La citoyenneté est une notion politique... le
citoyenneté est-elle éducable ?
Je m'appuie sur la richesse de la réflexion actuelle des
enseignants sur la citoyenneté, étant
donné que l'ECJS a été imposée
à l'ensemble des enseignants du secondaire par le pouvoir
politique. Je renvoie à quelques articles
récents, extraits de la revue de Sciences économiques
et sociales: DEES. Le problème majeur et que l'on ne
s'intéresse plus à la nature de l'homme mais à
l'organisation politique et sociale de la communauté humaine.
La réponse est donc très différente en fonction
du regard que l'on a. Soit on essaye d'avoir une réflexion
globalisante, mondiale, qui puisse s'adapter à tout type de
société, et on est alors clairement dans le domaine de
l'utopie. Soit on ne s'intéresse qu'à la
citoyenneté dans la France de ce début de XXIème
siècle, en étant bien conscient que nos conclusions et
nos propositions éducatives NE SONT PAS EXPORTABLES À
D'AUTRES PAYS, À D'AUTRES ÉPOQUES, OU À D'AUTRES
RÉGIMES POLITIQUES.
On est clairement dans la deuxième alternative dans les pages
qui suivent. Enseigner la citoyenneté est simplement faire des
sciences économiques et sociales avec une dimension politique
forte.
La réponse à mon avis la plus encourageante est que,
d'après André
Chanel, il n'y a pas de crise de la citoyenneté. C'est au
contraire une utopie
créatrice qui se porte bien. La civilité est
par contre sans aucun doute en crise. L'ECJS est une très
mauvaise et fausse réponse du gouvernement d'après
Jean LAWRUSZENKO. Je le pense aussi
car je crois que la réponse se situe dans l'éducation
qui est pour moi d'abord le grand travail des parents.
Je reprends donc la définition de Dominique SCHNAPPER: "La citoyenneté, c'est une utopie créatrice en fonction de laquelle les différences objectives qui séparent les individus s'effacent devant leur égalité en ce qui concerne les droits et la participation politique". Le lien citoyen est un lien politique basé sur le rapport démocratique au pouvoir politique: à la fois égalitaire (un homme, une voix) et ouvert (inclusif car fondé sur des droits universels abstraits).
Quand à la racine éco, elle vient du grec "oïkos = habitat" mais celle-ci est employée habituellement pour désigner le concept de "milieu", souvent considéré du point de vue biologique (je renvoi par exemple aux pages de Canguilhem sur le site associé à ces pages).
On entrevoit donc que lier le concept de milieu, qui n'a rien de
strictement biologique, à la notion politique de
citoyenneté, fait peut-être de celui-ci un concept
politique mais je ne vois pas en quoi il peut être biologique.
Nous sommes dans le domaine des sciences politiques et l'enseignant
de biologie n'y est certes pas à son avantage et c'est son
droit de ne pas s'y lancer.
L'éducation à l'environnement peut passer par une
éducation scientifique biologique, mais je ne suis pas
sûr qu'il existe une éducation à la
citoyenneté (voir paragraphe ci-dessus) et je ne crois pas que
ce terme d'écocitoyenneté nous apporte grand-chose. Je
m'efforcerai donc plutôt de ne pas l'employer pour en laisser
l'usage aux politiques (en leur demandant de bien vouloir le
définir quand ils l'utiliseront).
les sciences de l'environnement.
Puisque je me refuse à employer écocitoyenneté,
qu'en-est-il du mot d'environnement ?
L'Encyclopedia Universalis signale 7 sens, du plus
génétal au plus restrictif : 1. fait d'environner,
d'entourer; 2. ce qui entoure, qui constitue le voisinage; 3.
ensemble des éléments naturels qui entourent un
individu (humain, animal, végétal) ou son
espèce; 4. ensemble des conditions naturelles et culturelles
qui constituent le cadre de la vie d'un individu et sont susceptibles
d'agir sur lui; 5. les conditions extérieures susceptibles de
modifier ou non un système ; 6. ensemble des ressources
(matérielles et logicielles) nécessaires au
fonctionnement d'un système informatique ; 7. uvre
constituée d'éléments répartis dans un
espace que l'on peut parcourir (= installation). On peut aussi
se reporter à "La pédagogie de l'environnement" de
Porcher et al. (armand colin, 1975) qui tente une approche par
opposition de concepts et distingue d'abord l'environnement du milieu
puis les environnements physique et sociologique, les environnements
urbain et rural, et enfin les environnements esthétique et
utilitariste.
Le constat n'est pas plus réjouissant pour l'environnement que
pour la citoyenneté. Eduquer à l'environnement est
souvent une éducation politique ou économique et
très rarement une éducation scientifique.
Finalement avec ce type de concept
multidimensionnel, le problème n'est pas d'en faire le tour
mais bien de hiérarchiser les
différents domaines d'étude du concept. Qui vous
dira si c'est le domaine social, culturel, écologique ou
économique qui prime dans l'environnement ? La réponse
est à mon sens dans un humanisme
qui hiérarchise ces dimensions et les valeurs qui leur
sont liées.
Les sciences de l'environnement sont très rarement
expérimentales. La biologie ou la géologie n'y sont
cités qu'accessoirement, même si tout le monde s'accorde
pour dire qu'elle y ont leur place. Sous prétexte de
transdisciplinarité, on se sert de la science
expérimentale pour justifier des choix politiques ou
économiques. Le rôle des sciences expérimentales
ne peut pas être fédérateur (voir à ce
sujet par exemple le petit travail réalisé sur la
poyvalence avec deux collègues de
l'iufm) car elles ne répondent pas à elles seules au
rôle éducatif. Celui qui fédère c'est bien
l'éducateur, et pour le bien de celui qui est
éduqué. L'éducation à l'environnement est
avant tout un choix de personnes, un projet d'école, un projet
municipal, régional, politique...
L'apport spécifique d'un enseignant
de biologie-géologie me semble donc d'abord de bien
définir et tenter d'approfondir chaque fois que possible les
concepts scientifiques (le savoir). D'autre part il me
paraît souvent nécessaire de veiller à ce que
la méthode expérimentale, propre aux sciences
expérimentales, ne soit pas détournée et
faussement utilisée pour justifier certains objectifs
économiques ou politiques, souvent fort pertinents mais pour
lesquels la science expérimentale ne doit pas servir de
faire-valoir.
Je repéte que je ne crois pas à une science (?)
fédérative, trans-pluridisciplinaire. Il existe une
hiérarchie des sciences et méthodes mais elle ne fait
certainement pas l'objet d'un consensus. Personnellement, je suis
intimement convaincu que la méthode expérimentale n'est
pas le seul et encore moins le meilleur moyen de connaître
l'homme et l'univers. Mais je suis attaché à la
vérité scientifique qu'elle permet d'atteindre.
Lorsqu'un maître des écoles utilise de nombreuses
sciences et approches pour mener à bien un projet dans le
domaine de l'environnement, les sciences expérimentales
restent pour lui un moyen, et je crois que, dans ce domaine, je peux
l'aider à clarifier et préciser les objectifs.
en cours...