanique par resserrement de la double hélice et agir donc à distance, voir, depuis la membrane cytoplasmique... changer notre conception du hyaloplasme change singulièrement notre approche des régulations... qui ne sont plus toujours chimiques mais qui peuvent être mécaniques, thermiques où ioniques... |
Les membranes délimitent des compartiments où sont réalisées certaines parties du métabolisme; les molécules hydrosolubles diffusent librement dans chaque compartiment et passent d'un compartiment à l'autre à l'aide de pompes ou de canaux |
Les compartiments ne sont plus seulement membranaires mais doivent être redéfinis en terme d'accessibilité des molécules aux différentes réactions chimiques réalisées dans ce compartiment et en termes d'échanges entre compartiments: la compartimentation est aussi bien temporelle que spatiale: le terme de division du travail est on ne peut plus d'actualité; les molécules sont toujours transportées dans un compartiment aussi bien que d'un compartiment à l'autre. Ces transports peuvent rendre compte de métabolismes rapides. |
Un essai de représentation d'un modèle biologique d'une cellule "théorique" comme "complexe moléculaire structuré" (le schéma du cytoplasme est extrait et très modifié de Pascal Mentré, L'eau dans la cellule, Masson, 1995, p 173 fig 8.7) |
Quelques points majeurs, essentiellement d'après
Mentré, 2002 (à qui on se reportera
pour les références aux publications scientifiques dont
les auteurs ne seront pas cités dans cette page de
synthèse, étant donné que je ne les ai pas
lus... ):
- l'eau représente près de 80% en masse
de la cellule vivante mais cette eau est à près de
80% sous forme d'un film interfacial d'environ 1,1 nm
d'épaisseur qui se trouve entre les molécules
organiques structurant la cellule. Il reste donc 20% d'eau libre
où s'appliquent les lois de la chimie des solutions
aqueuses, principalement de l'eau présente dans des
vésicules.
Pour comprendre comment une augmentation de la surface de contact,
qui est due à la faible taille des macromolécules,
augmente considérablement le volume d'eau associé
à un ensemble de macromolécules, on peut prendre
l'exemple de l'ADN: à chaque nucléotide est
associé environ 20 molécules d'eau (eau "liée",
très structurée, non congelable) ce qui
représente environ 80% du poids de la molécule d'ADN.
Si l'on place de l'ADN cristallisé en solution aqueuse il
gonfle, ce que l'on peut expliquer par la mise en place d'au moins
une seconde couche d'eau entre les brins d'ADN, couche moins
structurée et congelable, dont l'origine pourrait provenir du
caractère fortement électrolytique de la
molécule d'ADN. Dans une cellule vivante, l'eau
associée à l'ADN atteint ainsi une masse nettement
supérieure à la masse d'ADN. On peut donc comprendre
que, tout comme ses composants moléculaires, dont la forme est
à la fois stabilisée par l'eau et due en partie
à cette hydratation, la cellule contient une énorme
quantité d'eau, fortement structurante et
structurée.
L'ADN, une molécule très hydratée |
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Il est évident que, si la majorité des
scientifiques actuels s'accordent pour la présence
d'une couche d'eau "liée", l'épaisseur de la
"coquille d'hydratation" est fortement
discutée par les spécialistes. |
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Même si les spécialistes discutent pour savoir quel est
le nombre habituel de couches d'eau liée autour des
macromolécules, elles sont omniprésentes. Une
molécule est toujours entourée d'eau plus ou moins
fortement attachée à elle. Cette eau est
ordonnée selon les interactions qu'elle développe avec
la molécule à laquelle elle se lie: on parle ainsi
d'eau liée ou d'eau structurée. Par rapport à la
figure 1, cette figure correspondrait à un grossissement
environ dix fois plus fort le grossissement le plus fort de la figure
1 soit environ 5.000.000 de fois; ce qui n'est bien sûr pas
accessible à une quelconque technique microscopique sur des
molécules en place dans un cytoplasme, et encore moins sur de
la matière vivante. Nous devons donc nous contenter
d'interprétations, réalisées par des
méthodes indirectes, et non d'observations.
Quelques formes de l'eau structurée
interfaciale:
Les liaisons hydrogène sont responsables de nombre de propriétés originales de l'eau liquide et solide (voir page sur l'eau). La petite taille du proton est à l'origine de l'intensité de la liaison hydrogène car un champ électrostatique engendré par une particule de charge q varie en q/d2, si d est la distance au centre de la particule. Le proton forme un pont entre un atome donneur auquel il est lié de façon covalente (O) et un atome accepteur qu'il attire électriquement (O ou N, mais aussi C ou encore un nuage d'électrons ¼ d'un cycle aromatique...) . L'habituelle linéarité de la liaison hydrogène observée entre molécules d'eau dans la glace, n'est pas conservée dans toutes les liaisons hydrogène qui peuvent aussi présenter des énergies variables en fonction de leur longueur (8 kJ.mol-1 pour les plus courtes liaisons à 42 kJ.mol-1 pour les liaisons les plus longues). L'établissement d'une liaison hydrogène modifiant les caractéristiques du donneur et de l'accepteur, on observe un phénomène de coopérativité qui facilite l'établissement de liaisons en chaîne. Ces chaînes de molécules d'eau liée expliqueraient nombre de fonctions de l'eau interfaciale.
La solvatation résulte de l'établissement de liaisons électrostatiques entre les molécules d'eau et les ions et de liaisons hydrogène entre les molécules d'eau de cette "couche" dite de solvatation. Le nombre moyen de molécules d'eau de la couche de solvatation dépend de la charge de l'ion et de son rayon atomique: plus l'ion est chargé plus il attire les molécules d'eau; et à charge égale, plus un ion a un rayon ionique important, moins il attire de molécules d'eau. Pour un ion de grande taille de charge négative comme le chlore, cette charge est répartie sur toute la surface de l'ion (1/S=1/¼ R2) est est donc plus faible que pour un ion de petite taille comme de sodium. Ainsi l'ion chlorure est solvaté par environ 3 molécules d'eau pour un rayon de solvatation inférieur au rayon de l'ion dans un solide ionique (NaCl) alors que l'ion sodium est solvaté par environ 5 molécules d'eau et son rayon ionique est presque deux fois plus faible que lorsqu'il est solvaté. Un autre exemple est le lithium (ion Li+) qui est solvaté par environ 6 molécules d'eau ce qui fait passer son rayon ionique de 0,060 nm à 0,236 nm (soit près de 4 fois plus) lorsqu'il est solvaté. L'ion potassium (K+), volumineux, et ne portant qu'une seule charge positive, n'est solvaté que par 4 molécules d'eau en moyenne, et passe d'un rayon ionique de 0,133 nm à 0,121 nm lorsqu'il est hydraté. Dans un champ électrique, EN SOLUTION, les ions les plus petits et les plus solvatés migrent le plus lentement.
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- L'eau cellulaire est très
hétérogène:
* elle est polarisée (anisotrope),
* elle présente des variations importantes dans son
architecture, son degré de coopérativité et sa
densité,
* elle possède un pouvoir solvant réduit,
* elle possède une activité osmotique
réduite.
- L'eau cellulaire n'est pas immobile mais
percole la cellule.
Toutes les liaisons évoquées ci-dessus sont des
liaisons dynamiques dont le turn-over est rapide. Une molécule
d'eau engagée dans une liaison électrostatique avec un
domaine ionisé d'une molécule reste moins longtemps
dans cet état que dans l'eau bulk qu'elle rejoint au bout de
quelque temps. L'eau interfaciale peut aussi se déplacer avec
les structures cellulaires qu'elle enrobe, et ce, avec des vitesses
bien supérieures à celle de la diffusion dans une eau
bulk. On peut considérer que les molécules de toute
petite taille sont capables de percoler avec l'eau interfaciale. La
plupart des macromolécules, qui sont d'ailleurs souvent
associées en complexes moléculaires, sont
transportées.
Il n'en reste pas moins que ce que l'on nomme l'autodiffusion de
l'eau dans la cellule reste un phénomène à
explorer ( ce qui a déjà été
commencé mais sort du cadre de cette synthèse partielle
- voir Mentré,2002, p 103-104 et
références) à la lumière de cette
nouvelle vision de la cellule vivante.
Le transport de l'eau par les vésicules de pinocytose reste
aussi un mode de transport rapide et efficace.
- les transports de molécules,
d'ions, de signaux se font d'autant plus rapidement qu'ils sont
associés à des structures de transport de grande
taille;
par exemple au sein d'un axone on estime la vitesse de diffusion de
protéines isolées (de diamètre de l'ordre de
quelques nm) inférieure à 0,01 µm.s-1,
alors que avec des protéines transporteuses (de
diamètre de l'ordre d'une dizaine de nm) on atteint des
vitesses de l'ordre de 0,05 µm.s-1 et enfin, avec des
vésicules (de l'ordre de 100 µm de diamètre) on
atteint des vitesses de l'ordre de 0,5 µm.s-1. Pour
chaque ordre de grandeur de taille on gagne un ordre de grandeur en
vitesse (in Mentré, 2002, p 91).
- les réactions chimiques du
métabolisme se font dans des structures complexes, sans
eau libre, ce qui explique des rendements proches de
100%;
la faiblesse des rendements en solution aqueuse peut être due
au peu d'accessibilité des substrats; l'excellent rendement
pour des enzymes associées en complexe est dû à
la diminution du temps de transit d'une enzyme à l'autre; on
désigne ce mécanisme d'association par le terme de
canalisation (chanelling) ou d'une façon plus
générale de compartimentation métabolique
qui exprime l'idée d'association des enzymes impliquées
dans une même chaîne métabolique .
La compartimentation métabolique est donc une notion qu'il
faut étendre à la totalité de la cellule,
en relativisant la notion de membrane et des canaux ou transporteurs
qui lui étaient associés. Un compartiment
métabolique peut très bien se répartir à
la fois dans un organite, le long d'une membrane et à
l'extérieur de celle-ci.
L'eau structurée pourrait servir de réseau de
coordination des signaux intracellulaires au sein de laquelle les
transports seraient nettement plus rapide que dans une eau libre; des
résultats assez convaincants ont déjà
été obtenus avec des mouvements de protons qui
transmettent des signaux extérieurs en signaux
intracellulaires.
- les concentrations in vivo sont trop
faibles pour obéir aux lois de la chimie des solutions:
la notion de gradient de concentration perd tout sens dans une
cellule:
on estime qu'une bactérie comme Echerichia coli
ne contient qu'une centaine de protons qui sont
éloignés les uns des autres de plusieurs centaines de
nm et donc ne peuvent être responsables d'un gradient de
concentration. De même pour les ions calcium que l'on estime
à une concentration cellulaire de 10-3M dont
10-8M à 10-6 libres (non complexé
par des macromolécules comme la calmoduline...) mais
solvaté (entouré par des molécules d'eau).
Dans une bactérie comme Escherichia coli que l'on peut estimer parallélipipédique (de volume V=2.1.1 µm3 = 2.10-15 L), une concentration de 10-6M correspond à un nombre de molécules de calcium n = N (nombre d'Avogadro). 10-6. V soit n = 6.1023.10-6.2.10-15 molécules = 1200 molécules. De la même façon, une concentration de 10-8M correspond à un nombre de molécules de calcium n = N (nombre d'Avogadro)x 10-8. V molécules soit n = 6.1023.10-6.2.10-15 molécules = 12 molécules. En supposant chaque molécule au centre d'un cube de côté "a", la distance entre deux molécules est très approximativement égale à "a" soit RACINE CUBIQUE [(V/n)]. On trouve 0,1 µm pour la concentration de 10-6M et 0,6 µm pour la concentration de 10-8M. Pour une cellule supposée sphérique, on a les mêmes ordres de grandeur. |
- les propriétés physiques du
cytoplasme, sont hétérogènes et
très variables selon les types cellulaires, ce qui peut
notamment être expliqué par les différentes
formes de l'eau au sein de ce cytoplasme:
le hyaloplasme ne formerait pas une entité homogène au
comportement physique identique sauf dans quelques cellules
très spécialisées comme les hématies dont
la compartimentation est réduite à un quasi-unique
compartiment, monofonctionnel. L'immense vacuole des cellules
végétales peut aussi constituer un bon exemple de
compartiment d'une telle homogénéité. La
pression osmotique par exemple est un facteur que l'on ne peut
probablement étendre à l'ensemble du compartiment
cellulaire que dans ces cas exceptionnels. Il est bien plus probable
que la quasi-totalité des cellules présentent
plutôt une organisation en microdomaines où la
pression osmotique est un facteur qui dépend des conditions
locales principalement.
Une des théories les plus séduisantes sur
l'organisation de l'eau cellulaire est la théorie de
Watterson (1982,1991); la tension existant dans un volume d'eau
est reliée par l'auteur aux mouvements vibratoires des
molécules qui seraient dus aux phénomènes de
coopérativité (résonance) observés entre
les molécules d'eau reliées par des liaisons
hydrogène. Il a ainsi mesuré que le cytoplasme serait
organisé en domaines (clusters) d'environ 40
nm3 dont le diamètre correspond à la
longueur d'onde vibrationnelle, voisine de 3,4 nm, les nuds
étant situés aux points où la tension est la
plus faible. Chaque cluster contiendrait environ 1300 à 1400
molécules d'eau (pour un poids moléculaire de 24kDa).
Un point essentiel d'application de cette théorie est que la
plupart des protéines intracellulaires ont des
dimensions qui correspondent précisément à un
cluster: 40 nm3 pour un nombre de résidus compris
entre 120 et 300 et un diamètre moyen de 3,5 nm. Ces clusters
ne seraient pas des structures rigides mais dynamiques, très
sensibles aux éléments introduits; les protéines
polymériques par exemple, d'une taille supérieure
à un cluster, modifiant la résonance de l'ensemble.
Watterson propose de relier la stabilité de la matrice
hyaloplasmique à l'harmonie vibratoire des domaines d'eau et
de macromolécules entourées d'eau. La cohérence
résultant alors non pas de forces de liaison mais de
mouvements vibratoires résonnants, sensibles aux perturbations
(et permettant ainsi de transférer extrêmement
rapidement un signal (modification de la longueur d'onde...) d'un
point à un autre) mais résistants grâce à
leur souplesse.
- l'eau n'est donc plus seulement
constitutive du vivant (matière vivante, milieu de vie)
mais ses rôles se découvrent aussi
énergétiques (mécaniques, chimiques...)
et relationnels.
On n'a encore que quelques rares éclairages sur ces nouveaux
rôles de l'eau qui n'est plus essentiellement un solvant mais
une interface (détails in Mentré, 2002, p
94-101). C'est un renversement complet de la compréhension de
l'eau qui tient désormais un rôle actif:
Cette conductivité est actuellement une piste majeure de recherche en biochimie, notamment dans l'activité enzymatique (les molécules d'eau de la surface des enzymes, réunies en chaînes conductrices de protons à partir d'un certain seuil d'hydratation, seraient responsables, même sans aucune déformation de la molécule enzymatique, des changements d'activité) ou dans le couplage entre pompes et canaux (le transfert de protons associé au fonctionnement d'enzymes hydrolysant l'ATP pourraient être à l'origine non pas d'un gradient d'H+ mais de courants protoniques microlocalisés qui donneraient un autre sens à la théorie dite chimioosmotique...) ou encore dans le transfert de signaux ioniques (la transduction du signal calcium souvent présentée comme le résultat d'une cascade de réactions de phosphorylations-déphosphorylations le long d'une chaîne de kinases et de phosphatases, pourrait aussi résulter de l'enchaînement de proche en proche d'oscillations de molécules chélatrices entre un état où le calcium est masqué et un état où le calcium est libéré: la propagation du signal se faisant alors sans déplacement de calcium; des courants protoniques entre chaînes de molécules d'eau interfaciales le long d'une chaîne de macromolécules, pourraient aussi intervenir; on connaît ainsi une "onde" protonique qui semble suivre l'onde calcium en décrivant des cercles concentriques autour du point de contact du spermatozoïde avec l'ovocyte d'amphibien lors de la fécondation).
et / ou charge électrique décroissante <<<<<<<<<<<< diamètre décroissant à l'état hydraté <<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<< |
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ions cosmotropes ions chaotropes
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Les ions chaotropes, à la différence des ions cosmotropes circulent facilement dans les couches d'eau qu'ils déstructurent. C'est une raison avancée pour expliquer que le potassium, contrairement au sodium n'est pas exclu de la cellule. Certains auteurs estiment que la plus forte concentration en potassium du hyaloplasme par rapport au sodium est une conséquence directe du pouvoir solvant sélectif de l'eau interfaciale et non le résultat d'une activité membranaire. On a même montré expérimentalement que des cellules, dont les membranes ont été perméabilisées par des détergents, et placées dans des milieux riches en sodium, calcium et magnésium, ne s'enrichissaient pas notablement en ces ions (alors que leur concentration ionique est faible pour ces ions). Par contre, ces cellules à membrane perméabilisée, placées dans un milieu riche en potassium (mais moins riche que la cellule), perdent rapidement leur potassium.
- paradoxalement, l'eau de la cellule
vivante surpeuplée de macromolécules devient
rare, utilisée de façon compétitive
par les macromolécules, son accessibilité
contrôlant les activités des
biomolécules.
Un excès d'eau impliquerait un désordre par manque de
structuration. Un (léger) déficit d'eau entretient la
possibilité d'un contrôle par facteur limitant. Pour
étudier cette hypothèse P. Mentré et G. Hui Bon
Hoa ont étudié des biomolécules sous haute
pression hydrostatique (HPH), facteur connu pour favoriser une forte
hydratation de ces molécules et donc une configuration qui
maximise l'eau interfaciale, plus dense (d'après la loi de Le
Chatelier). Les résultats obtenus sur des cellules eucaryotes
- qui semblent pouvoir supporter sans problème des pressions
atteignant 1000 à 1200 bars (soit 100 à 120 MPa)
pendant une dizaine de minutes - sont époustouflants :
cytosquelette, complexes antigène-anticorps, ADN-facteurs,
etc., se dissocient sous des HP de quelques dizaines de MPa et cet
effet est réversible. Le contrôle des assemblages
biomoléculaires par l'eau est en voie d'exploration.
Ces éléments sont inspirés du chapitre 12 (L'eau, une interface hétérogène et dynamique des macromolécules) du livre de P. Mentré (L'eau dans la cellule, Pascale Mentré, 1995, Masson) mais la formulation et le développement des idées déforment peut-être la pensée de cet auteur auquel je renvoie.
La vision de la cellule vivante, abordée à partir de la question de l'eau, telle qu'elle est présentée ci-dessus, peut déboucher sur une autre compréhension du métabolisme cellulaire que l'on pourrait qualifier de finaliste - au sens de téléologique (voir au sujet de ces termes la discussion dans le cours de terminale) - par opposition à la vision statistique de la biochimie classique.
Vu de très loin, avec une résolution
inférieure à la distance entre les
éléments d'un système
macromoléculaire (que l'on pourrait
chiffrer à quelques dizaines ou centaines de
nanomètres) le cytosol est homogène
chimiquement. |
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chaîne métabolique statistique |
chaîne métabolique finaliste |
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* termes empruntés à P. Mentré: Organization and properties of water in cell system, in Integrated Plant Systems, H. Greppin et al., eds., 2000, University of Geneva, pp 3-22 |
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substrat ----> |
système métabolique
statistiquement homogène
compris comme |
---> produit |
substrat -----> |
système métabolique
hétérogène
composé de: |
---> produit |
Un système contenant un très grand nombre de molécules (le nombre d'exemplaires de chacune des trois espèces moléculaires est bien inférieur sur ce schéma simpliste à ce qu'il devrait être pour que le modèle statistique soit valide étant donné qu'il nécessite la diffusion aléatoire des molécules entre les éléments du système). Les molécules appartiennent à 3 espèces chimiques (1,2 et 3 (en bleu)) en solution (homogène). Un substrat S donne par réaction métabolique un produit P. Deux chemins sont représentés qui passe successivement par les 3 espèces moléculaires: le chemin le plus court (en pointillés) et un des chemins les plus longs. |
Trois espèces chimiques (1, 2 et 3 (en bleu)) groupées en un système hétérogène à 4+4+8 éléments. Le substrat S est métabolisé en un produit P. Remarque: |
La finalité peut rebuter quelques-uns des lecteurs qui peuvent par exemple préférer parler tout simplement de fonction. Le terme de fonction a probablement une origine biologique et sociologique (cette idée n'a été soutenue que tardivement par René Thom; voir Analyse sémantique d'un mot polysémique: la fonction, 1993, Séminaires de la Société de Biologie Théorique, année 1992-1993, Acta Biotheoretica, 42 ), puis qui a été formalisée en mathématique (dans le plan, la fonction (numérique) d'une variable (x) est représentée par un graphe y=f (x); en mathématique la représentation d'une relation de quantité (avec des variables numériques) ou de qualité entre deux ensembles d'objets est défini par le terme moderne d'application (Fréchet, 1909)) , et enfin est retournée dans le domaine social et dans celui de la biologie. Voir aussi l'extrait de Paraboles et catastrophes de René Thom dans le cours de 1èreS. Mais pour un système vivant on ne peut pas parler de fonction, au sens strictement biologique, au niveau local (fonction alcool ou déshydrogénase...). Il est préférable de garder le terme de fonction pour des phénomènes physiologiques globaux comme l'homéostasie par exemple (voir cours de 1èresS).
En août 2005, à l'aide du travail de René Thom, il m'apparaît clairement que la différence fondamentale entre ces deux modèles repose sur le contraste entre un ensemble discret de molécules (dont on cherche à comprendre les interactions par le biais d'une analyse statistique) et une fonction biologique continue (qui ne peut donc être issue des éléments discrets et dont l'origine doit se trouver ailleurs). Pour des détails voir une page en travaux sur le continu en SVT.
à suivre...