Questions et réponses...
Message (09/1999):
En suivant Alain Mingat (Sciences Humaines, hors
série n°12, février-mars 1996, in Eduquer
et Former, Ed. Sciences Humaines, 1998) je souhaiterais
profiter de l'«effet maître», qui donne le
rôle prépondérant au formateur dans les
résultats scolaires. Ce sont ses motivations, son
énergie, sa conviction qui semblent primer sur son style, ses
méthodes ou même les caractéristiques
socioculturelles des élèves... Je citerais aussi la
phrase bien connue : "le message c'est le média", que
l'on pourrait traduire par "ce qui compte, lorsqu'un enseignant a un
message à faire passer, c'est sa propre personne, son
implication dans la formation de l'apprenant". Si c'est bien à
vous, qu'en dernier ressort il revient d'agir, il vous est alors
nécessaire de me faire confiance. Je ne peux rien vous
apprendre si vous n'en avez pas envie.
Humeur (10/1999):
C'est avec stupéfaction que je découvre que dans le
manuel de 6ème (édition Bordas) "le vivant"
(entre guillemets) comprend aussi les produits de la vie comme
les excréments, les cadavres... cela me semble inacceptable
que l'on dise qu'une crotte fait partie du vivant (même si elle
est indubitablement un milieu de vie).
Il me semble que cela vient du fait que l'on se refuse à
employer le terme d'organique pourtant approprié.
Certes, une feuille morte a fait partie du vivant mais elle
est morte !, elle est composée de matière
minérale et organique et est en cours de décomposition
par différents processus biologiques (décomposeurs) et
chimiques (oxydations...), elle ne fait plus partie des êtres
vivants, elle n'est pas vivante.
(01/2000)On parle de plus en plus "des savoirs" (que mon
correcteur orthographique s'obstine à corriger) et de moins en
moins du savoir. Ce pluriel est-il le reflet d'une incertitude
? N'y a-t-il pas encore une confusion entre savoir et
technique (comme ce petit fascicule qui accompagne les
numéros de Science et Vie Junior intitulé pompeusement
"Les Objets du Savoir" : la confusion est ici certaine : il ne s'agit
que de technique orgueilleuse et non du savoir scientifique qui se
reconnaît toujours à sa modestie).
le 12/01/2000
Que l'on ne se trompe pas, il y a urgence.
Quelques extraits de la conférence de Madame
Geneviève ZEHRINGER, Présidente de la
Société des Agrégés de
L'Université: "L'importance du savoir de base pour une bonne
insertion professionnelle" lors de la Table Ronde du Colloque du
12/12/1999 au Parlement Européen de Strasbourg sur le sujet:
"Du savoir au métier" (d'après L'Agrégation,
382, p 201-203).
«...l'institution doit assurer à chaque
élève une formation générale (puisqu'elle
ne peut être conçue en fonction des demandes
précises de tel ou tel milieu professionnel
spécialisé), cohérente mais aussi solide,
c'est-à-dire telle que l'élève doive, pour
entrer dans la classe suivante, avoir acquis les bases que
constituent les notions et modes de raisonnement correspondant aux
programmes de sa classe actuelle. Cette formation
générale, cohérente et solide, ne saurait se
confondre avec une formation commune, c'est-à-dire avec une
sorte de savoir de base identique pour tous et défini de
façon limitative....» ...« une
école qui n'instruirait pas chacun au mieux de ses
facultés serait radicalement injuste et de plus
inefficace....»... « Cette recherche d'une
factice égalité des résultats procède
d'une fausse conception de la solidarité ...»...
«... la dévaluation des diplômes démoralise
gravement la jeunesse....»... « c'est toute la
transmission des savoirs acquis par l'étude des disciplines
qui est aujourd'hui gravement menacée.»
le 27/01/2000....mécontentements... je n'ai pas l'ambition
de plaire à tous ... mais ce n'est pas à moi de
gérer vos problèmes vis-à-vis de la politique de
l'institution :
Le droit de juger n'existe pas (!?). Apprendre s'est souvent
soumettre sa raison. Quand on est formateur, le travail passe souvent
par ce que certains peuvent prendre superficiellement pour de
l'orgueil. En tout cas ce serait une tromperie et une fausse
humilité que de vous dire que mon savoir n'est pas ce qui
justifie ce travail. On ne peut pas prétendre enseigner les
sciences sans d'abord apprendre les sciences. Apprendre à
enseigner ne veut rien dire s'il ne s'accompagne pas d'un effort de
soumission de la raison au savoir scientifique. Un effort de travail
avec bonne volonté me paraît souhaitable. Qu'avez-vous
de plus important à faire en cours de science que d'apprendre
les sciences ?
28/01/2000
Il y a une sorte de malaise dans l'iufm et je voudrais juste
présenter un point de vue: ne serait-il pas lié
à une politique très ancienne qualifiée de
démagogie (à ne pas confondre avec une
démocratie) ? Le gouvernement tripartite :
étudiants-professeurs-administration (ou direction comme ils
désirent qu'on les appelle) est à mon avis une
caricature de la liberté de choix. Chacun n'a pas la
même responsabilité ni le même rôle. Ce
n'est pas aux étudiants de choisir le contenu d'un cours, ni
les horaires, ni le planning. On donne l'illusion d'un pouvoir alors
qu'en fait le pouvoir de décision et donc la
responsabilité appartient à la seule autorité
qui ne doit pas s'en décharger sur les exécutants.
le 27/01/2000
je reviens sur une remarque faite l'année dernière
concernant les notations des copies :
les notes sont des mesures (des évaluations)
réalisées avec une certaine incertitude. La
moyenne ne peut donc être donnée avec une
précision supérieure à celle de chacune des
notes.
Cette remarque est aussi valable pour les concours et notamment les
places au concours. Si les copies sont notées au point
près classer les étudiants au dixième de point
près n'a aucun sens, il faut absolument préciser
que deux candidats qui ont des moyennes de 8,25 et 8,76 ont la
même moyenne (avec la précision des notes
utilisée) : ils doivent être classés
"exaequo", aucun n'est avant l'autre contrairement à ce
que l'on peut imaginer en regardant la précision illusoires
des chiffres.
Sans reprendre l'exemple de la taille des
élèves voici des petits calculs: trois notes par
candidat, trois candidats, chaque note étant attribuée
au point près:
- si l'on ne tient pas compte de l'incertitude on obtient :
André
|
8/20 + 12/20 +11/20 = 31/20*3 = 10,33/20
|
Aline
|
7/20 + 8/20 + 17/20 = 32/20*3 = 10,67/20
|
José
|
8/20 + 6/20 + 16/20 = 30/20*3 = 10,00/20
|
je voudrais vous faire prendre conscience que si apparemment
Aline obtient plus de points qu'André et surtout que
José, ce classement est faux et que pour moi ces trois
candidats doivent être notés exaequo.
- si l'on tient compte des incertitudes
(le terme d'incertitude n'est pas
adapté, il ne s'agit pas d'une mesure mais bien d'une
évaluation et donc d'un classement dans une classe
d'équivalence que je note avec son minima et maxima
de ±0,5 pour chaque note en considérant que la note
correspond à une classe d'équivalence des copies
évaluées au dixième de points) on
obtient par sommation des "incertitudes":
André
|
8/20 (±0,5)+
12/20 (±0,5) +11/20
(±0,5) = 31/20*3
(±1,5/3) = 10,33/20
(±0,5)
|
Aline
|
7/20 (±0,5) +
8/20 (±0,5) + 17/20
(±0,5) =
32/20*3(±1,5/3) =
10,67/20(±0,5)
|
José
|
8/20 (±0,5) +
6/20 (±0,5) + 16/20
(±0,5) = 30/20*3
(±1,5/3) =
10,00/20(±0,5)
|
La différence de moyenne entre les trois candidats est
nettement inférieure au domaine d'"incertitude" (1
point), ils doivent donc être classés exaequo.
Ce n'est pas parce que l'on augmente le nombre de notes que la
précision de l'évaluation augmente. Les
véritables incertitudes des mesures en sciences
expérimentales se somment et ici je les ai fait se
chevaucher car c'est un classement, ce qui, je l'espère,
est légitime.
Cela dit, je sais bien que personne (ou presque) ne me suivra
là-dessus, et pourtant si vous continuez à utiliser des
moyennes au dixième de point cela signifie que vous
considérez que vous évaluez deux copies au
dixième de point près.... je refuse cette
responsabilité.
Le 27/02/2001
Je reviens encore sur cette question à l'aide d'une image,
très imparfaite, mais je trouve toujours que cette bataille
est d'actualité. Si l'on considère l'enseignant comme
un jardinier. Chaque élève est comparable un lopin de
terre à cultiver. Chaque discipline enseignée-apprise
est une espèce potagère. Pourquoi s'obstine-t-on
à vouloir sans cesse faire une moyenne
"générale" de l'èlève qui somme des
carottes, des tomates, des choux.... On peut avoir 18 sur 20 en
rendement de carottes et 8/20 en rendement de choux sans valoir 26/40
soit 13/20 en "moyenne": le rendement moyen n'a pas de sens.
(28/02/00) Dans notre effort de compréhension des changements
dans lesquels les enseignants sont immergés, revient sans
cesse la question de l'incivilité. La civilité
me semble être la capacité pour une personne de trouver
sa place dans la société hiérarchisée
civile. L'incivil se place en dehors de cette hiérarchie.
Lorsque l'on donne à l'enfant de faux pouvoirs comme le fait
de participer à un faux parlement, le "droit" de juger ses
enseignants (en écoutant ses critiques)... on encourage cette
incivilité car on ne lui indique pas la place qu'il devra
occuper. Pour lutter contre cette incivilité les cours de
civisme sont bien inutiles lorsque l'exemple de la
société montre le mépris des valeurs
(honnêteté pour n'en citer qu'une). Ce n'est pas par des
cours de morale que l'on pourra changer la société mais
bien en commençant chacun par se comporter de façon
loyale et vraie. Il faut faire confiance en l'homme.
(28/02/00) Je pense que pour éviter toute confusion il vaut
mieux cesser de dire que l'enfant doit être au cur du
dispositif d'apprentissage. Soit c'est une évidence, si l'on
veut simplement dire que c'est l'enfant qui apprend, soit c'est une
ineptie, si on veut affirmer que l'enfant apprend tout seul.
(31/03/2000) L'hypocrisie des favorisés, Samuel Joshua,
Le Monde de l'éducation, avril 2000, p 45 : « Le
modèle "primaire", quand il fut le plus efficace, s'est
centré non sur "l'élève" dans sa
généralité, mais sur son travail scolaire. (...)
"centration" sur l'étude des savoirs bien
délimités et non sur l'élève...»
(03/2001) Depuis le jour où j'écrivais ces lignes je
pense avoir eu le temps de mieux comprendre quel était l'enjeu
politique de ceux qui se réclament d'une centration sur
l'élève: il s'agit d'utiliser à des fins
politiciennes une position philosophique issue d'une réfexion
dans la ligne de Kant : de la révolution copernicienne des
sciences à la révolution copernicienne du savoir: voir
par exemple: La construction des sciences
(p 43).
Enseigner (un extrait - c'est moi qui met en gras deux mots du
texte- du courrier des lecteurs du Monde de l'éducation -
avril 2000 : courrier des lecteurs : roulier@lemonde.fr)
« Un métier? Une vocation ? Un rôle? Une
spécialité? Une science ? Un art ? Un statut ? Une
position sociale ! Un exutoire ? Un défouloir! Un sacerdoce?
Une routine ! Une mission ? Une profession ! Une
responsabilité !
La majorité de ceux qui ont choisi d'enseigner ou qui se sont
laissé choisir n'ont pas le choix, ni le loisir de se poser la
question. Une fois dans la place école, collège ou
lycée -, il n'existe qu'une alternative : enseigner ou
démissionner. C'est autour que la fureur se
déchaîne, que les mots se défient, au-dessus de
sa tête, des bouches des prophètes qui officient
à l'abri des tempêtes. Et si, un soir d'orage, elle
entre dans sa tête au hasard d'un flash cathodé
arrangé en information (...), la zone des neurones
emportée sous la violence du choc laisse un trou vide dans
lequel s'engouffre le doute, celui qui s'enroule sur soi-même,
son rôle, la valeur de ses valeurs et l'utilité de son
travail, la légitimité de sa démarche
pédagogique.
Certains enseignants ne s'en relèvent jamais. Ils deviennent
alors des professeurs, au sens mythique du terme, enseignent en
état de démission, balancent aux élèves
ce qui leur reste de savoir, contrôlent méthodiquement
et constatent par la note si l'idée a tracé son chemin
dans l'esprit du disciple (...). D'autres passent dans le secteur
privé, dans la politique, à l'université ou
deviennent des chercheurs en sciences de l'éducation qui se
penchent sur l'art d'enseigner. D'autres encore s'accrochent,
combattent le doute et retournent à la guerre, la fleur un peu
fanée au canon du fusil rouillé. lls acceptent les
critiques, en tirent une motivation nouvelle face à la paix
mouvementée qui règne dans leur classe. Poussés
par leurs incertitudes, ils repartent avec Aristote en quête de
leur Graal, ce kairos, le bon moment, l'instant
pédagogique de Philippe Meirieu, le temps suspendu à
l'esprit de l'élève, prêt à comprendre ce
qu'il ne saisit pas, à condition que, lui, le maître lui
prête l'oreille et se livre à l'exercice
périlleux de la marche à reculons jusqu'à
l'endroit précis où le Discours de la parole magistrale
et l'Esprit du disciple se sont soudain déconnectés.
Ils reprennent alors la marche en avant, pas à pas,
jusqu'à la compréhension réciproque.
Ceux qui demeurent enseignants réalisent alors qu'enseigner
est un métier, une vocation, un rôle, une
spécialité, une science, un art, un statut, une
position sociale, un exutoire, un défouloir, un sacerdoce, une
routine, une mission, une profession, une responsabilité.
L'enseignant contemporain est une femme ou un homme, avant tout et ne
doit pas être traité comme un sujet de réflexion
abstraite ni comme un animal d'expérimentation en laboratoire,
encore moins à la manière d'un être virtuel
produit par le programme d'un ordinateur central (...).
L'enseignant est prêt à tout, même à la
compromission. Il entend toutes les voix, même les plus haut
perchées. Il est prêt à toutes les
réformes sur lui-même et son enseignement. Il n'attend
qu'un seul signe: l'écoute, et ne veut qu'une
réponse: la confiance,sans laquelle rien n'est
possible. La situation n'est pas désespérée,
c'est le silence qui désespère après
l'écho de sa propre voix renvoyé à
l'expéditeur par le mur des convictions, des paroles acerbes,
des idées reçues de ceux qui monopolisent le droit de
s'exprimer à coups de grands principes et de citations de
philosophes anciens, ou archaïques. »
Dominique Pelletier, professeur des écoles et
directeur d'école primaire à Chouzé-sur-Loire (
Indre-et-Loire)
Il est clair que, si je me fais l'écho de ce cri, c'est
que je le vis....parfois
Je cherche toujours à développer la formulation
pédagogique : "la vie est un
travail".
J'ai utilisé cette formulation pour une leçon sur
les caractéristiques du
vivant en CP, classe de Sophie Mellec, IMF,
école d'application de Stang Ar C'hoat, Quimper. La
leçon demande à être revue pour construire avec
les enfants le concept de travail de relation qui n'a rien
d'évident....
Voilà encore une constatation qui me pousse à
essayer de développer cette pédagogie: les temps
de loisirs sont des temps de travail mais
orientés vers soi, vers la famille, vers la
société, vers les amis: ils sont sources
d'enrichissement même si notre société ne les
prend pas en compte convenablement comme un élément de
richesse. Il est regrettable que le travail "économique",
directement rémunérateur, soit vécu par certains
comme la seule source de fatigue et de peine alors que le travail du
temps de loisirs provoque lui aussi la même peine mais son
orientation vers une autre fin le rend plus attrayant. Pourquoi ne
pas orienter notre travail économique,
rémunérateur, vers sa fin sociale, plus
élevée et consolante ?
Dans l'éducation, les maîtres ont sans aucun doute un
rôle important à jouer en présentant le travail
comme à la fois source de richesse personnelle et sociale,
source de richesse matérielle (argent, biens...) et
spirituelle (liens avec les autres, communication, réussite
professionnelle...), source de peine (fatigue, caractère
répétitif...) mais aussi joie. La valeur du travail
bien fait, le goût de l'effort, le travail fait pour les autres
... quels beaux objectifs à proposer à l'enfant.
D'après le dictionnaire (Petit Robert, 1984) on distingue
trois sens successifs au terme de travail:
au XI ème siècle: "état de celui qui souffre (y
compris le travail de la femme lors de l'accouchement...)"
au XVème siècle: "ensemble des activités
humaines coordonnées en vue de produire ou de contribuer
à produire ce qui est utile"
au XIXème siècle: "activité organisée
à l'intérieur de groupe social et exercée d'une
manière réglée".
Cette profonde analogie avec l'organisme vivant n'a pas fini de
m'étonner :
* le travail souffrance, est une dépense
énergétique, la vie est endothermique, "coûte de
l'énergie, est active; c'est la dimension de la vie qui
correspond aux fonctions de nutrition. Ce que l'on peut donc
présenter comme le travail de nutrition.
* le travail ordonné, coordonné, finalisé: la
vie est "ordonnée à la vie" (?): c'est l'autonomie du
vivant, c'est bien sûr son évidente finalité;
c'est enfin ce qui correspond aux fonctions de reproduction: rien
n'est plus prolifique que la vie, elle tend à se propager,
elle s'accroche partout... Cela peut être le travail de
reproduction.
* le travail social, c'est le principe si connu de la division du
travail tant au niveau cellulaire qu'au niveau de l'organisme et
même au niveau d'une société animale. C'est aussi
la dimension écologique de la vie qui peuple la terre. Les
organismes vivants ne doivent plus être
considérés comme le fruit d'une sélection
naturelle par le milieu mais comme faisant partie d'un ordre
harmonieux. De même, les cellules d'un organisme ne sont plus
en compétition mais travaillent de concert au
développement de l'organisme. C'est bien sûr la notion
de fonction de relation ou communication qui est recoupée par
cette dimension du travail. C'est donc ce que j'appelle le travail
de relation.
A ce sujet je viens de parcourir le livre "De l'enseignement
des sciences à l'école primaire; l'influence du
positivisme", Pierre Kahn, 1999, Hatier formation... un livre
à recommander, quelques extraits
commentés (merci, mille fois merci à Emmanuelle Cavan
qui me l'a passé et qui a laissé dans cet iufm une
trace ineffacable de gentillesse... nous pensons bien à vous
et à votre famille).
La bulletin de la Société des Agrégés
de l'Université (l'Agrégation n° 387)
s'ouvre par un éditorial de Geneviève Zehringer,
présidente de la Société, dont voici un court
extrait :
« La question qui importe est donc de
savoir si l'éducation nationale peut se passer des
disciplines, l'éducation nationale, qui, comme le veut la
Constitution, organise l'enseignement public, gratuit et laïque
à tous les degrés.
Ceux qui choisissent d'y répondre par l'affirmative doivent
alors accepter de considérer sous leur vrai jour les
entreprises qu'ils cautionnent ainsi, et se préparer à
assumer la responsabilité de leurs conséquences sur la
qualité de l'enseignement reçu par les
élèves.
D'ores et déjà ont été prises de
nombreuses décisions officielles, directement inspirées
des rapports que nous avons commentés :
- fondation des Instituts Universitaires de Formation des
Maîtres, préconisés par le Rapport Bancel,
dont l'idée directrice est que l'efficacité du
professeur est largement indépendante de la compétence
qu'il a acquise dans la ou les disciplines qu'il devra enseigner
; dans tel IUFM, par exemple, un séminaire invitait les
professeurs. stagiaires à réfléchir sur le sujet
suivant : " Ce que l'on enseigne le mieux, c'est ce que l'on a le
plus besoin d'apprendre ".
- réformes du CAPES, surtout du CAPES interne (
réservé aux enseignants en exercice) qui traitent la
compétence dans la discipline comme quantité
négligeable : après la réforme du 25 mars 2000,
le CAPES interne ne comporte, en sus d'une épreuve orale dite
" professionnelle" ( c'est-
à- dire ne portant pas sur la discipline), qu'une seule
épreuve écrite, qui porte par exemple en lettres
classiques à la fois sur des textes de littérature
française, de littérature latine et de
littérature grecque, textes latins et grecs étant
fournis " en traduction", "
sauf un court passage en langue
originale".
- réduction incessante des horaires consacrés
à l'enseignement des disciplines et attribution des heures
prises sur les horaires d'enseignement à des activités
d'une autre nature ( heures de vie de classe), ou à des
activités ne portant pas obligatoirement sur le programme
d'une discipline : " travaux personnels
encadrés" au lycée, "
travaux croisés" au collège où
ils ont succédé aux " parcours
diversifiés", dont un document officiel
précise que " l'apprenant ( sic) et non la
discipline en est le point de départ" ; le
même document reconnaît que le "
défi" de ces parcours
diversifiés est de " répondre
à l'hétérogénéité
évidente des élèves" ;
la scolarité étant en effet, aux termes du rapport
annexé à la loi de 1989, la réalisation du
projet personnel de l'élève, le passage dans la classe
supérieure est devenu quasi- automatique, de sorte que les
classes se trouvent constituées d'élèves
très divers dans leurs acquis scolaires et qui ont beaucoup de
mal à étudier le programme au même rythme ; les
inspecteurs eux- mêmes sont invités à ne pas trop
tenir compte du contenu de l'enseignement, à "
ne pas s'enfermer dans une logique
disciplinaire".»
06/2001 - Dans les médias, le thème de la
centralisation est à l'ordre du jour, notamment pour la Corse.
Il est clair que les iufm s'inscrivent dans cette démarche
gouvernementale de centralisation à outrance. Je pense que
c'est une des raisons profondes politiques de leur
inefficacité.
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