La diversité du vivant
retour cours seconde, retour
fiche simplifiée seconde
Qu'est-ce que la vie ? - Les
mécanismes du vivant - L'évolution
du vivant - Classer les êtres
vivants - Nommer-Dénombrer-Recenser les
êtres vivants
1. Qu'est-ce que la vie
?
La vie est le propre d'une unité qui
réalise un travail.
La vie est un
travail.
On distingue classiquement trois grands types de travail (qu'on
appelle aussi fonctions mais je préfère la notion de
travail qui est plus riche): le travail de nutrition, le travail de
reproduction et le travail de relation: en voici une version
légèrement modifiée, mais il est évident
pour moi que ce n'est pas du tout la seule valable et qu'elle est
totalement perfectible:
Le travail de nutrition: correspond non seulement
à la prise de matière nécessaire au
renouvellement des structures mais aussi à la dépense
énergétique que fait tout être vivant pour se
maintenir en vie (on pourrait parler de travail d'autonomie
qui regrouperait alors l'auto l'édification, la nutrition,
l'excrétion, et l'entretien des structures). La vie
coûte de l'énergie et de la matière. Cette
énergie et cette matière sont prélevées
dans le milieu. Du point de vue énergétique, on
distingue deux grands types trophiques ("trophos"= "nourrir" en
grec): les phototrophes qui utilisent l'énergie
lumineuse (du soleil) pour réaliser leurs synthèses et
les chimiotrophes qui utilisent l'énergie chimique de
leurs aliments. Ces aliments sont soit des minéraux
(chimiolithotrophie), soit des substances organiques
(chimioorganotrophie). Du point de vue de la matière
consommée par un organisme, on parle d'autotrophe si
l'organisme est la capable de synthétiser sa propre
matière organique à partir de matière
minérale (végétaux chlorophylliens et
bactéries photosynthétiques par exemple) et
d'hétérotrophe s'il utilise les substances
organiques du milieu pour synthétiser ses propres substances
organiques (les animaux ou l'homme par exemple).
Le travail de reproduction correspond à la
capacité des organismes vivants de se multiplier. La vie est
extrêmement résistante, elle colonise tous les milieux
(l'homme, par son exploration spatiale, est en train de coloniser le
cosmos). On découvre de nos jours de nouvelles formes
bactériennes dans les inclusions fluides des roches à
plusieurs kilomètres de profondeur. On sait que la vie peut
résister à des températures de plus de 150 C
dans des sources hydrothermales. La vie peut aussi par des formes de
résistance comme des graines rester plusieurs centaines
d'années en léthargie (graines d'herbiers du
XVème siècle). On distingue classiquement deux grands
groupes de reproduction. D'abord la reproduction solitaire ou
asexuée existe chez les bactéries et les
unicellulaires sous la forme d'une division binaire (une cellule
mère donne deux cellules filles) mais aussi chez les
pluricellulaires par la libération de petits groupes de
cellules (propagules par exemple chez les végétaux ou
bourgeons chez une hydre) ou même de cellules isolées
(spores par exemple) qui reprennent le développement de
l'organisme à zéro pour donner naissance à un
nouvel individu complet. Chez les procaryotes on parle de
scissiparité alors que la division binaire des cellules
eucaryotes est appelée mitose. Chez les organismes
pluricellulaires la division de nombreuses cellules de l'organisme
assure la formation de l'organisme adulte au cours du
développement et le maintien de celui-ci en vie par
renouvellement cellulaire (renouvellement des cellules mortes chez
les organismes à longue durée de vie). Ensuite la
reproduction en commun ou sexuée fait intervenir une
jonction des deux organismes avec des échanges plus ou moins
bien connus selon les espèces: cette reproduction
sexuée est connue chez les bactéries (conjugaison), les
unicellulaires et les pluricellulaires. Chez les organismes
possédant des cellules à noyau (eucaryotes), la
reproduction sexuée est réalisée par une
méiose qui est une série de deux divisions cellulaires
suivie d'une fécondation qui est une fusion cellulaire.
Le travail de relation ou travail de communication
comprend tous les mécanismes qui résultent des
interactions (échanges, contraintes...) entre un organisme et
le milieu dans lequel il vit (ou les causent ). Pour les
pluricellulaires il comprend tous les mécanismes de
communication et de coordination entre cellules réalisant
chacune une travail donné qui participe au travail de
l'organisme. Ce travail a une dimension sociale. C'est en quelque
sorte l'aspect social du vivant. Tout être vivant fait partie
d'un milieu de vie (écosystème) et interagit avec
celui-ci. De même, chez une pluricellulaire, le
développement de l'organisme au cours du développement
embryonnaire puis le fonctionnement coordonné de l'adulte
nécessitent une sociabilité entre cellules qui est le
travail de relation.
Remarques: La profonde analogie que l'on retrouve entre le
travail humain et la vie me semble être quelque chose
d'essentiel. La formulation qui est proposée ici est
unificatrice, elle est éclairante, mais elle n'est bien
sûr pas parfaite ni définitive, ni la seule qui soit
acceptable. En deux mots, elle me semble vraie et
pédagogique. Je voudrais la développer en
quelques lignes avec un vocabulaire nettement moins scientifique.
La vie est travail. Le vivant est au travail. La vie de l'homme est
orientée vers le travail. C'est au sein de son travail qu'il
s'épanouit, qu'il participe à la vie sociale, qu'il
"gagne" sa vie. L'être vivant vit lui aussi aux dépens
de son milieu (il y puise l'énergie et la matière
nécessaires à sa vie). L'être vivant
s'épanouit dans son milieu, il s'y reproduit. La vie est
ordonnée à la vie. La vie foisonne, se multiplie, elle
se propage. L'adaptation de l'individu à son milieu est la
profonde adéquation entre les êtres vivants et leur
environnement. Les interdépendances entre tous les
éléments d'un écosystème peuvent se
décrire en termes de vie sociale. La vie est sociale. Les
êtres vivants ne sont pas individualistes. Ils font partie de
l'écosystème. La vie est altruiste. La vie se
donne.
2. Les
mécanismes du vivant: la vie au
travail
Les mécanismes du vivant peuvent être
expliqués en terme d'information et de matière. La
composition chimique (dynamique car celle-ci change dans le temps) de
chaque être vivant est sous la dépendance d'une certaine
information. Où se trouve cette information ? On peut
considérer qu'il y a trois grands types d'information qui
concourent au maintien de la cellule en vie, c'est-à-dire au
travail de le vie:
- l'information génétique, contenue dans
l'ADN. Chez les procaryotes, elle est assez peu structurée
(habituellement sous la forme d'un chromosome circulaire
décondensé et de petites boucles: les plasmides) et
se trouve dans l'unique compartiment cellulaire où elle est
cependant directement accessible. Chez les eucaryotes, elle est
protégée dans le noyau (et pour partie dans les
chloroplastes et les mitochondries). L'information
génétique est composée de gènes,
sous-unités fonctionnelles de l'ADN qui codent pour une
chaîne polypeptidique ou un produit fonctionnel comme un ARN
non messager (ribozyme par exemple). L'information
génétique est protégée,
manipulée, reproduite (dupliquée), structurée
par de nombreux éléments cytoplasmiques: histones,
enzymes (comme le complexe de l'ADN polymérase...),
ribozymes, ribosomes...
- l'information cytoplasmique dirige l'ensemble du
métabolisme et de l'activité cellulaire
(mouvement...) et renferme la mémoire cellulaire. En effet,
la composition chimique et l'organisation structurale du
cytoplasme sont le reflet de l'histoire individuelle de la
cellule. C'est cette personnalité cellulaire qui est
enregistrée dans le cytoplasme sous forme de
mémoire.
- l'information extracellulaire provient du milieu
extérieur et des cellules voisines. Cette information
représente les interactions sociales des cellules d'un
même feuillet embryonnaire, d'un même tissu, d'un
organisme pluricellulaire entier ou d'un individu avec d'autres
individus au sein d'une population ou encore d'une population au
sein d'un écosystème. Chaque organisme réagit
en permanence à ces informations extérieures: on
peut dire qu'il évolue.
Il est entendu que le terme d'information n'est certainement pas
indifférent et que l'on ne peut s'empêcher, lorsque l'on
parle d'information, de penser à quelque chose de
matériel qui serait le support de cette information (à
la manière de l'information électronique,
magnétique, électromagnétique ou optique des
innombrables images qui circulent à la surface de notre
planète). Il existe plusieurs théories de l'information
sur le vivant; celle de Rosine Chandebois dans son livre "Pour en
finir avec le darwinisme: une nouvelle logique du vivant"(voir
Bibliographie) est cohérente et fort
intéressante mais ce n'est pas la seule. La théorie
encore soutenue officiellement de nos jours et qui propose que la
totalité de l'information concernant un être vivant se
trouve dans l'ADN s'est révélée être une
impasse et doit être abandonnée. Le but de ce cours
n'est pas de proposer une théorie de l'information.
3. L'évolution du
vivant: le travail de la vie
Le titre est un peu tiré par les cheveux mais qu'est-ce que
l'évolution si ce n'est le déroulement de la vie dans
le temps et donc le résultat
du travail du vivant. Il n'y a aucune raison d'imaginer
que les mécanismes de l'évolution sont
différents des mécanismes du vivant actuel. Je ne veux
pas discuter ici de telle ou telle théorie mais juste poser
des jalons, sachant que, dans le domaine d'une science historique et
non plus expérimentale, on peut toujours raconter une histoire
mais il est difficile de prétendre posséder l'histoire.
Quelques questions:
- La vie a-t-elle été un
phénomène constant ? N'a-t-elle pas
présenté des accélérations ou des
ralentissements ?
- L'évolution est-elle terminée ou se
continue-t-elle ?
- Puisque les fossiles présentent des variations
discontinues (on n'arrive pas à retrouver d'espèces
intermédiaires entre tous les groupes étudiés
qui permettraient de passer d'un groupe à l'autre),
l'évolution ne s'est-elle pas aussi faite par paliers
brusques, voir très brusques ?
- Quelle science expérimentale peut, mieux que
l'embryologie, retrouver les mécanismes de
l'évolution, s'ils sont encore à
l'uvre
02/2003: un essai de formulation
L'évolution est à la
fois stabilité et variation de la forme, des structures et des
fonctions.
C'est un travail commencé il y a peut-être des milliards
d'années et qui se répète dans chaque cellule.
La plupart du temps le travail est identique à lui-même:
chaque cellule donne naissance à une nouvelle cellule, qui
reproduit les mêmes propriétés que la cellule
mère.
C'est la théorie cellulaire (voir par exemple
le cours de
seconde, §1.3), qui englobe
une théorie de la stabilité de la forme que l'on
peut appeler automatisme (toute cellule est issue d'une autre
cellule). Le problème de l'origine de la vie
est un problème à part (voir par exemple, l'ancien
cours de terminale
S).
Si l'on veut ensuite faire évoluer les organismes il faut un
mécanisme capable d'engendrer la variation et de la
mémoriser.
Il existe au moins deux modèles qui rendent compte de cette
stabilité et de cette variation.
* Le modèle le plus classique, depuis le milieu du
XXème siècle et jusqu'à maintenant, était
celui d'un programme génétique, stable, qui
transmettait fidèlement à la descendance les
caractères de l'espèce, doublé d'une
variation génotypique, dont le mécanisme
reposait sur l'accumulation de mutations dans l'ADN. Ce
modèle, qualifié de néodarwinien est peu
satisfaisant.
* Depuis une dizaine d'années il existe un autre modèle
présenté par une embryologiste, R. Chandebois, qui
remplace le programme génétique (pour lequel aucune
expérience n'a jamais pu mettre en évidence le
début d'une preuve) par un fonds cytoplasmique de
l'espèce (retrouvé intact pour chaque individu dans
l'ovocyte), suivi pour les pluricellulaires de l'automatisme
embryonnaire (progression autonome et réajustements;
phénomènes réellement observables et dont la
validité peut être testée
expérimentalement en embryologie) qu'elle prolonge par
l'automatisme de l'évolution (évolution
directionnelle, qui est par contre du domaine théorique et
qui fournit un cadre pour l'interprétation des données
paléontologiques). La variation repose aussi sur des
mutations (variation génotypique, responsable de
l'évolution adventive) mais surtout sur la modification du
fonds cytoplasmique de l'espèce, dans la lignée
ovulaire (responsable de l'évolution directionnelle).
retour cours seconde, retour
fiche simplifiée seconde
Qu'est-ce que la vie ? - Les
mécanismes du vivant - L'évolution
du vivant - Classer les êtres
vivants - Nommer-Dénombrer-Recenser les
êtres vivants
4. Classer les êtres
vivants
Les critères de classification sont très nombreux
mais n'ont pas tous la même valeur. Tous les classements ne
sont pas égaux. Certains sont plus éclairants que
d'autres. Il est mal vu de nos jours de parler d'ordre et pourtant
mettre en ordre est quelque chose de très naturel.
La question est donc de savoir si c'est l'homme qui classe par sa
raison, les êtres vivants n'étant pas
ordonnés par eux-mêmes, ou si c'est l'homme qui
découvre l'ordre à partir de sa raison.
Étant donné l'attitude de modestie face au réel
adoptée jusqu'ici, il me semble prudent de dire que
c'est à l'homme de découvrir l'ordre des
êtres vivants. Il est alors faux de dire qu'imaginer un
ordre dans la vie est une émanation de la pensée
humaine. Le réel est ordonné, la vie est
ordonnée. Elle s'oppose au désordre, elle se maintient
dans l'être. Ce qui est folie de la raison (et orgueil) est au
contraire d'imaginer que les choses ne sont que parce que l'homme les
voit ou les classe. Le biologiste ne peut pas être nominaliste.
Il est chaque jour confronté au réel qui s'impose
à lui. On en revient toujours à cette attitude de
modestie face au réel.
Une classification naturelle doit pouvoir accepter tous les
êtres vivants et que de la place soit prévue pour
accepter les nouveautés que l'on ne manquera pas de
découvrir. Comment ne pas penser à la classification
périodique des éléments ? Des
éléments prédits grâce à la table
de Mendeleiev ont été ensuite découverts, avec
des propriétés qui elles aussi étaient en
concordance avec celles de la colonne ou de la ligne auxquelles ils
appartenaient. Cette présentation était clairement
explicative dans le sens où elle reflétait un ordre
existant. Qui, oserait prétendre que les
éléments chimiques ne sont pas organisés selon
des lois que l'homme découvre par son intelligence. Et
pourtant, cette affirmation est souvent remise en cause pour des
organismes vivants, autrement plus complexes et merveilleux
d'intelligence, que des atomes. Tout cela parce qu'une philosophie
matérialiste, souvent cachée, nous habitue depuis que
nous sommes tout jeunes à voir surgir le plus du moins et
à accepter comme causalité ontologique la simple
filiation héréditaire.
Combien existe-t-il de façons principales de classer des
objets naturels (physiques au sens de corporels
c'est-à-dire composés de matière) ? La
réponse me semble être que l'on peut réduire
à deux les façons de classer des objets
naturels:
- les classifications artificielles -on pourrait dire
externes- cherchent à élaborer un outil
pratique qui puisse servir à reconnaître un
élément précis qui serait sinon perdu parmi une
foule d'autres; c'est par exemple la classification dichotomique
inventée en botanique par Lamarck (la Flore
françoise de 1778) qui a connu un succès qui ne
s'est jamais démenti et dont le principe a été
repris dans d'innombrables flores; le but étant ici de
reconnaître une plante parmi des milliers et non de
définir ses affinités... De telles classifications
dichotomiques ne sont pas l'usage pour les animaux car, à mon
avis, la diversité des caractères employés et
leur faible accessibilité, rendent la méthode
impossible à utiliser pour un amateur. La classification
phénétique, qui utilise le maximum de
caractères, sans chercher à les hiérarchiser;
est aussi de type artificiel. Enfin, contrairement à ce
qu'affirment parfois ses actuels utilisateurs et promoteurs, je pense
que ce principe reste aussi le fondement de la classification
cladiste du vivant, qui relativise chaque caractère
utilisé dans la classification pour n'en fait qu'un outil
classificatoire (méthode de polarisation,
voir cours sur
l'histoire de la vie et de la
terre), atténuant ainsi la
relation au réel. Relation toujours imparfaitement connue mais
affirmée comme vraie lorsque l'on suppose un ordre vrai et
absolu du monde vivant, comme le fait celui qui recherche un ordre
naturel.
- les classifications naturelles, on pourrait dire
internes, qui cherchent à rendre compte d'un ordre
préexistant dans la nature; c'est la classification zoologique
des Invertébrés de Lamarck ou encore la classification
phylogénétique qui tient compte des caractères
embryologiques et anatomiques et qui est souvent qualifiée de
façon méprisante de classification "traditionnelle" par
les cladistes mais qui reste, heureusement - mais pas
forcément pour longtemps si l'on y prend pas garde - encore
enseignée. Il serait cependant urgent de présenter une
nouvelle classification naturelle qui puisse donner une impulsion
à l'embryologie, à l'anatomie comparée, à
la physiologie comparée... ce dont est bien incapable la
cladistique qui sépare sans unir. La référence
à un ordre réel, absolu, connaissable mais inaccessible
dans sa totalité, n'empêche pas bien sûr la
diversité des classifications selon les points de vue auxquels
on se place.
L'exemple ci-dessous est une classification simplifiée,
classique mais modernisée, qui fait apparaître une
graduation dans la complexité du travail réalisé
par les organismes; l'idée maîtresse est la division
du travail
(un message personnel
à un ami: si jamais Thierry HARDY lit ces lignes qu'il me
contacte... je l'attend de pied ferme pour continuer nos discussions
à ce sujet); les têtes de division sont une
formulation grand public des principales caractéristiques de
chaque royaume*.
Remarque:
* J'ai appris récemment (voir http://www.necker.fr/sfbt/baillaud.html)
que le terme de règne était une mauvaise
traduction de regnum qui signifiait
royaume. En effet, Linné distinguant
classiquement dans le regna tria naturae, les trois regnum
animale, regnum vegetabile et regnum lapideum (les trois
royaumes: des animaux, des végétaux et des pierres). Le
terme latin regnum a perdu progressivement sa
signification de royaume et a été
malheureusement traduit par règne; il est
incontestablement plus clair de parler de royaumes (kingdom en
anglais et Reich en allemand), ce qui autorise des changements
de souveraineté dont on laissera prudemment le
privilège aux spécialistes.
- un compartiment unique
où se réalisent des travaux multiples; des
populations innombrables de travailleurs aquatiques, cachés
et silencieux
Les procaryotes forment le premier
type (royaume des Procaryotes ou Monères)
d'êtres vivants car les virus, prions et autres
molécules éventuellement encapsulées ne
réalisent aucun travail. Elles sont parasites , elles
détournent le travail d'un hôte à leur profit
ou, la plupart du temps, elles le perturbent tout simplement.
- Du point de vue de la matière et de l'information
(ou plutôt de l'expression de cette information), la
cellule procaryote, rudimentaire, est un modèle
privilégié pour étudier l'information
génétique. Le modèle bactérien,
pour être le plus simple, ne doit pas être
extrapolé aux organismes plus complexes pour lesquels
l'information génétique n'est plus aussi
simplement exprimée par la cellule. Peut-être
pourrait-on considérer que la genèse de la forme
d'une bactérie est due à l'expression de ses
gènes, ou plutôt de certains de ses gènes
par l'intermédiaire d'un cytoplasme rudimentaire. Cette
expression du génome par le cytoplasme peut être
aisément modifiée par des interactions du milieu
avec la cellule bactérienne. Ces modifications
(mutations par exemple) sont alors transmises à une
population (clone). Mais il est aussi possible que les
interactions entre cellules d'un même clone ou entre
bactéries d'espèces différentes soient
aussi essentielles à la survie de ces bactéries
(voir infra).
- Du point de vue fonctionnel, les bactéries
possèdent une compartimentation (division du travail
dans l'espace) rudimentaire: le travail de nutrition est
assuré par l'ensemble de la cellule. La cellule est
perpétuellement en train de se reproduire si les
conditions de milieu le permettent (division temporelle du
travail de reproduction) par scissiparité qui est
le seul mécanisme observé actuellement et qui
fait suite à une duplication de tous les
éléments de la cellule. Enfin le travail de
relation est assez simple: se déplacer (flagelle,
glissement, mouvements amaoeboïdes)..., recevoir ou
émettre des messages chimiques, électriques,
magnétiques... Mais du point de vue social les
bactéries ont un rôle essentiel dans nombre de
mécanismes impliquant des organismes pluricellulaires.
Il suffit de considérer leur rôle dans les
maladies humaines ou dans des processus alimentaires
maîtrisés par l'homme. La forme habituelle de
croissance bactérienne, l'unité de vie, est
plutôt la colonie bactérienne que
l'individu isolé. On rapporte même que des
bactéries seules ne peuvent pas être maintenues en
vie. Elles ne se maintiennent en vie que si elles se
reproduisent. Les biofilms (Les
biofilms, Bill Costerton et Philip Stewart, Pour la
Science, 287, septembre 2001, 48-53), de la plaque
dentaire à la couche humide et visqueuse qui recouvre
les parois des éviers mal lavés, sont une forme
habituelle d'organisation sociale des unicellulaires
procaryotes et eucaryotes. La matrice polysaccharidique de ces
biofilms est sécrétée par les cellules et
forme un réseau qui piège l'eau. On connaît
même des biofilms intracellulaires
(Cocons protecteurs au cur des
cellules, La Recherche, 367, septembre 2003,
15). La spore de résistance est une forme
de survie individuelle dans des conditions de milieu
défavorable et fait plutôt partie du travail de
relation plutôt que de reproduction. Il est à
noter que la conjugaison bactérienne, si elle est
limitée à l'échange de seul ADN ne peut
être vu comme une reproduction mais doit plutôt
être considéré comme une relation. On peut
citer à ce sujet une théorie qui présente
les virus comme des particules informatives qui
réalisent une communication entre cellules
eucaryotes.
- une cellule
compartimentée en organites réalisant chacun un
travail spécialiste ; des populations parfois
regroupées mais qui restent inféodées
à l'eau
Les unicellulaires eucaryotes
forment l'essentiel du deuxième groupe (royaume des
Protistes) qui est de loin le plus varié au niveaux de
ses modalités de travail. Mais en fait, on
place habituellement dans ce groupe non seulement les
unicellulaires eucaryotes auparavant placés dans les
plantes ou les animaux mais aussi les champignons à
zoïdes et quasiment toutes les algues, mêmes
pluricellulaires, sauf certaines algues brunes chez qui on peut
considérer qu'il existe un début
d'histogenèse... bref, ces limites floues dépassent
un peu notre propos et je les laisse aux
spécialistes.
- Du point de vue de la matière et de l'information,
la cellule eucaryote est déjà nettement plus
complexe et variée que la cellule bactérienne
dans ses structures et ses métabolismes: il suffit de
voir les innombrables formes qui colonisent tous les milieux
aqueux mais aussi d'autres êtres vivants, comme le font
de nombreux parasites. Une idée fréquemment
évoquée concerne la limitation de taille des
unicellulaires. Du fait des distances et de l'indispensable
coordination du travail entre les différents
compartiments, la cellule présente une taille limite de
l'ordre de quelques centimètres. On notera aussi les
intéressantes remarques de R. Chandebois sur la taille
du noyau qui doit stocker de plus en plus d'information
génétique du fait de l'augmentation du nombre de
gènes (Le gène et la forme, p 197) et sur
l'exosquelette, présenté comme une solution au
maintien de la forme de la cellule, ou encore sur la
comparaison entre le noyau reproducteur plus petit et le noyau
végétatif dont la taille devient très
importantes lors de la complication des structures..
- Du point de vue fonctionnel, la division (spatiale) du
travail entre les différents compartiments est possible
grâce à l'apparition de membranes internes.
- Le travail de nutrition peut être
réalisé par des organites
(mitochondries et chloroplastes, peut-être issus de
parasites "esclavagisés" par la cellule eucaryote) ou
des surfaces membranaires
spécialisées.
- Le travail de reproduction devient plus limité
dans le temps et on observe deux grandes modalités de
la reproduction: une reproduction binaire, que
certains ont vu comme une photocopie mais qui est à
l'heure actuelle beaucoup plus considérée
comme source de variations du fait des anomalies de
duplication et de séparation observées. Elle
est souvent considérée comme intervenant de
préférence dans un milieu favorable mais il
est possible que l'on en vienne à la
considérer de plus en plus comme une
reproduction-croissance-colonisation du milieu qui est le
mode de reproduction le plus courant. Cette division se
déroule selon le mécanisme de la
mitose. Mais il existe des modalités
très variés de cette division et de nombreuses
mitoses sont atypiques chez les unicellulaires (persistance
de l'enveloppe nucléaire, absence de fuseau de
division... etc.). Il est peut-être aussi important de
noter que de nombreuses mitoses se déroulent
successivement puis simultanément chez un même
individu, ce qui permet de produire de nombreuses cellules
filles à partir d'une cellule mère
(bourgeonnement, schizogonie...). La seconde modalité
est la reproduction sexuée. Elle était
considérée jusqu'alors comme intervenant dans
des conditions défavorables et tendant à
mélanger les caractères des individus. Elle
était donc source de diversité
(génétique sous-entendu car souvent
présentée de façon beaucoup très
réductionniste comme un mécanisme de brassage
intrachromosomique (crossing-over) et interchromosomique
(séparation aléatoire des chromosomes
homologues à l'anaphase de 1ère division) voir
le cours de terminale S à ce sujet). Actuellement il
est possible que l'on considère plutôt cette
modalité comme un mécanisme de
réparation, de maintien des caractères de
l'espèce. D'une part parce que la fusion
cytoplasmique réalisée à la
fécondation permet un réassortiment du
stock d'organites cellulaires et d'autre part parce que la
méiose suivie de la caryogamie permet un
réassortiment des allèles de l'espèce
et donc en fait un maintien de ces caractères alors
qu'une variation allèlique (une mutation par exemple)
sera au contraire cachée, mélangée, et
très probablement supprimée (soit par
réparation lors de la phase S, soit par des
mécanismes cytoplasmiques variés de
régulation du génome) lors de la reproduction
sexuée. Il est essentiel de noter que seuls quelques
unicellulaires ont des cycles de vie complets bien
documentés. Chez de nombreuses espèces (je
crois même pouvoir dire la plupart), une partie du
cycle est ignorée, seule la reproduction
asexuée étant connue la plupart du temps. Mais
il est évident qu'étant donné la taille
des ces organismes les études expérimentales
qui doivent être basées essentiellement sur des
observations (cultures en laboratoire notamment de
façon à étudier l'influence des
paramètres du milieu) seront difficiles et restent
une source d'enthousiasme pour le biologiste qui doit encore
garder son pouvoir d'émerveillement, à
l'instar du philosophe, devant la nature.
- Enfin le travail de relation peut être assez
élaboré du fait des nombreuses structures
assurant la mobilité des Protistes, du nombre de
substances chimiques et signaux produits dont on commence
à peine l'étude et des espèces
présentant une vie coloniale assez originale (Amibes
acrasiales par exemple). Là encore, la richesse des
types de communications entre cellules est encore loin
d'être totalement appréhendée. Les
Protistes sont nettement inféodés au milieu
aquatique, y compris lorsqu'ils sont parasites ou
symbiotes.
- des sociétés
cellulaires orientés vers des travaux différents
dans l'écosystème
Les trois autres groupes sont des
pluricellulaires et eucaryotes.
- Du point de vue matériel chaque cellule à un
comportement déterminé par trois types
d'information: l'information génétique,
l'information cytoplasmique et l'information extracellulaire.
C'est l'ensemble de l'organisme qui possède les
propriétés du vivant et qui réalise le
travail. L'information génétique est
morcelée, répétée, chevauchante...
sans parler de sa manipulation extrêmement complexe par
le cytoplasme. Dans une cellule différenciée,
l'information génétique est, pour sa quasi
totalité, définitivement réprimée.
On est loin du modèle bactérien. L'information
cytoplasmique représente la mémoire cellulaire,
le trajet dans le temps et l'espace de la population à
laquelle cette cellule appartient. Le développement de
l'organisme à partir d'une cellule uf
représente le processus le plus passionnant du vivant.
L'information extracellulaire, qui n'est pas à
négliger, même dès le stade de l'uf
(maturation au sein des organes sexuels femelles par exemple),
coopère aussi à l'élaboration du plan
d'organisation de l'individu (une théorie
complète du développement est par exemple
proposée par Rosine Chandebois dans "Le gène et
la forme", voir Bibliographie).
- Pour les trois autres groupes (royaumes) formés
d'organismes composés de nombreuses cellules, le travail
est divisé et réparti (hiérarchisation)
entre organes (regroupés en fonctions), puis tissus,
eux-mêmes composés de cellules qui se
différencient. Le travail de la vie est fortement
divisé. Ce qui fait jouer aux fonctions de coordination
(travail de relation interne à l'organisme) un
rôle essentiel. Avec les pluricellulaires apparaît
la notion de milieu intérieur qui, protégé
des variations du milieu extérieur, permet à
l'organisme pluricellulaire de vivre en milieu hostile
(aérien par exemple).
- des sociétés
très diversifiées qui unissent, tissent des liens,
recyclent, transforment...
Le troisième groupe (royaume des Mycètes
ou Champignons) comprend, classiquement
désormais, tous les organismes hétérotrophes
composés de cellules eucaryotes à paroi chitineuse.
Leurs métabolismes originaux, leurs cycles de reproduction
souvent trigénétiques, leur association
fréquente sous forme de mycorhizes aux racines de
végétaux supérieurs, justifient cette
classification à part. Ils constituent en quelque sorte des
colonies de cellules adjacentes, parfois communicantes
(mycéliums siphonnés) qui mettent en commun leur
différents types de travail mais sans réaliser des
structures communes (sauf l'appareil reproducteur). Les
mycétes restent tributaires du milieu aquatique ou pour le
moins très humide et ne résistent au milieu sec que
sous forme de spores de résistance.
- des sociétés de
cellules qui se fixent en un lieu et colonisent l'espace; les
plantes ont conquis le milieu aérien
Le quatrième groupe (royaume des Plantes ou
végétaux) comprend des organismes autotrophes
eucaryotes à paroi pecto-cellulosique. Le travail de
nutrition est dominé par le mécanisme de la
photosynthèse qu'il ne faut pas uniquement regarder au
niveau moléculaires (pigments et métabolisme
chloroplastique) mais aussi au niveau de la compartimentation dans
l'espace et le temps (plantes CAM et C4) ou encore au niveau de la
phyllotaxie (disposition des feuilles au niveau de la tige). Une
fois encore il ne faudra pas oublier que c'est l'ensemble de
l'organisme qui réalise le travail, même si la
tâche est répartie en plusieurs sous-tâches au
sein de la plante. Le travail de reproduction est parfois
original, les mécanismes de reproduction asexuée et
sexuée étant extrêmement diversifiés.
Une des grandes originalité structurale des
végétaux étant le communication cytoplasmique
des cellules par les plasmodesmes qui en fait une mode original de
travail de relation. La plante est une société
cellulaire dont les communications se font soit par voie
apoplasmique (paroi et méats) soit par voie symplasmique
(cytoplasme et plasmodesmes) soit encore par réseaux
spécialisés (phloème et xylème). La
plante est résolument tourné vers le milieu
aérien comme en témoigne le port dressé
réalisé par l'élaboration des troncs chez la
plupart des espèces arborescentes.
- des sociétés de
cellules qui se déplacent au sein de leur milieu de vie; de
nombreux animaux ont conquis le milieu aérien
Le cinquième groupe (royaume des Animaux) comprend
les organismes hétérotrophes eucaryotes sans paroi.
Le travail de nutrition est dominé par la respiration
cellulaire mais les modalités de nutrition sont très
nombreuses. Le travail de reproduction peut se faire par
reproduction asexuée ou sexuée. Par contre le
travail de relation présente des originalités
certaines: il n'y a pas que le déplacement qui se fait dans
tous les milieux y compris dans l'air, milieu qui paraît de
prime abord le plus hostile à la vie, il y a aussi le
développement de nouveaux modes de communication comme les
signaux et langages animaux de plus en plus sophistiqués,
ainsi que des systèmes de communication chimique comme
celui qui intervient dans les mécanismes immunitaires.
Enfin la hiérarchisation du travail des différents
groupes cellulaires devient de plus en plus nette et culmine avec
le tissu nerveux centralisé représenté par
l'encéphale des vertébrés mammifères.
Les sociétés animales hiérarchisés
sont aussi un exemple particulièrement frappant de travail
de relation très développé.
- des sociétés de
cellules se regroupant en sociétés d'individus et
cherchant à maîtriser la terre
Je souhaiterai ici, en marge de la stricte description biologique,
ajouter, avec Gffroy Saint Hilaire, un sixième groupe
(royaume de l'Homme ou hominien) qui ajoute un type
de travail supplémentaire: le travail de la raison, de
l'esprit, qui est abstraction, usage de la volonté libre et
des facultés de l'intelligence. Ce travail est vie
intérieure. (J'ai déjà expliqué
dans les pages concernant la méthode
expérimentale et la science que
cette raison ne peut pas être niée par le
scientifique sous peine d'incohérence. La raison, par
l'élaboration des hypothèses et des jugements
qu'elle porte, est indispensable à la méthode
expérimentale). L'homme maîtrise les autres royaumes,
comme j'ai essayé de l'expliquer dans le cours
pour les professeurs des écoles mais dans son propre
royaume il est plus souvent esclave que roi.
Simultanément avec la recherche et la mise en forme des
critères unificateurs qui ordonnent l'ensemble des êtres
vivants, l'homme cherche à classer et à nommer chaque
être vivant. Le nom permet de faire référence
à la classification. Par la mémoire des noms la
connaissance du monde vivant progresse. On continue sans cesse
à l'heure actuelle de nommer de nouvelles espèces.
Dénombrer les espèces demande donc que l'on se penche
auparavant sur la notion d'espèce.
retour cours seconde, retour
fiche simplifiée seconde
Qu'est-ce que la vie ? - Les
mécanismes du vivant - L'évolution
du vivant - Classer les êtres
vivants - Nommer-Dénombrer-Recenser les
êtres vivants
5. Nommer, dénombrer
et recenser les êtres vivants
A suivre