PARTIE 1 (8 points) - NOURRIR L'HUMANITÉ

Botulisme : la tapenade incriminée oblige au rappel des produits

D'après l'article de France soir du 9 septembre 2011 :
Alors que huit personnes souffrent de botulisme après avoir consommé de la tapenade (à base d'olives mixées, anchois et huile d'olive) mal stérilisée, plusieurs produits en conserve ont été rappelés. Des analyses réalisées sur ces produits en conserve ont en effet révélé la présence de la bactérie Clostridium botulinum, qui sécrète la toxine botulique.
Un problème de stérilisation : La préfecture a en effet indiqué que la tapenade était réalisée avec du matériel inadapté pour la stérilisation : une machine de type lessiveuse !

 

Document 1 : le botulisme


Cycle de sporulation/germination de Clostridium botulinum

Le botulisme est une maladie paralytique rare mais grave (paralysie locomotrice et respiratoire) due à une toxine bactérienne produite par des espèces de bactéries dont Clostridium botulinum. Cette intoxication résulte de l'ingestion d'aliments contaminés par des spores de Clostridium botulinum qui ont germé et ont produit de la toxine botulique. Quand les conditions de température, humidité, nourriture deviennent défavorables, cette bactérie se transforme en spore (sporulation). Les conditions redevenant meilleures, la spore germe pour redonner une bactérie qui est la cellule végétative (germination).

La spore est une forme de survie de la bactérie qui :
- ne se nourrit pas ;
- est incapable de se multiplier ;
- est incapable de produire des toxines* ;
- résiste à la sécheresse ;
- survit jusqu'à 110°C ;
- se forme entre 15 et 41°C ;
- survit davantage en milieu huileux.

 La cellule végétative est la forme sous laquelle la bactérie Clostridium botulinum :
- se multiplie (entre 30 et 37°C) ;
- synthétise des toxines* ;
- apparaît par germination de la spore entre 10° et 37°C ;
- est détruite à partir de 65°C.

*Remarque : les toxines bactériennes sont détruites si elles sont portées vers 90°C pendant 3 à 10 minutes.

 

Document 2 : température d'ébullition de l'eau et pression

Document 2a : graphique montrant la variation de la température d'ébullition de l'eau en fonction de la pression

Document 2b : tableau liant pression atmosphérique et altitude

Lieu et altitude par rapport au niveau de la mer
Température d'ébullition*
Pression atmosphérique
Mer Morte (- 422 m)
101,3°C
1,05 bar
Marseille (0 m)
100°C
1,01 bar
Everest (+ 8848 m)
72°C
0,31 bar

Document 3 : Tableau de comparaison des processus de stérilisation en lessiveuse et en autoclave

 

LESSIVEUSE
AUTOCLAVE

photographie des dispositifs de stérilisation

capacité

28 à 87 L
à partir de 20 L

pression atmosphérique à l'intérieur du récipient lors du chauffage

1,013 bar
1,4 à 1,7 bar

température de l'eau dans le récipient

100°C
jusqu'à 115°C

 

COMMENTAIRE RÉDIGÉ :

Certaines personnes réalisent leurs conserves dans l'ancienne lessiveuse de leur grand-mère.

Un journaliste a lu, sur la foire aux questions d'un site internet de vente de matériel de stérilisation, les arguments avancés par quelques personnes sceptiques : « il est inutile de chauffer les conserves à plus de 110°C p uisque dès 80°C, la toxine est détruite ; le seul but est de vendre des appareils chers et inadaptés ».
Sensibilisé aux intoxications dues à la tapenade, il décide alors de rédiger un article dans la rubrique "santé" de son journal, afin de sensibiliser la population sur la question de la réalisation des conserves.

Rédigez l'article de ce journaliste afin de convaincre les adeptes des conserves faites chez soi de prendre davantage de précautions. Votre argumentation s'appuiera sur les documents et vos connaissances personnelles (qui intègreront entre autres les connaissances acquises dans différents champs disciplinaires).

Vous argumentation s'appuiera sur les documents et vos connaissances personnelles (qui intègreront entre autres les connaissances acquises dans différents champs disciplinaires).


Ce sujet est pratiquement repris de celui d'Asie 2012 pour lequel il y a un corrigé-barême officiel

La forme exigée (article) et l'objectif poursuivi par le journaliste (détruire l'argumentaire des opposants et montrer l'intérêt des appareils de stérilisation) ne sont que des artéfacts dont je me passerai. À vous de faire la transposition si vous en ressentez le besoin.

La réalisation de conserves familiales et non seulement ancestrale, mais à l'origine de la fabrication de conserves industrielles, mais il est clair que les industriels ont pu améliorer les techniques familiales en profitant de données scientifiques nouvelles afin de vendre un produit absolu sûr du point de vue de la santé.

La connaissance des cycles de vie bactériens est loin d'être complète. Si l'on prend l'exemple de la bactérie botulique Clostridium botulinum (doc 1), on sait cependant qu'il y a alternance de deux phases : la spore, forme très résistante (<=110°C) et la bactérie moins résistante, mais qui produit les toxines. Il peut donc y avoir contamination plutôt par les spores, mais il faut attendre leur germination pour que les bactéries produisent les toxines mortelles. On notera que dans la tapenade, à base d'huile d'olive (comme si le contenu en huile des olives utilisées n'était déjà pas suffisant), les spores peuvent résister à des températures plus élevées que 110°C.

La stérilisation des conserves de tapenade, spécialité méditerranéenne, se fait artisanalement dans des lessiveuses remplies d'eau dont la température d'ébullition (à Marseille, où la pression atmosphérique n'est que de 1,01 bar) est de 100°C précisément (si l'on monte en altitude la température d'ébullition diminue puisque la pression atmosphérique diminue et si on descend, elle baisse, voir doc 2b) puisque la lessiveuse ne permet pas de développer une pression supérieure à la pression atmosphérique. Il est alors clair que la stérilisation en lessiveuse - ou tout autre faitout sans couvercle permettant d'augmenter la pression -, si elle permet de tuer les bactéries pathogènes, y compris les bactéries botuliques, ne permet PAS DE TUER LES SPORES.
REMARQUE:
un autre sujet (
Asie 2012) proposait une technique qui consiste en deux stérilisations successives à 100°C en lessiveuse, séparées d'un refroidissement d'une semaine. On peut espérer, avec cette technique de double stérilisation, que les spores qui auraient survécu à la première stérilisation germent dans la période de refroidissement et que toutes les nouvelles bactéries ainsi produites soient détruites par la seconde stérilisation. Encore faudrait-il être sûr qu'il ne persiste pas de spores non germées....

L'utilisation d'un autoclave permet d'atteindre une pression de 1,4 à 1,7 bar lors du chauffage (d'après le doc 3), et donc une température légèrement supérieure à 110°C (d'après le doc 2a). Mais on note aussi que l'on est dans la partie de la courbe où une forte augmentation de pression ne permet guère d'augmenter la température d'ébullition.... si l'on extrapole la courbe avec la même pente on trouve une température de 120°C atteinte vers 2 bar (voir ici). Un autocuiseur du commerce (une "cocotte minute") atteint des pressions de l'ordre 1.8 bar et donc une température de la vapeur d'eau supérieure à 110°C. (voir aussi sujet Asie 2012)
L'autoclave ou la cocotte minute permettent donc de stériliser les conserves en ce qui concerne la bactérie et les spores botuliques.

L'argument qui consiste à dire que la toxine est détruite dès 80°C n'est pas idiot (bien que le document 1 nous donne 65°C pour la destruction de la bactérie et si on ne connaît pas la nature protéique de la toxine, on ne peut guère donner de température d'inactivation; 65°C semble suffisant pour une protéine voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Toxine_botulique) mais montre que les conserves "stérilisées" à 100°C sont donc inoffensives en ce qui concerne la toxine tant que les spores n'ont pas germé et donné d'autres bactéries produisant à nouveau une toxine. C'est ce qui est susceptible de se passer lorsque la température de la conserve redescend. Le problème n'est donc pas la toxine présente au moment de la "stérilisation" mais bien celle qui pourrait être produite après. Il est donc impératif, si l'on désire faire des conserves aseptiques, de monter jusqu'à plus de 110°C et donc d'utiliser un autocuiseur.