Elevages, cultures... et biotechnologies.

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Sources
E.U.
Le péril écologique des cultures transgéniques ?, Suzanne Warwick, Pour la Science, Hors-série n°26, janvier 2000, p 128-132, E.U;

Ce chapitre est encore en gestation, il est prématuré sous la forme présente mais je suis poussé par le calendrier du concours et ce sujet me paraît incontournable pour celui-ci.

Ce chapitre est encore une fois à la frontière de la biologie et des sciences humaines et peut comporter deux facettes:
* une facette, technique, qui s'efforce d'exploiter toute nouvelle connaissance expérimentale;
* une facette, à la fois historique, économique, philosophique, morale, politique: qui est la question du sens, qu'il est sans cesse nécessaire de reformuler au gré des nouvelles techniques.
Les deux sont indiscutablement inséparables, d'où une impression de fouillis qu'il faudra certainement pas mal de temps pour ôter à ce cours. Cependant, malgré l'effort de lucidité sur les finalités, le thème est toujours traité à partir d'une entrée biologique, ce qui implique certains choix. En voici quelques-uns, explicites.

Nous suivrons un plan basé sur le règne des organismes utilisés par l'homme. Et comme fil directeur, je pense que la formulation pédagogique "la vie est un travail" pourrait être reprise ici judicieusement. Ce travail du vivant est mis au service de l'homme. Pour chaque groupe nous essaierons de traiter, lorsqu'il y aura matière suffisante, des trois types de travail du vivant: travail de relation, de nutrition et de reproduction. Pour un panorama des fonctions dans ces règnes je renvoie aux pages générales du site associé (qu'est-ce que la vie ?).

1 - des travailleurs clandestins: les "microbes" utiles

 Comme il est souvent difficile de mettre en évidence séparément le rôle des organismes appartenant aux procaryotes, aux unicellulaires et aux champignons, nous les regroupons artificiellement en un chapitre sur les "microbes" au sens d'organismes microscopiques.

Les microorganismes sont utilisés pour la productions d'aliments: pain (panification), vin et vinaigre (vinification), boissons brassées (bière et certains alcools), lègumes en saumure (chou, olives, cornichons...) ou encore fromages (yaourts, caillés et fromages affinés).
Mais les microorganismes participent aussi à la conservation d'aliments (saumures et alimentés fermentés comme les fourrages en ensilage) et à l'épuration des boues industrielles ou des eaux usées qui, de façon secondaire, peuvent aussi produire de l'énergie (production de méthane).
Enfin on utilise des microorganismes pour produire des molécules d'intérêt économique: vitamine B12, enzymes (protéases, amylases), acides aminés (glutamate).

Quelques précisions permettant de comprendre à quoi servent les bactéries et levures utilisées par l'homme

La fermentation est une voie d'oxydation partielle du pyruvate produit dans le cytoplasme cellulaire par glycolyse. En fait c'est plutôt une voie de régénération des transporteurs d'électrons et de protons qui ont été réduits lors de la glycolyse et qui doivent être réoxydés (ils le sont en présence de dioxygène par respiration chez de très nombreux organismes). Chez certains organismes, la fermentation peut intervenir seule ou conjointement à la respiration (voir aussi cours sur la nutrition). La plupart des fermentations se produisant en absence de dioxygène et comme les fermentations sont en quelquesorte une alternative à la respiration pour la réoxydation des transporteurs d'électrons et de protons, on peut affirmer que les fermentations (en incluant la glycolyse) sont des ensembles de réactions chimiques produisant de l'énergie en absence de dioxygène (en anaérobiose ou en conditions anaérobies).
fermentation
réactions
cellules ou organismes
fermentation lactique
H3C-CO-COO-
(pyruvate = acide pyruvique)
<--->
H3C-CHOH-COO-
(lactate = acide lactique)

globules rouges (qui ne respirent pas mais fermentent uniquement)
cellules musculaires striées (fibres de type II)

Lactobacillus, Streptococcus

fermentation alcoolique
H3C-CO-COO-
(pyruvate = acide pyruvique)
<--->
+ CO2
H3C-CO-H
(acétaldéhyde)
<--->
H3C-CH2OH
(éthanol=alcool éthylique)

levures (Saccharomyces cerevisiae...)

fermentation butyrique

l'amidon est transformé en butanol et acétone

Clostridium acetobutyricum

fermentation malo-lactique

transforme le malate (acide malique) en acide lactique avec production de CO2

Leuconostoc

Quelques questions naïves et des réponses simplifiées

  • l'homme mange-t-il les microorganismes du pain, de la bière, du yaourt ou du fromage ?
    OUI pour la pain, le fromage et le yaourt, c'est même un apport non négligeable de protéines et autres substances organiques et minérales; NON pour le vin (la fleur est séparée lorsque le vin est tiré) et la bière qui est filtrée.
  • Sont-ils vivants ?
    OUI pour le yaourt ou la fromage (on peut en réutiliser les ferments); NON pour le pain qui est cuit. (Attention, les microorganismes du yaourt sont vivants mais pas le yaourt).
  • Pourquoi utiliser encore de nos jours des microorganismes alors qu'avec des produits chimiques on devrait être capable de faire la même chose ?
    D'abord c'est une question de goût; les microorganismes participent de façon INIMITABLE aux qualités organoleptiques des produits (on peut comparer les "pains de mie" industriels levés avec du bicarbonate (levure chimique) et les pains de mie artisanaux levés en boulangerie (avec de la levure de boulangerie ou levure de bière); ensuite c'est une question de COÛT: cela serait beaucoup plus long, beaucoup plus compliqué et donc beaucoup plus cher.

a - maîtrise du travail de relation

Les bactéries lactiques (surtout utilisées en fromagerie) sont attaquées par des virus bactériophages qui les infectent et les détruisent, stoppant ainsi les fermentations. On a donc sélectionné des souches résistantes aux bactériophages.
La conservation des légumes en saumure (olives, cornichons, chou...) permet par ajout de sel (3%) à sec de développer une pression osmotique élevée qui favorise le développement des bactéries lactiques (on peut aussi ensemencer la préparation). L'acide lactique produit par fermentation empêche le développement d'autres souches.
Les bactéries intervenant lors de l'ensilage montrent aussi une maîtrise des fonctions de relation et de nutrition. L'ensilage consiste à conserver des fourrages verts à l'état humide au moyen de la fermentation lactique en minimisant les pertes de matière nutritive et en empêchant l'apparition de substances toxiques. Le fourrage (sorgho, maïs, luzerne, trèfle...) est haché et transporté dans une cuve ou silo où il est tassé. Le silo est fermé de façon étanche. Une fois le dioxygène emprisonné dans le silo utilisé par les bactéries par respiration, les fermentations sont seules à subsister. Les bactéries acétiques, à pH supérieur à 4,5 fermentent les sucres en acide lactique, acide acétique, alcool et CO2. Ensuite se développent des bactéries lactiques (Lactobacillus plantarum et Lactobacillus casei qui représente 40 à 70% des bactéries présentes) pour un optimum de température de 35°C. Elles acidifient le milieu dont le pH avoisine rapidement 3 en empêchant ainsi la fermentation butyrique (pour un pH un peu supérieur à 4). Un fourrage s'ensile bien s'il contient 10 à 12% de glucides solubles. Le fourrage ensilé est apprécié des ruminants et favorise la richesse en matière grasses du lait.
La température de cuisson des produits laitiers fermentés est un facteur déterminant pour le développement de telle ou telle souche bactérienne; cependant, on ajoute la plupart du temps des souches sélectionnées:
aliment
souches
optimum de température
procédés de fabrication
remarques

yaourt

Lactobacillus bulgaricus (L.) ou Lactobacillus caucasicus
et
Streptococcus thermophilus (S.) (ancien nom: Thermobacterium yoghurti)

41°C

le lait bouilli refroidi est ensemencé par des souches sélectionnées de bactéries lactiques (normalement autant de S. que de L. ); la fermentation dure 3-4 heures à 41°C. S. se développe d'abord (aérobie), acidifie légèrement le lait et consomme le dioxygène. L. se développe alors (presque anaérobie) et acidifie beaucoup plus fortement le lait.
C'est le refroidissement qui arrête la croissance microbienne.

L'acide lactique produit par les bactéries provoque une dénaturation des protéines. Suivant la composition du lait (et donc l'origine animale: vache, brebis, chèvre, chamelle...) on obtient des produits de fermentation différents et donc des goûts différents.

S. parfume le yaourt avec du diacétyl et L. avec l'acétaldéhyde.

Bifidobacterium sp.

?

Le genre Bifidobacterium correspond à des bactéries acétiques et lactiques en forme de bâtonnets irréguliers (extêmité fourchue ou en crosse d'où leur nom), immobiles, anaérobies et ne formant pas de spores. On les trouve à l'état naturel dans l'intestin humain (découverts en 1906); ce seraient elles qui améliorent la tolérance au lactose, notamment chez les nouveau-nés. Elles autraient de plus une action antitumorale et réduiraient le taux de cholestérol sérique.


Silhouettes de trois types de bactéries du yaourt: Bifidobacterium, Lactobacillus et Streptococcus l'échelle étant approximativement respectée pour les 3 et la longueur d'un bâtonnet de Lactobacillus étant d'environ 3 micromètres.
Au microscope une goutte de yaourt, colorée ou non au bleu de méthylène est facilement observable (voir classification des êtres vivants)

lait fermenté

Lactobacillus acidophilus

37°C

les laits fermentés à L. acidophilus semblent avoir les mêmes rôles bénéfiques que les yaourts ensemencés avec cette même espèce.

crème acide et babeurre fermenté

Lactobacillus lactis (et notamment la sous-espèce diacetylactis)

?

cette sous-espèce de L. donnant un goût de beurre particulier est utilisée dans la crème pour produire une crème acide et dans du lait écrémé pour produire du babeurre fermenté.

fromages

Lactobacillus cremoris
Lactobacillus lactis

20-37°C

Ces deux souches sont nécessaires au stade précoce de la fabrication de quasiment tous les fromages; ce sont elles qui sont responsables de la transformation du lait en "caillé" par fermentation lactique produisant de l'acide lactique (on utilisait aussi la rennine, une enzyme de l'estomac de veau).

Streptococcus thermophilus
Lactobacillus helveticus

+ de 37°C
?

Ces deux souches sont utilisées directement pour la fabrication de gruyère qui comprend un chauffage du caillé (suivi de l'égouttage et du salage) puis un affinage de plusieurs mois à un an.

Propionibacterium shermanii
Propionibacterium freudenreichii

?

Ces deux souches sont ajoutés lors de l'affinage du gruyère. Ce sont elles qui sont responsables de la formation des trous par production de dioxyde de carbone. Elles participent aussi au goût final du fromage.

Penicillium roqueforti (mycète)

?

Pour le bleu et le roquefort c'est le caillé (obtenu à partir des souches de L. cremoris et L. lactis) qui est inoculé par des spores de P. roqueforti. L'affinage dure un à quelques mois.

Penicillium camenberti (mycète)

?

Le caillé obtenu à partir des souches de L. cremoris et L. lactis est d'abord égoutté et salé. La surface du fromage déjà formé est inoculée par des spores de P. camemberti. La durée de l'affinage est de l'ordre de quelques mois.
Si l'on observe au microscope une fragment de fromage du cœur on trouve donc surtout des lactobacilles alors qu'à la surface on trouve le champignon (voir classification des êtres vivants)

Saccharomyces carlsbergensis est une levure de bière utilisée en brasserie qui se dépose au fond de la cuve de fermentation: on dit qu'on a une fermentation basse. A l'inverse, Saccharomyces cerevisiae est une levure de bière utilisée en brasserie tout comme en panification qui monte en surface lors de la fermentation; on a alors une fermentation haute. Les deux types de fermentation ne donnent pas exactement les mêmes produits.

Pour produire de la bière, on utilise des grains d'orge (ou de blé, ou de riz) maltés (germés) c'est-à-dire dont les enzymes ont commencé à hydrolyser l'amidon du grain (l'amidon est un polymère d'amylose (longues chaînes non ramifiées de glucose) et d'amylopectine (longue chaînes de ramifiées de glucose)) en maltose (polymère de 2 glucoses). L'orge malté est broyé et introduit dans de l'eau à 67°C où l'hydrolyse se poursuit. Après filtration, la phase aqueuse ou moût va être chauffée dans des cuves de brassage et mélangée à du houblon (Humulus lupulus, une Cannabacée bien connue comme tonique, diurétique (favorise la diurésie: action d'uriner) et dépuratif.... un simple recommandé par Sainte Hildegarde comme remède à la mélancolie au XIIème siècle; ce houblon étant initialement ajouté au moût pour éviter le développement de microorganismes indésirables; il est conservé car il aromatise et facilite la clarification du moût) qui donnera sa saveur à la bière et à du sucre. L'ébullition arrête les cations enzymatiques. Après refroidissement, il y a ensemencement avec une souche sélectionnée de levure qui dégrade les sucres du moût en éthanol et CO2 mais produit aussi de nombreuses autres substances, en faible quantité, responsables de la saveur de la bière. Saccharomyces carlsbergensis se dépose au fond de la cuve et produit du glycérol et de l'acide acétique. Le temps de fermentation est de 7 à 12 jours et le pH final est de 4,1-4,2. Avec Saccharomyces cerevisiae, le levure monte en surface et donne des bières plus acides (pH de 3,8) ou "ales" (anglaises). La fermentation achevée, la levure est séparée de la bière qui, après maturation, sera filtrée (et parfois stérilisée sur membranes filtrantes), embouteillée (on ajoute alors souvent du CO2), parfois pasteurisée (à 60°C ou au-delà) et commercialisée.
En Bretagne, on brasse plusieurs bières artisanales dont certaines avec de l'eau de mer.

La production des whiskies, whiskey (irlandais) et du whisky (écossais) est une extension des procédés de production de la bière. Le moût, après l'ébullition, est enrichi en alcool à partir de condensats de la phase volatile (par exemple le bourbon doit contenir au moins 51% d'alcool de maïs, le whisky étant fait principalement d'orge). Le moût refroidi est ensuite inoculé par une bactérie lactique comme Lactobacillus delbrueckkii qui produit principalement de l'acide lactique qui abaisse ainsi rapidement le pH à 3,8 en 6 à 10 heures et limite le développement de microorganismes indésirables. La vodka est issue de la distillation de grains. Le gin est une vodka à laquelle on ajoute des aromates résineux (baies de génévrier par exemple).

La conservation des légumes en saumure (olives, cornichons, chou...) permet par ajout de sel (3%) à sec de développer une pression osmotique élevée qui favorise le développement des bactéries lactiques (on peut aussi ensemencer la préparation). L'acide lactique produit par fermentation empêche le développement d'autres souches. Cette technique et les précédentes, reposent sur le principe très général de la compétition: pour contrôler le développement des diverses souches on favorise une souche que l'on sait inoffensive et qui empêche d'autres souches, toxiques, de se développer.

Une exemple original de la maîtrise du travail de relation est représenté par les associations bactériennes qui travaillent les unes à la suite des autres, chacune prenant comme substrat le produit des réactions de l'élément le précédant dans la chaîne. Le cas de l'épuration par la méthanisation des boues (des effluents industriels, d'élevage ou domestiques) en est un exemple. A pH 7 et en anaérobiose les associations stables regroupent des bactéries hydrolytiques (dégradant la cellulose, l'amidon, les lipides et les protides), des bactéries fermentatives (qui produisent les acides organiques ou de l'alcool), puis des bactéries acétogènes produisant de l'hydrogène associées (les deux différents types bactériens sont associés spatialement: vraiment accrochées les unes aux autres) à des bactéries utilisant l'hydrogène comme les bactéries sulfato-réductrices (qui réduisent les sulfates (SO42-) en sulfures (S2-)) et des bactéries méthanogènes (qui produisent du méthane à partir du CO2 et de l'hydrogène). Un digesteur de station d'épuration produisant du biogaz (méthane et CO2 produits par des microorganismes) fonctionne à pH compris entre 6,8 et 7,6 avec un optimum de température à 50°C. Les boues épurées sont utilisées en épandage. Le biogaz servant de combustible pour produire de l'énergie thermique ou électrique (le rendement est assez bon : un kilo de matière organique peut produire jusqu'à 600L de méthane). On peut noter que la biométhanisation anaérobie se produit dans des milieux très variés comme le tube digestif de nombreux animaux (rumen des ruminants, intestin d'autres animaux; à noter que les animaux sont ainsi responsables d'une grande partie du méthane rejetté dans l'atmosphère: une vache éructant de 200 à 400L de méthane par jour), le cytoplasme de nombreux unicellulaires, les sédiments lacustres (marais et marécages) et marins, les sources chaudes (on a ainsi isolé une bactérie méthanogène qui se développe jusqu'à 110°C, son optimum de croissance se situant à 98°C).

Des bactéries et des mycètes sont utilisés depuis longtemps dans la lutte contre d'autres organismes viuvants indésirables comme les insectes: on utilise ainsi Bacillus thuringiensis pour de nombreuses cultures contre les larves d'insectes, en supposant leur inoffensivité pour l'homme. Des champignons comme Beauveria bassiana sont répandus contre le doryphore de la pomme de terre.

b - maîtrise du travail de nutrition

La vinification consiste à faire fermenter le jus issu du broyage (foulage) des grappes et de leur macération (pour le vin rouge) suivi par le pressage (séparant la jus liquide de la râpe solide). La première fermentation en cuve est réalisée par des souches de levures et donne le moût. Cette fermentation alcoolique dégrade les sucres libres (glucose, frucose, pentoses) mais il existe dans le moût de très nombreuses autres substances: des acides (acide malique, tartrique, citrique), des acides aminés et des tannins, notamment. De nombreuses souches de levures sont présentes à l'état naturel sur les grains de raisin et l'inoculation naturelle réalisée lors de l'extraction du jus peut suffire mais reste aléatoire. On traite donc souvent le moût à l'anhydride sulfureux et on ajoute des souches fraîches de Saccharomyces cerevisiae ou de Saccharomyces ellipsoideus. La fermentation dure entre 3 et 5 jours à 15-28°C. La quantité d'alcool dépend de la souche (plus ou moins tolérante à l'alcool) et de la quantité de sucre du départ (plus il y a de sucre, plus la fermentation alcoolique est importante et plus une teneur en alcool élevée est atteinte rapidement, ce qui bloque l'activité des levures et l'on obtient alors un vin doux ou sucré). On retire ensuite l'excès de levure et on transfère le moût en cuve à décantation. Une deuxième fermentation, toujours délicate, a ensuite lieu, c'est la fermentation malo-lactique réalisée par les bactéries lactiques Leuconostoc œnos naturellement présentes. Celles-ci se développent si le pH est bas et si le taux d'alcool est suffisant. Ces bactéries dégradent l'acide malique en acide lactique ce qui baisse l'acidité du vin. La masse des levures qui se sont multipliées pendant les fermentations forme la lie qui est laissée au fond de la cuve lors du soutirage. Le vin soutiré peut ensuite être vieilli en fût ou directement mis en bouteilles
Le vinaigre provient de l'oxydation de l'éthanol en acide acétique par Acetobacter et Gluconobacter en milieu aérobie. On peut récupérer une "mère de vinaigre" à la surface d'un vinaigre en cours de maturation.
Les champagnes sont obtenus en maintenant la fermentation en bouteille pour obtenir un vin naturellement pétillant. La collecte des levures restantes se faisant à la fin de la maturation, au niveau des cols des bouteilles inversées, après les avoir soigneusement et régulièrement tournées, en les congelant (uniquement le col), ce qui permet de déboucher la bouteille et retirer les levures. On rajoute un peu de champagne clarifié à chaque bouteille avant le bouchage final et l'étiquettage.

La production de lysine est réalisée industriellement par une souche de Corynebacterium glutamicum sélectionnée mutante qui produit une grande quantité de lysine et la rejette dans le milieu (chez la souche mutante il manque une enzyme dégradant le précurseur de la lysine (homosérine) qui le transforme en thréonine, un autre acide aminé; et donc d'une part, seule la lysine est produite et d'autre part la totalité du précurseur est transformée en lysine). On obtient ainsi en 3 jours de fermentation 44 g/L de lysine. La lysine est un acide aminé indispensable chez les animaux, c'est-à-dire que la plupart des animaux sont incapables de synthétiser et qu'ils doivent donc trouver dans leur alimentation. Or les protéines végétalkes sont très pauvres en lysine. On fournit donc un complément en lysine aux herbivores d'élevage.

La production industrielle de pénicilline par un champignon Penicillium chrysogenum cultivé dans des fermenteurs agités est un bon exemple de contrôle des paramètres du milieu afin de produire la plus grande quantité d'antibiotique.


La production de pénicilline dans des fermenteurs est contrôlée par au moins 3 paramètres ajustés: l'azote disponible (qui doit rester limité), le sucre (lactose qui conduit à des rendements beaucoup plus élevés que le glucose), et le pH (qui doit être ajusté de la neutralité). Voici l'exemple d'une culture ajustée dans le temps de façon rigoureuse.

c - maîtrise du travail de reproduction

 Le malt de brasserie (voir ci-dessus) contient environ 53% de maltose, 12% de glucose, 13% d'autres sucres simples et 22% de dextrines (sucres complexes issus de la dégradation partielle de l'amidon constitués par de courtes chaînes de glucoses). Saccharomyces cerevisiae dégrade essentiellement le maltose et des sucres simples. Saccharomyces carlsbergensis dégrade le maltose et la plupart des sucres simples, mais pas non plus les dextrines. Pour faire une bière plus "légère", contenant moins de dextrines on peut utiliser Saccharomyces diastaticus qui dégrade les dextrines mais malheureusement pas tous les sucres simples. On a donc réalisé des croisements entre ces souches afin de produire une bière "légère" et qui conserve un goût agréable.
souches croisées
Saccharomyces carlsbergensis

dégrade le maltose, les sucres simples mais pas les dextrines

Saccharomyces cerevisiae

dégrade le maltose, les sucres simples mais pas les dextrines

Saccharomyces diastaticus

dégrade les dextrines

hybride I

dégrade le maltose, les glucides simples et les dextrines mais la bière a un goût désagréable

hybride II (obtenu après de nombreux croisements)

dégrade le maltose, la plupart des glucides simples et les dextrines (au total 90% des glucides) et la bière a un goût agréable

hybride III

dégrade tous les glucides et la bière a un goût agréable

Sans pouvoir réellement traiter de ce vaste domaine ici, il faut citer la technologie de l'ADN recombinant (voir par exemple cours de spécialité de TS) qui permet de sélectionner des souches pour telle ou telle application mais aussi maintenant de manipuler leur information génétique afin de les amener à présenter telle ou telle propriété ou produire une substance. Plus prometteur et osé encore l'ingénierie des protéines et, plus récemment encore, l'ingénierie métabolique. La première, toujours à l'aide de la technologie de l'ADN recombinant, s'efforce de produire de nouvelles molécules (en modifiant les molécules naturelles produites par les microorganismes) qui ont des propriétés intéressantes pour une application technologique (par exemple, en modifiant un acide aminé sensible au dioxygène (la méthionine) et en le remplacant par un autre (la valine), on stabilise une enzyme (l'alpha-antitrypsine) produite par Escherichia coli dans les laboratoires à des fins technologiques. L'ingénierie métabolique quand à elle modifie les réseuax de réactions chimiques à l'intérieur du microorganisme (le métabolisme) afin de lui faire produire des substances entièrement originales (par exemple en ajoutant le gène d'une enzyme supplémentaire (une réductase) pris chez un autre genre (Corynebacterium), on fait produire à une bactérie (Erwinia herbicola) un précurseur de la vitamine C qu'elle ne produisait pas.

d - des problèmes nouveaux ou mal maîtrisés

Les microorganismes ne sont bien évidemment pas totalement maîtrisés. Ils sont à l'origine de nombreuses maladies et sont des agents très actifs de la dégradation de composés alimentaires.
Le terme de biodétérioration désigne tous les phénomènes de dégradation NON SOUHAITÉE de matériaux par les microorganismes. On peut ainsi citer le papier, les carburants pour réacteur (des bactéries dégradant les hydrocarbures croissent dans le fond des cuves à kérosène et autres carburants pour avions dès qu'y stagne un peu d'eau), les puces électroniques (lors de la fabrication des puces, la croissance miucrobienne est l'ennemi n°1 et les systèmes d'épuration de l'eau sont les plus sophistiqués qu'il soit), les peintures (pour lutter contre les bactéries et mycètes, on ajoutant des composants mercuriques, comme pour la pâte à papier, mais l'accumulation du mercure dans les eaux de lessivage provoquant un grave danger pour l'environnement, ces composés ont été abandonnés et remplacés par des ammoniums quaternaires, du métaborate de barium et divers produits phénoliques chlorés), les textiles et les cuirs, les métaux (voir ci-dessous) et même le béton (qui peut être dissous par des bactéries du groupe des thiobacilles qui oxydent les composés soufrés (pyrite notamment) en sulfates.
Les bactéries méthanogènes, fort utilisées dans l'épuration des boues organiques (voir ci-dessus), se sont revélées utiliser aussi le Fer comme donneur d'électrons pour la production de méthane: elles sont donc à l'origine d'une importante corrosion anaérobie des tuyaux contenant du fer doux. Ce problème est devenu extrêmement important.
Remarque: on peut aussi souhaiter favoriser la biodégradation naturelle, notamment pour l'élimination de déversements de pétrole (notamment par des espèces de Pseudomonas modifiées génétiquement à l'aide de petits fragments circulaires d'ADN ou plasmides), ou encore la récupération de métaux dans des résidus d'extraction de minerais (c'est le mécanisme de biolixiviation utilisé par exemple pour récupérer le cuivre à l'aide de thiobacilles).

La fermentation malo-lactique des moûts (voir ci-dessus) est toujours une étape délicate qui peut échouer - et qui de fait échoue parfois.

2 - les masses laborieuses: des plantes comestibles mais aussi médicinales, ornementales, énergétiques...

 Etant donné la complexité des questions agricoles, j'ai choisi de traiter ce chapitre sous forme d'une page documentaire associée sur le blé. Dans les paragraphes ci-dessous, je me contenterais de résumer ou de compléter certains points en élargissant à d'autres organismes.

a - maîtrise du travail de relation

 

b - maîtrise du travail de nutrition

c - maîtrise du travail de reproduction

Si l'on utilise les semences issues de la fécondation naturelle pour les nouveaux semis les rendements ne se maintiennent pas.

d - l'impossible maîtrise

 
Quelques étapes de la transgénèse.

3 - le peuple des travailleurs sacrifiés: des animaux source de nourriture mais aussi parfois bien familiers

(source principale: article zootechnie de l'E.U.)

L'opposition entre alimentation végétarienne et carnée n'est plus vraiment actuelle et peu d'hommes de nos jours ne sont pas polyphages. Cependant cette distinction a une origine historique, philosophique et religieuse profonde dont l'exemple le plus connu est peut-être Pythagore (philosophe et mathématicien grec mort vers -500 ans avant Jésus-Christ), un végétarien convaincu, et son gendre Milon, un carnivore et polyphage, non moins convaincu. La consommation de chair animale nécessite le sacrifice de l'animal, qui maintenant a perdu, sauf dans certaines religions, ce sens d'offrande à la divinité. C'est pour faire référence à cette tradition que j'ai employé le terme de sacrifice, qui, même s'il est banalisé, n'en reste pas moins un élément de légitime interrogation pour les enfants pour lesquels ce n'est jamais pareil de manger un animal (surtout s'ils le connaissent, dans le sens où ils l'ont vu vivre et peuvent reconnaître son cadavre) et une plante. Il ne faut pas oublier que des pays entiers restent majoritairement végétariens et certainement pas parmi les moins peuplés du globe (l'Inde bouddhique par exemple) et ce n'est bien évidemment pas seulement par tradition ou du fait de la difficulté de se procurer des protéines animales chères.

«La science du bétail consiste à l'acheter et à le nourrir, afin de tirer le plus d'argent possible de la chose même d'où vient le mot argent. Car pecunia , argent monnayé, est dérivé de pecus , le bétail étant regardé comme la source de toute richesse» (Varron (MARCUS TERENTIUS REATINUS VARRO ~ 116-~ 27), De agricultura )

La zootechnie désigne «l'amélioration et l'exploitation des animaux domestiques pris dans les différentes espèces» (mot forgé par M. Gasparin en 1844).

Une histoire française de l'élevage:
Au début de l'histoire, comme le souligne Leroi-Gourhan, l'élevage a été une affaire d'animaux, l'homme cherchant plus à satisfaire les besoins de ceux-ci qu'à imposer des techniques. Il n'y avait donc pas une véritable science de l'élevage, donc pas de zootechnie. Le grand souci de l'agriculture est de fournir des céréales panifiables et le bétail est mis au service de cette agriculture en fournissant son travail et le fumier. Le cheval et le mouton occupent cependant une position particulière, la création des Haras, en 1665, par Colbert et les études sur le mouton par Carlier (1771), puis par Daubenton en sont des preuves évidentes. C'est surtout au XVIIIe siècle que naît la science de l'exploitation des animaux, plus particulièrement en Angleterre avec Bakewell, dont on peut schématiser ainsi la méthode: nourrir le mieux possible les animaux, choisir les meilleurs sujets, ceux qui répondent le mieux à cette alimentation intensive, faire reproduire entre eux les meilleurs sujets en utilisant une consanguinité plus ou moins étroite afin de fixer le plus rapidement possible les caractères observés. Les premiers concours d'animaux de boucherie datent de 1842 en France et s'internationalisent en 1855. Des mélanges avec des espèces étrangères vont alors être tentés. Les races pures des bovins sont consignées à partir de 1870 dans un livre d'origine (Herd Book). Les années 1980 vont être marquées par une autre révolution : compte tenu de l'évolution même de l'agriculture, des structures rurales, des impératifs sociaux et économiques, on tente d'imposer aux animaux des techniques d'élevage qui les amènent à la limite de leur élasticité physiologique.

Le principe de base en élevage date de 1891 lorsque Cornevin écrivait: « il y a une solidarité entre le sol, le climat, les végétaux et le bétail, solidarité appelée aussi harmonie agricole.» Si l'on ajoute à cela un zeste de connaissances sur les techniques modernes de reproduction et de suivi de croissance et de solides connaissance économiques, on a les bases nécessaires à un éleveur moderne.

a. maîtrise du travail de reproduction

La race n'est pas une notion zoologique mais bien technique et économique. On parle aussi de souches en référence à des groupes d'animaux der même espèce et présentant la même performance (notion économique). La sélection de races et de souches est connue sans aucun doute depuis les débuts de l'élevage. Si les théories génétiques ne viennent qu'en appui de techniques ancestrales (on ne doit pas parler à mon avis de la lactation comme d'un caractère mendélien), les technologies de maîtrise de la fécondation (fécondation in vitro, insémination artificielle, clonage embryonnaire par division d'un embryon au stage très précoce et implantation dans plusieurs utérus maternels préparés) révolutionnent par contre les méthodes de la sélection des mammifères essentiellement.

C'est principalement l'insémination artificielle (chez le cheval dès la fin du XIXème siècle, puis les ovins et enfin les bovins depuis 1950; aujourd'hui, plus de 90% des vaches laitières se reproduisent par insémination artificielle en France, pour des raisons essentiellement génétiques; le pourcentage est beaucoup plus faible dans les races à viande). Les progrès technologiques (congélation dans les vapeurs d'azote liquide, conditionnement en «mini-paillettes» de 0,25 ml, etc.) l'ont banalisée chez les bovins: aujourd'hui, un éjaculat de taureau permet couramment de produire cinq cents doses de semence.
Dans les autres espèces, la congélation est souvent plus problématique, ou économiquement peu intéressante. L'insémination se réalise alors largement avec du sperme frais (petits ruminants, porcs, volailles, etc.). L'insémination artificielle progresse dans toutes les espèces, mais sa pénétration demeure nettement plus faible que chez les vaches laitières. À noter un développement spectaculaire, depuis 1985, chez le porc.
Le contrôle du cycle ovarien, qui permet de planifier la venue en chaleur et de synchroniser la reproduction d'un groupe de femelles (conduite en bandes), s'est, à un degré moindre, beaucoup développé aussi. La reproduction peut faire appel à une simple technique d'élevage (synchronisation des sevrages chez le porc), à une modification du photopériodisme naturel par l'application de programmes lumineux (volailles de ponte, surtout, petits ruminants et équidés, ponctuellement) ou à des traitements hormonaux. Ces derniers, qu'ils fassent appel à des progestagènes, à la prostaglandine F2a ou à une combinaison des deux, sont maintenant bien au point chez les mammifères de ferme. La synchronisation des chaleurs par voie hormonale autorise l'insémination artificielle sans détection préalable de l'œstrus.
Le diagnostic de la gestation peut être systématiquement pratiqué, spécialement chez les bovins laitiers. Les méthodes utilisables sont nombreuses: dosage de la progestérone dans le lait à 21-24 jours après la fécondation supposée (intéressante surtout pour repérer à ce stade les femelles non gestantes), dosage de protéines embryonnaires dans le sang de la mère à partir de 30 jours, échographie à partir de 40, etc.
Les «biotechnologies» font beaucoup parler d'elles mais, pour le moment, seul le transfert d'embryons frais ou congelés fait l'objet d'applications sensibles chez les bovins (36 000 transferts en 1990). La transgenèse consiste à introduire un gène isolé au premier stade du développement de l'embryon. Le clonage consiste à transférer le noyau d'une cellule prélevée sur un embryon dans le cytoplasme d'un zygote qui ne s'est pas encore divisé ou d'un ovocyte et permet de produire un certain nombre de copies, ou «clones», d'un même individu. Ces deux techniques ouvrent à la zootechnie des perspectives complètement nouvelles, mais à des échéances qu'il est impossible de préciser pour le moment [cf. TRANSGÉNÈSE: Des gènes ont été injectés dans des embryons de multiples espèces - mouton, lapin, porc, poulet, etc. Des problèmes techniques, liés en particulier à la difficulté de bien voir les noyaux, font que les rendements sont en général largement inférieurs à ceux qu'on obtient avec les embryons de souris. Les applications sont essentiellement agro-alimentaires, à savoir, d'une part, l'amélioration des espèces et, d'autre part, la production de molécules d'intérêt thérapeutique ou biologique. Chez les eucaryotes supérieurs, un certain nombre de protéines doivent subir, après qu'elles ont été synthétisées, des modifications importantes (glycosylation, clivage protéolytique, phosphorylations...) pour adopter leur conformation terminale et devenir actives. Désormais, on sait utiliser la machinerie bactérienne pour produire en grande quantité des protéines. Mais les bactéries ne peuvent correctement effectuer toutes les étapes de maturation des protéines eucaryotes. En revanche, ces étapes peuvent être réalisées dans certaines cellules en culture, mais la production massive reste impossible et les modèles cellulaires adaptés sont peu nombreux. La solution est alors de réaliser un animal transgénique dont le transgène comprend la séquence codant pour la protéine précédée de séquences régulatrices et capable de cibler l'expression dans le type cellulaire qui permet la maturation de la protéine. Il est parfois possible, et cela est important pour la production massive, d'ajouter au gène introduit une séquence codant pour un signal de sécrétion de la protéine dans le sang ou dans le lait, par exemple, rendant sa purification ultérieure plus aisée. Un facteur IX actif et de l'alpha I antitrypsine ont ainsi pu être produits. Il est clair que l'obtention d'animaux dont les constituants seraient d'une qualité nutritionnelle plus importante (modification de la composition du lait par exemple) ou permettant de produire en grande quantité des protéines d'intérêt thérapeutique ou biologique est d'une grande utilité.]

Exemple du contrôle de la ponte chez la poule:
* une observation : chez les poules élevées dans des conditions naturelles l'activité sexuelle est directement proportionnelle à la durée du jour: maximale en fin d'hiver et au printemps, lorsque la durée du jour augmente, elle diminue en été et à l'automne.
* une connaissance expérimentale: le déterminisme de la ponte chez la poule est sous la dépendance d'un stimulus lumineux reçu par l'oeil et l'hypothalamus; on observe alors un réflexe neuro-endocrine (réponse du système hypothalamo-hypophysaire)se traduisant par la sécrétion d'hormones stimulant les ovaires et conduisant à la ponte.
* des expériences sont donc menées afin de déterminer la relation entre la photosensibilité et l'activité sexuelle dont on note le résultat en observant ou non une ponte. En voici les résultats:


Photosensibilité et ponte chez la poule - résultats expérimentaux (d'après La vie et la terre, 1ère S, Istra, Casteilla, 1988)


Programme lumineux d'élevage de poules pondeuses (d'après La vie et la terre, 1ère S, Istra, Casteilla, 1988)

Amélioration de la productivité des poules pondeuses principalement obtenue par sélection de souches performantes

(d'après SVT, 6ème, Bordas, 2000)

1971
1980
1990
1994

nombre d'œufs pondus par poule

230
250
278
285

consommation d'aliments en g/œuf

191
164
143
144

b. maîtrise du travail de nutrition

D'abord, parce que le coût de l'alimentation représente, selon les productions, de 55 à 75% du prix de revient. Ensuite, parce que l'intensification n'a été possible qu'en raison de considérables progrès techniques dans la conception, la formulation et la réalisation des rations. Enfin, parce que l'alimentation a une influence prépondérante tant sur la qualité des productions animales résultantes que sur la santé, donc la prévention de multiples pathologies. Ce qui frappe dans la formulation industrielle actuelle (en 1991, plus de 19 millions de tonnes d'aliments composés d'origine industrielle, privée ou coopérative), c'est, d'une part, la précision des données et, d'autre part, le poids accordé aux équilibres nutritionnels pour chaque situation concrète (par exemple, acides aminés indispensables en pourcentage de l'aliment, mais aussi pour 1 000 kilocalories d'énergie métabolisable: volailles; ou en pourcentage d'amidon fermentescible par rapport aux sucres solubles totaux: vaches laitières à haut potentiel); tout cela est servi par des logiciels performants optimisant les résultats en fonction des contraintes économiques. C'est ainsi que, de nos jours, il faut moins de 2 kilos d'aliment pour faire 1 kilo de poulet, moins de 3 kilos d'aliment pour faire 1 kilo de porc, et que des programmes alimentaires évolués permettent d'assurer en 305 jours des moyennes laitières de plus de 9 000 kilos par vache! La rançon de ces dispositifs a priori favorables est l'émergence d'une pathologie d'origine nutritionnelle inconnue jadis, et qui est bien un stigmate de l'intensification. Eu égard au succès des grandes prophylaxies, la pathologie en élevage, d'infectieuse et de parasitaire qu'elle était, a tendance à devenir métabolique, notamment chez les ruminants laitiers (acétonémie, fièvre de lait, tétanie) ou à viande précoce (acidose). Dans ces situations, le constat clinique est très postérieur au désastre économique initié par la maladie, d'où l'importance vitale d'une prévention précoce et adaptée au contexte particulier considéré, en y intégrant des paramètres autres que la seule alimentation.
Tout différent est le problème posé par la nutrition des carnivores de compagnie qui, ayant longtemps subi l'anthropomimétisme alimentaire imposé par leurs maîtres, bénéficient maintenant d'aliments préparés originaux, spécifiques, efficaces et économiques. Il s'y greffe depuis peu une vaste panoplie de formules dites diététiques, destinées à corriger ou à s'adapter à une pathologie préexistante, pour prolonger la vie d'animaux, qui, au titre de commensaux, doivent accompagner le plus longtemps possible leurs propriétaires. Ce vaste marché est en pleine expansion et s'appuie sur des technologies élaborées (extrusion, par exemple) étayées par une politique commerciale imaginative et très active.

Comparaison entre les deux souches de poulets aux performances de croissance différente
(d'après La vie et la terre, 1ère S, Istra, Casteilla, 1988)

Poulet standard

paramètres

Poulet label

Souche à croissance rapide elevée par bandes de 20.000 dans un bâtiment à 22°C. Les dépenses d'entretien sont minimales (neutralité thermique et peu d'activité musculaire). L'aliment composé est riche en graisse (farine de poisson acceptée). Parcours en plein air non obligatoire

18,5
densité d'élevage (en poulets par m2)
10,8

Souche à croissance lente élevée par bandes de 1,000 autour de bâtiments ouverts. Les dépenses d'entretien sont variables. L'alimentation est à base de céréales complémentées en protéines, minéraux et vitamines. Parcours en plein air avec 2m2 herbeux ou ombragé par poulet.

5,6
nombre de bandes par an
3,4
45
âge à l'abattage (jours)
84
1,85
poids à l'abattage
2,13
4,0
masse d'aliment ingéré en été (kg)
5,9
4,1
masse d'aliment ingéré en hiver (kg)
6,8
2,1
indice de consommation (masse d'aliment/masse à l'abattage)
3,0
5,8
coût de production (en F/kg de poids vif - tendance 1987)
8,0

c. maîtrise du travail de relation

Il s'agit essentiellement des conditions sanitaires et "écologiques".
Avec l'intensification de l'élevage, l'augmentation de la taille des exploitations et leur tendance à la spécialisation, deux conceptions nouvelles se sont fait jour:
- construire des bâtiments spécialisés, pour permettre (le mieux possible) l'application de recommandations de plus en plus strictes en matière d'élevage;
- ne leur prévoir qu'une durée de vie limitée (par exemple 15-20 ans), en partant du principe qu'ils vont se trouver assez rapidement dépassés au regard de l'évolution des techniques et qu'il vaudra mieux alors les remplacer (notion d'amortissement technique, qui se surajoute à l'amortissement économique).

Les bâtiments d'élevage doivent résulter d'un compromis entre les impératifs de confort pour les animaux et pour l'éleveur (qui y passe lui-même une partie de son temps de travail) et les impératifs économiques (construire à un coût de revient acceptable). Ce compromis n'est pas facile à définir: par exemple, mécaniser le plus possible l'enlèvement des déjections (élément du confort de l'éleveur, qui bénéficie d'une réduction de son temps de travail et de la pénibilité de ce dernier) n'est guère confortable pour les animaux (entretien sur caillebotis, au moins partiel, par exemple) et coûte cher; ne pas installer d'isolation thermique dans les bâtiments pour ruminants est, dans la plupart des cas, logique compte tenu de la physiologie de ces animaux, et c'est intéressant sur le plan économique, mais, en contrepartie, l'éleveur devra parfois travailler en subissant des températures inférieurs à 0°C.Depuis 1980, les difficultés de financement ont incité les éleveurs à, parfois, s'orienter vers des bâtiments de structures légères (y compris les «tunnels», simples bâches en matière plastique montées sur arceaux), qui sont censés constituer une solution transitoire.
Au logement des animaux est liée la question des déjections. Dans les élevages dits industriels de volailles, de porcs, de jeunes bovins de boucherie, etc., les excréments sont recueillis le plus souvent sous forme de lisier et produits en quantité supérieure aux besoins en engrais des terres de l'exploitation. Lorsqu'il y a surépandage répété, les risques de pollution des nappes phréatiques par les nitrates deviennent sensibles. En attendant que des systèmes de traitement du lisier, fiables et de prix accessible, soient à la disposition des éleveurs, le législateur a imposé en 1992 des normes pour l'épandage, dont le respect ne va pas sans poser de problèmes de pollution.

d. problèmes

Un contrecoups de la sélection de races et souches performantes est une diminution de la diversité qui est considéré actuellement comme un appauvrissement du patrimoine génétique des espèces. Un effort de sauvegarde de la diversité est désormais entrepris. On pense ainsi que certains gènes, possédés par des espèces, dont l'élevage est actuellement économiquement peu rentable, pourraient se révéler intéressants dans le futur. Il est certain que, si l'amélioration génétique provient des croisements permis par la diversité, l'appauvrissement de cette diversité constitue une limitation des possibilités d'amélioration.

La crise récente de la "vache folle" (appellation médiatique mais en rien scientifique), l'épidémie de fièvre aphteuse, montrent la difficulté de trouver un équilibre entre des souhaits d'une population (une zootechnie respectueuse de l'animal et de l'environnement) et l'incontournable recherche de profit de l'élevage. Sans oublier que les comportements des populations européennes (se tourner vers les produits les moins chers) ne sont pas forcément en accord avec les valeurs qu'ils affirment défendre (celui qui pratique l'offre à bas prix est bien sûr responsable de la coercition qu'il induit).

L'agriculture française

Les campagnes françaises n'ont jamais autant produit: un agriculteur nourrissait 7 personnes en 1955, il en nourrit 45 aujourd'hui. Les Français ont encore connu la disette durant la Seconde Guerre mondiale. Dès la fin du conflit, l'État encourage donc les agriculteurs à développer leurs productions. La production de blé double en dix ans! Les rendements de blé passent de 15 q/ha à 70, le maïs de 13 à 80. La production laitière triple. Cette remarquable augmentation de la production place aujourd'hui la France au deuxième rang des exportateurs mondiaux de produits agroalimentaires, derrière les États-Unis et devant les Pays-Bas. En 1996, les industries agroalimentaires totalisent 4 227 entreprises, qui emploient 377 260 salariés et réalisent un chiffre d'affaires de 677,6 milliards de francs. Sous l'effet de l'exode agricole, le nombre des exploitations a lui-même fortement diminué, tandis que la taille moyenne des exploitations s'est considérablement accrue. En un siècle, la France dénombre près de huit fois moins d'exploitations, passant de 5,7 millions en 1892 à 734 797 en 1995, soit 40 p. 100 de moins qu'en 1979. Cette chute, lente à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, s'est accélérée entre les deux guerres, lorsque le pays s'est fortement urbanisé sous l'effet de l'industrialisation. La motorisation de l'agriculture a accéléré plus encore les disparitions d'exploitations à partir de 1955. Depuis les années 1970, ce sont les contraintes de la P.A.C. qui accentuent ce processus: le nombre d'exploitations agricoles a diminué de 2,9 p. 100 par an entre 1970 et 1988 et de 4,5 p. 100 par an entre 1988 et 1995. Pour accroître leur productivité, les exploitations qui demeurent en activité s'agrandissent. De 14 hectares en 1955, leur taille moyenne est passée à 23,4 hectares en 1979 et à 38,5 hectares en 1995; 27,3 p. 100 d'entre elles sont cependant toujours de petite taille (inférieure à 5 ha), et le même pourcentage, 27 p. 100, dépasse les 50 hectares, dont plus de 5 p. 100 excèdent les 100 hectares et représentent le quart de la surface agricole utile (S.A.U.). Ces grandes exploitations se concentrent en Île-de-France (surface moyenne des exploitations: 85,6 ha), en Picardie et dans le Centre (où plus du cinquième des exploitations dépassent les 100 ha), alors que le pourtour méditerranéen, les Alpes et le Sud-Ouest se caractérisent par une forte dispersion de petites exploitations (près de la moitié des exploitations de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur font moins de 5 ha, la taille moyenne des exploitations agricoles varoises n'était que de 7,7 ha en 1988).

Pour permettre aux agriculteurs de faire face aux investissements toujours plus lourds, de s'agrandir ou de mieux s'équiper, de nouvelles formes sociétaires d'exploitation voient le jour: les sociétés civiles d'exploitation agricole (S.C.E.A.), les groupements agricoles d'exploitation en commun (G.A.E.C.), les groupements fonciers agricoles (G.F.A.). Les premiers ont vu leur nombre augmenter de 129% entre 1979 et 1995; leur superficie moyenne est de 94 hectares. Ils se sont surtout développés en Picardie, en Champagne et en Auvergne. Les G.A.E.C. sont la forme d'exploitation collective la plus répandue (43 700 en 1995), mais ils ne représentent généralement que des associations familiales entre père et fils, 78 p. 100 d'entre elles ne regroupent que deux personnes. À l'inverse des S.C.E.A., les G.A.E.C. sont surtout répandus dans l'Ouest breton et ligérien. Globalement, le nombre des sociétés a plus que doublé entre 1979 et 1995 (+ 103%. Elles représentent 13% de l'ensemble des exploitations agricoles françaises. Constituées en août 1960, révisées en août 1982, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (S.A.F.E.R.) permettent elles aussi aux agriculteurs d'agrandir leurs exploitations, d'acheter de nouvelles terres, de rendre plus cohérente la gestion de l'espace rural, en particulier à l'occasion de remembrements ou de successions. Les plus actives participent aux aménagements ruraux de l'Ouest et du Sud, en Gascogne, dans le haut Languedoc, en Auvergne également.

Ces fortes variations dans la superficie des exploitations agricoles traduisent des orientations différentes dans les types et dans la qualité des productions. En 1995, la superficie totale des exploitations agricoles représente 30 067 000 hectares, (31 985 000 ha en 1988), dont l'essentiel est consacré aux surfaces toujours en herbe (35,2 p. 100) et aux céréales (27,6 p. 100). La composante agricole diminue régulièrement au profit des forêts (+ 30 000 ha en moyenne chaque année) et des sols urbanisables (+ 60 000 ha). La S.A.U. représentait 72 p. 100 du territoire métropolitain en 1950, 61 p. 100 en 1995. À l'inverse, les peupleraies, bois et forêts couvraient 21 p. 100 du territoire national en 1950 et 27,6 p. 100 en 1995, soit 15 millions d'hectares. La forêt, composée de près de deux tiers de feuillus, joue elle-même un rôle fondamental non seulement dans l'économie nationale (33,3 millions de mètres cubes de bois commercialisés en 1996 et environ 15 millions de mètres cubes de bois de feu autoconsommés), mais aussi dans la protection de l'environnement. Deux tiers des terres agricoles sont des terres arables, dont les jardins familiaux, un tiers est destiné aux cultures permanentes. La moitié des exploitations sont orientées vers l'élevage d'herbivores, pur ou associé. L'élevage bovin gonfle ses rendements en substituant le maïs-fourrage à la prairie. 18 p. 100 des exploitations se destinent à l'agriculture générale, 12 p. 100 à la viticulture. Les surfaces toujours en herbe régressent depuis la fin des années 1970. Elles couvrent 32 p. 100 des terres agricoles en 1997. Les cultures fourragères occupaient 33,6 p. 100 des terres arables en 1950 et uniquement 10,7 p. 100 en 1997. Depuis la mise en place de la réforme de la P.A.C., en 1992, la composition des terres arables a changé. Les superficies en céréales et en oléagineux diminuent. Les jachères, qui représentaient environ 220 000 hectares en 1980, ont fortement augmenté et couvrent 1,3 million d'hectares en 1996. En raison d'une nouvelle baisse du taux de gel obligatoire, les jachères sont redescendues à 870 000 hectares en 1997. La jachère industrielle (gel productif) atteint 235 000 hectares, dont 160 000 de colza en 1997.
L'élevage bovin (20 563 milliers de têtes en 1996), jadis limité aux bocages de l'Ouest (Normandie principalement) et aux régions de montagne (Massif central, Alpes du Nord), est devenu plus intensif, notamment en Bretagne (12 p. 100 de la production nationale) et dans les Pays de la Loire (14 p. 100). Ces deux régions regroupent ainsi l'essentiel de la production laitière, mais aussi les autres formes d'élevage intensif, souvent hors sol: 54,4 p. 100 de l'élevage porcin national (14 976 milliers de têtes en 1996) et 44,4 p. 100 des volailles se concentrent en Bretagne. Le Grand Sud-Ouest (Aquitaine, Midi-Pyrénées et Poitou-Charentes) a conservé un élevage plus traditionnel et accorde encore une place non négligeable au cheptel ovin (10 126 milliers de têtes en 1996) et caprin (1 084 milliers de têtes en 1995). L'élevage des chevaux ne s'est maintenu qu'en Basse-Normandie et dans le Maine.
Les régions de grandes exploitations concentrent l'essentiel de la production céréalière (62,1 millions de tonnes en 1997). Le blé a trouvé des conditions de sol et de climat idéales dans le Bassin parisien; le Centre et la Picardie fournissent 28 p. 100 de la production de blé tendre. Le Centre, deuxième région agricole française par la superficie de ses sols agricoles (70 p. 100 de la superficie régionale), se caractérise par une production céréalière variée (première productrice de blé tendre, de seigle, d'orge et d'avoine), associée à une importante production de colza et de tournesol. L'agriculture picarde est l'une des plus productives d'Europe; elle associe traditionnellement au blé tendre la betterave industrielle et la pomme de terre, mais elle donne aussi une place de plus en plus importante aux protéagineux et aux légumes verts. L'application de la P.A.C. se traduit par une forte augmentation des subventions nationales et communautaires: près de 40 milliards de francs en 1995, en hausse de 5,5 milliards par rapport à 1994. Ce sont les secteurs des céréales et de l'élevage bovin qui voient leurs soutiens augmenter le plus.
À l'opposé de ces régions de grandes exploitations, les régions de cultures spécialisées conservent l'essentiel des petites exploitations. Les cultures maraîchères se concentrent autour des grandes villes, essentiellement le long du littoral breton et dans la basse vallée du Rhône. Les cultures fruitières sont elles-mêmes souvent méditerranéennes, implantées dans la zone de l'olivier (Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte d'Azur, basse vallée du Rhône jusqu'à Montélimar), la production d'agrumes se situe principalement en Corse. Quelques productions font cependant exception à cette géographie: pommiers et poiriers sont cultivés dans le Centre, l'Ouest et le Sud-Ouest; les pruniers dans le Nord-Est et le Sud-Ouest; les fruits à coques dans le Sud-Ouest et les Alpes du Nord. Languedoc-Roussillon (de plus en plus replanté en cépages de qualité), Aquitaine (près du quart de la production française de vin, 10 p. 100 de la production européenne) et Poitou-Charentes produisent les deux tiers des vins français. La production viticole de grande qualité place aux premiers rangs de la valeur ajoutée agricole la Champagne et l'Aquitaine.

a France est de loin le premier producteur agricole de l'U.E. (21,3 p. 100 de la valeur de la production des Quinze en 1996), mais elle n'est pas la seule nation à connaître la surproduction, qui est due en partie à la politique agricole commune. La P.A.C. a eu pour but de garantir les prix d'un certain nombre de produits de base, les primes les plus importantes étant versées aux producteurs qui obtenaient les meilleurs rendements, c'est-à-dire les plus grandes exploitations. Ce productivisme, peu soucieux de la qualité des produits, a engendré des stocks importants et, de ce fait, la chute des prix d'un grand nombre de denrées agricoles. En 1997, la production céréalière atteint 62,1  millions de tonnes, dont 33 de blé tendre, 15,5 de maïs, (211 000 t en 1946), 10,1 d'orge (plus de dix fois plus qu'avant la Seconde Guerre mondiale). Le gel des terres instauré par la réforme de la P.A.C. à partir de 1993 a surtout affecté la production de blé dur et d'orge: en 1993, elle était à peine plus élevée qu'en 1970, inférieure en 1994 et 1995. La production de blé tendre et de maïs a peu reculé. L'agriculture française a produit en 1997 5,8 millions de tonnes d'oléagineux (colza, principalement dans le Centre et en Champagne-Ardenne; tournesol, principalement en Poitou-Charentes et dans le Centre; soja). La production de légumes frais est extrêmement diversifiée et fluctuante, mais elle s'est beaucoup développée depuis 1970 (4 450 milliers de tonnes en 1970; 6 millions de tonnes en 1997). Salades et tomates représentent 27 p. 100 de la valeur commercialisée. La production des fruits frais reprend depuis la fin des années 1980 (3 530 milliers de tonnes en 1970; 3,5 millions de tonnes en 1997). Cette augmentation est due principalement aux productions de pêches (530 000 t en 1995), d'abricots (100 000 t) et de pommes (2 millions de tonnes), qui avait régressé ces vingt dernières années.
La viticulture occupe toujours une place de choix dans l'agriculture française. Premier producteur mondial encore en 1973, elle se place désormais derrière l'Italie avec 55,6 millions d'hectolitres produits en 1995, dont le quart en appellation d'origine contrôlée (A.O.C.). Par ailleurs, la viticulture a joué un rôle primordial pour orienter la production agricole vers la qualité. L'Institut national des appellations d'origine (I.N.A.O.), créé en 1935 pour mieux protéger les vins de qualité, a étendu ses pouvoirs à la protection des produits laitiers (fromages, beurres) puis des volailles et des légumes. La loi du 2 juillet 1990 permet désormais à tout groupe de producteurs de demander une A.O.C.
Les productions animales restent essentielles pour l'économie agricole; elles représentent 49 p. 100 de la valeur ajoutée de la production agricole, et près de 40 p. 100 des exploitations sont orientées vers l'élevage. Forte de sa progression entre 1975 et 1984 (évolution de près de 5 milliards de litres), la production laitière fut la première touchée par les quotas imposés par la P.A.C. Alors qu'en 1979 la proportion des exploitations qui possédaient des vaches laitières, était de 41 p. 100, en 1997 seules 12 p. 100 d'entre elles assurent l'élevage bovin laitier (mais le nombre de vaches par élevage a doublé entre 1975 et 1992). Le nombre de vaches laitières a cependant considérablement diminué à partir de 1985. La production laitière est passée de 260 millions d'hectolitres en 1983 à 224 en 1997. Le cheptel ovin, soumis à une forte concurrence britannique, régresse depuis plus de dix ans, (13 127 milliers de têtes en 1980; 10 126 en 1996). La production de viande ovine diminue encore, bien qu'elle ne fournisse que 47 p. 100 de notre consommation (180 000 t en 1980; 154 000 en 1996). À l'inverse, l'élevage porcin progresse (11 284 milliers de têtes en 1970; 14 976 en 1996). La production de viande porcine a fortement augmenté, mais tend à se ralentir depuis 1994 (1 570 milliers de tonnes en 1980; 2 171 en 1996). De même les effectifs de volailles continuent de croître.
La pêche maritime française (quatrième rang en Europe) se concentre sur le littoral de la Manche et de la Bretagne Sud (la Bretagne réalise à elle seule la moitié des prises françaises). En revanche, les cultures marines (huîtres, moules et autres coquillages) concernent toutes les régions maritimes. Depuis le début de 1993, la pêche est en crise (baisse des cours de 25 p. 100), crise due au non-respect des réglementations communautaires par certains États membres, aux prix plancher fixés par l'U.E., à la concurrence de pays hors U.E., à l'épuisement des ressources. Un programme de décroissance de la flotte a été fixé par Bruxelles: la France n'a plus que 6 300 navires de pêche et 16 700 marins en 1997, contre 11 243 navires et 21 346 marins en 1988. Dans ces conditions, le volume de ses prises a diminué, passant de 599 milliers de tonnes en 1990 à 575 milliers en 1992; elles ont légèrement augmenté après les graves crises de 1993 et 1994, pour s'élever à 630 milliers de tonnes en 1996. Seules les cultures marines maintiennent leur production. Les produits marins sont cependant globalement déficitaires dans la balance commerciale.

État des élevages en France

La France détient environ 21 millions de bovins, dont 8 950 000 vaches: 5 300 000 vaches laitières et 3 650 000 vaches à viande (ou allaitantes), la part des premières ne cessant de se réduire depuis l'instauration des quotas laitiers en 1983. L'élevage bovin se concentre dans l'Ouest, mais il reste encore bien pratiqué sur l'ensemble du territoire (à l'exception du Bassin parisien et de la zone méditerranéenne). Le cheptel allaitant, fortement représenté dans une dizaine de départements du Centre et du Sud-Ouest, progresse actuellement partout.
Environ 470 000 exploitations agricoles entretiennent des bovins, la taille moyenne étant de l'ordre de 45 animaux de toutes catégories (dont 20 vaches laitières et 16 vaches allaitantes). La moyenne cache évidemment une dispersion: les exploitations de moins de 10 vaches, prédominantes encore en 1970, décroissent rapidement, les troupeaux de plus de 30 vaches étant les seuls à progresser. Notons que la classe des «plus de 100 vaches» ne recouvre, de son côté, que quelques centaines d'exploitations.
Un troupeau de vaches laitières est souvent entretenu aujourd'hui en stabulation libre (l'étable entravée garde toutefois ses adeptes) et est presque toujours soumis à la traite mécanique, dans un local spécialisé (salle de traite) ou à l'étable. L'alimentation peut être distribuée selon différentes modalités, par lots ou individuellement (aliment complémentaire de production donné en salle de traite); les distributeurs automatiques de concentrés (D.A.C.) commencent d'apparaître, réservés à la seule stabulation libre. Le «robot de traite», qui permettra de traire les vaches en libre service, devrait être commercialisé prochainement. Le lait, stocké en tanks réfrigérés à 4°C, est ramassé par l'industrie laitière, privée ou coopérative. La transformation du lait de vache à la ferme est aujourd'hui l'exception.
La production de viande bovine est diversifiée:
- veaux de boucherie, abattus à 3 ou 4 mois après avoir consommé exclusivement du lait, issus de petits troupeaux allaitants du Sud-Ouest (veaux blancs, de plus en plus commercialisés avec un label) ou d'ateliers «industriels», où ils constituent un sous-produit de la production laitière;
- jeunes bovins de boucherie (taurillons), de développement récent en France (années 1965-1970), maintenus habituellement en stabulation et soumis à un rythme de croissance important jusqu'à un âge d'abattage de 18 à 20 mois (fourchette de 15 à 24 mois);
- gros bovins de boucherie incluant différents types de bœufs et de vaches de réforme.

Le cheptel ovin compte 9 500 000 têtes. Il est entretenu essentiellement pour la production de la viande et accessoirement pour le lait (zone de Roquefort, Pyrénées). La laine ne compte plus. 150 000 exploitations sont concernées, mais 25 000 seulement ont plus de cent têtes, cette catégorie étant la seule à progresser. Les deux tiers des effectifs sont au sud de la Loire: les ovins sont donc d'abord entretenus dans les zones de montagne et de semi-montagne, même si des systèmes intensifs très performants avaient vu le jour dans l'Ouest. Exploités le plus souvent en semi-plein air (stabulation hivernale en bergerie, belle saison au pâturage), les ovins sont également concernés maintenant par le retour à l'extensification.

La France élève environ 12 millions de porcs, dont 1 200 000 truies (la taille moyenne des portées est de 10). On a assisté à une concentration régionale extraordinaire puisque plus de la moitié des effectifs sont en Bretagne. L'augmentation de la taille des exploitations est également sensible, et l'on estime que d'ici à quelques années neuf mille éleveurs assureront 80% de la production française. Ces «grands» éleveurs assurent volontiers les deux activités de «naissance» et d'«engraissement», alors que la tendance fut au préalable à leur séparation. Les bâtiments porcins demeurent encore diversifiés, mais le poids de la mécanisation devient important et, dans les constructions récentes, une part significative est faite au caillebotis, aussi bien pour les porcs à l'engrais que pour les truies gestantes. Le porc dit charcutier est abattu à 100 kilos. La viande de porc a la particularité d'être très largement transformée, 75% environ de cette viande devenant des produits de charcuterie et des salaisons.

L'aviculture fermière a considérablement régressé puisque, chez la poule, le secteur industriel assure plus de 90% de la production de la viande et près de 80% des œufs de consommation. Même si la France n'a pas connu le même phénomène de «course au gigantisme» que certains autres pays, la structure des exploitations s'est beaucoup modifiée: par exemple, moins de sept cents élevages de plus de 25 000 poules pondeuses assurent plus de 50% de la production française. La concentration régionale est également importante, les régions Bretagne et Pays de la Loire produisant plus de la moitié de l'ensemble des produits avicoles. L'aviculture est très spécialisée, avec au moins trois secteurs: celui de la reproduction (qui inclut la production de l'œuf à couver et l'incubation), celui de l'engraissement des volailles de chair et celui de la production de l'œuf de consommation (poule presque exclusivement). Les bâtiments se sont, dans une large mesure, standardisés: les volailles de chair sont élevées au sol, les pondeuses en batteries de ponte, les reproductrices au sol, avec fosse à lisier partielle. Notons, pour ces dernières, le développement de l'insémination artificielle, qui autorise l'élevage en batterie.

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