La diversité du vivant


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Qu'est-ce que la vie ? - Les mécanismes du vivant - L'évolution du vivant - Classer les êtres vivants - Nommer-Dénombrer-Recenser les êtres vivants

1. Qu'est-ce que la vie ?

La vie est le propre d'une unité qui réalise un travail. La vie est un travail.

On distingue classiquement trois grands types de travail (qu'on appelle aussi fonctions mais je préfère la notion de travail qui est plus riche): le travail de nutrition, le travail de reproduction et le travail de relation: en voici une version légèrement modifiée, mais il est évident pour moi que ce n'est pas du tout la seule valable et qu'elle est totalement perfectible:
Le travail de nutrition: correspond non seulement à la prise de matière nécessaire au renouvellement des structures mais aussi à la dépense énergétique que fait tout être vivant pour se maintenir en vie (on pourrait parler de travail d'autonomie qui regrouperait alors l'auto l'édification, la nutrition, l'excrétion, et l'entretien des structures). La vie coûte de l'énergie et de la matière. Cette énergie et cette matière sont prélevées dans le milieu. Du point de vue énergétique, on distingue deux grands types trophiques ("trophos"= "nourrir" en grec): les phototrophes qui utilisent l'énergie lumineuse (du soleil) pour réaliser leurs synthèses et les chimiotrophes qui utilisent l'énergie chimique de leurs aliments. Ces aliments sont soit des minéraux (chimiolithotrophie), soit des substances organiques (chimioorganotrophie). Du point de vue de la matière consommée par un organisme, on parle d'autotrophe si l'organisme est la capable de synthétiser sa propre matière organique à partir de matière minérale (végétaux chlorophylliens et bactéries photosynthétiques par exemple) et d'hétérotrophe s'il utilise les substances organiques du milieu pour synthétiser ses propres substances organiques (les animaux ou l'homme par exemple).
Le travail de reproduction correspond à la capacité des organismes vivants de se multiplier. La vie est extrêmement résistante, elle colonise tous les milieux (l'homme, par son exploration spatiale, est en train de coloniser le cosmos). On découvre de nos jours de nouvelles formes bactériennes dans les inclusions fluides des roches à plusieurs kilomètres de profondeur. On sait que la vie peut résister à des températures de plus de 150 C dans des sources hydrothermales. La vie peut aussi par des formes de résistance comme des graines rester plusieurs centaines d'années en léthargie (graines d'herbiers du XVème siècle). On distingue classiquement deux grands groupes de reproduction. D'abord la reproduction solitaire ou asexuée existe chez les bactéries et les unicellulaires sous la forme d'une division binaire (une cellule mère donne deux cellules filles) mais aussi chez les pluricellulaires par la libération de petits groupes de cellules (propagules par exemple chez les végétaux ou bourgeons chez une hydre) ou même de cellules isolées (spores par exemple) qui reprennent le développement de l'organisme à zéro pour donner naissance à un nouvel individu complet. Chez les procaryotes on parle de scissiparité alors que la division binaire des cellules eucaryotes est appelée mitose. Chez les organismes pluricellulaires la division de nombreuses cellules de l'organisme assure la formation de l'organisme adulte au cours du développement et le maintien de celui-ci en vie par renouvellement cellulaire (renouvellement des cellules mortes chez les organismes à longue durée de vie). Ensuite la reproduction en commun ou sexuée fait intervenir une jonction des deux organismes avec des échanges plus ou moins bien connus selon les espèces: cette reproduction sexuée est connue chez les bactéries (conjugaison), les unicellulaires et les pluricellulaires. Chez les organismes possédant des cellules à noyau (eucaryotes), la reproduction sexuée est réalisée par une méiose qui est une série de deux divisions cellulaires suivie d'une fécondation qui est une fusion cellulaire.
Le travail de relation ou travail de communication comprend tous les mécanismes qui résultent des interactions (échanges, contraintes...) entre un organisme et le milieu dans lequel il vit (ou les causent ). Pour les pluricellulaires il comprend tous les mécanismes de communication et de coordination entre cellules réalisant chacune une travail donné qui participe au travail de l'organisme. Ce travail a une dimension sociale. C'est en quelque sorte l'aspect social du vivant. Tout être vivant fait partie d'un milieu de vie (écosystème) et interagit avec celui-ci. De même, chez une pluricellulaire, le développement de l'organisme au cours du développement embryonnaire puis le fonctionnement coordonné de l'adulte nécessitent une sociabilité entre cellules qui est le travail de relation.

Remarques: La profonde analogie que l'on retrouve entre le travail humain et la vie me semble être quelque chose d'essentiel. La formulation qui est proposée ici est unificatrice, elle est éclairante, mais elle n'est bien sûr pas parfaite ni définitive, ni la seule qui soit acceptable. En deux mots, elle me semble vraie et pédagogique. Je voudrais la développer en quelques lignes avec un vocabulaire nettement moins scientifique.
La vie est travail. Le vivant est au travail. La vie de l'homme est orientée vers le travail. C'est au sein de son travail qu'il s'épanouit, qu'il participe à la vie sociale, qu'il "gagne" sa vie. L'être vivant vit lui aussi aux dépens de son milieu (il y puise l'énergie et la matière nécessaires à sa vie). L'être vivant s'épanouit dans son milieu, il s'y reproduit. La vie est ordonnée à la vie. La vie foisonne, se multiplie, elle se propage. L'adaptation de l'individu à son milieu est la profonde adéquation entre les êtres vivants et leur environnement. Les interdépendances entre tous les éléments d'un écosystème peuvent se décrire en termes de vie sociale. La vie est sociale. Les êtres vivants ne sont pas individualistes. Ils font partie de l'écosystème. La vie est altruiste. La vie se donne.

 

2. Les mécanismes du vivant: la vie au travail

Les mécanismes du vivant peuvent être expliqués en terme d'information et de matière. La composition chimique (dynamique car celle-ci change dans le temps) de chaque être vivant est sous la dépendance d'une certaine information. Où se trouve cette information ? On peut considérer qu'il y a trois grands types d'information qui concourent au maintien de la cellule en vie, c'est-à-dire au travail de le vie:

Il est entendu que le terme d'information n'est certainement pas indifférent et que l'on ne peut s'empêcher, lorsque l'on parle d'information, de penser à quelque chose de matériel qui serait le support de cette information (à la manière de l'information électronique, magnétique, électromagnétique ou optique des innombrables images qui circulent à la surface de notre planète). Il existe plusieurs théories de l'information sur le vivant; celle de Rosine Chandebois dans son livre "Pour en finir avec le darwinisme: une nouvelle logique du vivant"(voir Bibliographie) est cohérente et fort intéressante mais ce n'est pas la seule. La théorie encore soutenue officiellement de nos jours et qui propose que la totalité de l'information concernant un être vivant se trouve dans l'ADN s'est révélée être une impasse et doit être abandonnée. Le but de ce cours n'est pas de proposer une théorie de l'information.

3. L'évolution du vivant: le travail de la vie

Le titre est un peu tiré par les cheveux mais qu'est-ce que l'évolution si ce n'est le déroulement de la vie dans le temps et donc le résultat du travail du vivant. Il n'y a aucune raison d'imaginer que les mécanismes de l'évolution sont différents des mécanismes du vivant actuel. Je ne veux pas discuter ici de telle ou telle théorie mais juste poser des jalons, sachant que, dans le domaine d'une science historique et non plus expérimentale, on peut toujours raconter une histoire mais il est difficile de prétendre posséder l'histoire. Quelques questions:

02/2003: un essai de formulation
L'évolution est à la fois stabilité et variation de la forme, des structures et des fonctions.
C'est un travail commencé il y a peut-être des milliards d'années et qui se répète dans chaque cellule. La plupart du temps le travail est identique à lui-même: chaque cellule donne naissance à une nouvelle cellule, qui reproduit les mêmes propriétés que la cellule mère.
C'est la théorie cellulaire (voir par exemple le cours de seconde, §1.3), qui englobe une théorie de la stabilité de la forme que l'on peut appeler automatisme (toute cellule est issue d'une autre cellule). Le problème de l'origine de la vie est un problème à part (voir par exemple, l'ancien cours de terminale S).
Si l'on veut ensuite faire évoluer les organismes il faut un mécanisme capable d'engendrer la variation et de la mémoriser.
Il existe au moins deux modèles qui rendent compte de cette stabilité et de cette variation.
* Le modèle le plus classique, depuis le milieu du XXème siècle et jusqu'à maintenant, était celui d'un programme génétique, stable, qui transmettait fidèlement à la descendance les caractères de l'espèce, doublé d'une variation génotypique, dont le mécanisme reposait sur l'accumulation de mutations dans l'ADN. Ce modèle, qualifié de néodarwinien est peu satisfaisant.
* Depuis une dizaine d'années il existe un autre modèle présenté par une embryologiste, R. Chandebois, qui remplace le programme génétique (pour lequel aucune expérience n'a jamais pu mettre en évidence le début d'une preuve) par un fonds cytoplasmique de l'espèce (retrouvé intact pour chaque individu dans l'ovocyte), suivi pour les pluricellulaires de l'automatisme embryonnaire (progression autonome et réajustements; phénomènes réellement observables et dont la validité peut être testée expérimentalement en embryologie) qu'elle prolonge par l'automatisme de l'évolution (évolution directionnelle, qui est par contre du domaine théorique et qui fournit un cadre pour l'interprétation des données paléontologiques). La variation repose aussi sur des mutations (variation génotypique, responsable de l'évolution adventive) mais surtout sur la modification du fonds cytoplasmique de l'espèce, dans la lignée ovulaire (responsable de l'évolution directionnelle).


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4. Classer les êtres vivants

Les critères de classification sont très nombreux mais n'ont pas tous la même valeur. Tous les classements ne sont pas égaux. Certains sont plus éclairants que d'autres. Il est mal vu de nos jours de parler d'ordre et pourtant mettre en ordre est quelque chose de très naturel.
La question est donc de savoir si c'est l'homme qui classe par sa raison, les êtres vivants n'étant pas ordonnés par eux-mêmes, ou si c'est l'homme qui découvre l'ordre à partir de sa raison. Étant donné l'attitude de modestie face au réel adoptée jusqu'ici, il me semble prudent de dire que c'est à l'homme de découvrir l'ordre des êtres vivants. Il est alors faux de dire qu'imaginer un ordre dans la vie est une émanation de la pensée humaine. Le réel est ordonné, la vie est ordonnée. Elle s'oppose au désordre, elle se maintient dans l'être. Ce qui est folie de la raison (et orgueil) est au contraire d'imaginer que les choses ne sont que parce que l'homme les voit ou les classe. Le biologiste ne peut pas être nominaliste. Il est chaque jour confronté au réel qui s'impose à lui. On en revient toujours à cette attitude de modestie face au réel.

Une classification naturelle doit pouvoir accepter tous les êtres vivants et que de la place soit prévue pour accepter les nouveautés que l'on ne manquera pas de découvrir. Comment ne pas penser à la classification périodique des éléments ? Des éléments prédits grâce à la table de Mendeleiev ont été ensuite découverts, avec des propriétés qui elles aussi étaient en concordance avec celles de la colonne ou de la ligne auxquelles ils appartenaient. Cette présentation était clairement explicative dans le sens où elle reflétait un ordre existant. Qui, oserait prétendre que les éléments chimiques ne sont pas organisés selon des lois que l'homme découvre par son intelligence. Et pourtant, cette affirmation est souvent remise en cause pour des organismes vivants, autrement plus complexes et merveilleux d'intelligence, que des atomes. Tout cela parce qu'une philosophie matérialiste, souvent cachée, nous habitue depuis que nous sommes tout jeunes à voir surgir le plus du moins et à accepter comme causalité ontologique la simple filiation héréditaire.

Combien existe-t-il de façons principales de classer des objets naturels (physiques au sens de corporels c'est-à-dire composés de matière) ? La réponse me semble être que l'on peut réduire à deux les façons de classer des objets naturels:
- les classifications artificielles -on pourrait dire externes- cherchent à élaborer un outil pratique qui puisse servir à reconnaître un élément précis qui serait sinon perdu parmi une foule d'autres; c'est par exemple la classification dichotomique inventée en botanique par Lamarck (la Flore françoise de 1778) qui a connu un succès qui ne s'est jamais démenti et dont le principe a été repris dans d'innombrables flores; le but étant ici de reconnaître une plante parmi des milliers et non de définir ses affinités... De telles classifications dichotomiques ne sont pas l'usage pour les animaux car, à mon avis, la diversité des caractères employés et leur faible accessibilité, rendent la méthode impossible à utiliser pour un amateur. La classification phénétique, qui utilise le maximum de caractères, sans chercher à les hiérarchiser; est aussi de type artificiel. Enfin, contrairement à ce qu'affirment parfois ses actuels utilisateurs et promoteurs, je pense que ce principe reste aussi le fondement de la classification cladiste du vivant, qui relativise chaque caractère utilisé dans la classification pour n'en fait qu'un outil classificatoire (méthode de polarisation, voir cours sur l'histoire de la vie et de la terre), atténuant ainsi la relation au réel. Relation toujours imparfaitement connue mais affirmée comme vraie lorsque l'on suppose un ordre vrai et absolu du monde vivant, comme le fait celui qui recherche un ordre naturel.
- les classifications naturelles, on pourrait dire internes, qui cherchent à rendre compte d'un ordre préexistant dans la nature; c'est la classification zoologique des Invertébrés de Lamarck ou encore la classification phylogénétique qui tient compte des caractères embryologiques et anatomiques et qui est souvent qualifiée de façon méprisante de classification "traditionnelle" par les cladistes mais qui reste, heureusement - mais pas forcément pour longtemps si l'on y prend pas garde - encore enseignée. Il serait cependant urgent de présenter une nouvelle classification naturelle qui puisse donner une impulsion à l'embryologie, à l'anatomie comparée, à la physiologie comparée... ce dont est bien incapable la cladistique qui sépare sans unir. La référence à un ordre réel, absolu, connaissable mais inaccessible dans sa totalité, n'empêche pas bien sûr la diversité des classifications selon les points de vue auxquels on se place.

L'exemple ci-dessous est une classification simplifiée, classique mais modernisée, qui fait apparaître une graduation dans la complexité du travail réalisé par les organismes; l'idée maîtresse est la division du travail (un message personnel à un ami: si jamais Thierry HARDY lit ces lignes qu'il me contacte... je l'attend de pied ferme pour continuer nos discussions à ce sujet); les têtes de division sont une formulation grand public des principales caractéristiques de chaque royaume*.

Remarque:
* J'ai appris récemment (voir http://www.necker.fr/sfbt/baillaud.html) que le terme de règne était une mauvaise traduction de regnum qui signifiait royaume. En effet, Linné distinguant classiquement dans le regna tria naturae, les trois regnum animale, regnum vegetabile et regnum lapideum (les trois royaumes: des animaux, des végétaux et des pierres). Le terme latin regnum a perdu progressivement sa signification de royaume et a été malheureusement traduit par règne; il est incontestablement plus clair de parler de royaumes (kingdom en anglais et Reich en allemand), ce qui autorise des changements de souveraineté dont on laissera prudemment le privilège aux spécialistes.

Simultanément avec la recherche et la mise en forme des critères unificateurs qui ordonnent l'ensemble des êtres vivants, l'homme cherche à classer et à nommer chaque être vivant. Le nom permet de faire référence à la classification. Par la mémoire des noms la connaissance du monde vivant progresse. On continue sans cesse à l'heure actuelle de nommer de nouvelles espèces. Dénombrer les espèces demande donc que l'on se penche auparavant sur la notion d'espèce.


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5. Nommer, dénombrer et recenser les êtres vivants

A suivre