PARTIE  1 (8 points) -  NOURRIR L'HUMANITÉ

L'agriculture sens dessus dessous
Partout dans le monde, la plupart des agriculteurs labourent leurs champs pour préparer l'ensemencement (le dépôt des graines). Avec le perfectionnement des charrues et des tracteurs, le labour est devenu la norme pour les cultures. Le sol est retourné totalement jusqu'à 30 cm de profondeur. Le labour permet d'ameublir le sol, de l'aérer, de contrôler les mauvaises herbes et d'enfouir les résidus de la récolte. Mais c'est aussi une des premières causes de la dégradation des terres agricoles (érosion et appauvrissement), ce qui constitue une menace sur la production alimentaire.
C'est pourquoi de plus en plus d'agriculteurs se tournent aujourd'hui vers des techniques culturales sans labour (TCSL).
On compare les techniques culturales entre elles pour observer leur impact sur le sol et les rendements.

Document 1 : rendement en blé (essai de Boigneville en Essonne)


Labour : retournement complet du sol jusqu'à 30 cm.
Travail superficiel du sol: sur une épaisseur de 5 à 15 cm, sans retournement.
Semis direct: sans travail du sol.
Source guide TCSL en Bretagne. Arvalis 2008

Document 2 : propriétés du sol
Document 2a : biomasse de vers de terre
La biomasse présente dans le sol est essentiellement constituée des vers de terre et d'une multitude de micro-organismes qui se nourrissent de matière organique. Les galeries creusées par les vers de terre assurent une bonne aération du sol. La présence des galeries améliore nettement l'absorption, le stockage, l'infiltration et le drainage de l'eau dans le sol, ce qui contribue fortement à empêcher le ruissellement et l'érosion. Les vers de terre incorporent chaque année dans le sol jusqu'à 6 tonnes de matière organique morte par hectare.

Source guide TCSL en Bretagne. Arvalis 2008.

Document 2b : répartition de la matière organique (MO) dans le sol

Aide à la lecture: le taux de matière organique en surface d'une terre labourée est de 2 %.
Source Arvelis.


Document 3 : complexe argilo-humique du sol

Le complexe argilo-humique (CAH) est constitué de l'association d'argile et d'humus (matière organique). Il est globalement chargé négativement.


Commentaire rédigé
Comparer les impacts des différentes techniques culturales envisagées.
Vous développerez votre argumentation en vous appuyant sur les documents et sur vos connaissances (qui intègrent, entre autres, les connaissances acquises dans les différents champs disciplinaires).

Éléments de "correction"
Les trois techniques à comparer sont le semis direct sans labour, le labour profond classique (30 cm de profondeur) et le labour superficiel (5 à 15 cm sans retournement).
Il va sans dire que c'est à partir des documents fouurnis très limités qu'il faudra avant tout raisonner, ce qui ne vous empêche pas, dans un second temps d'essayer d'élargir la problématique, car le labour n'est que la face visible et souvent très médiatisée de pratiques culturales tout à fait différentes des techniques ancestrales en Europe, comme la permaculture.

Le document 1 permet d'apprécier sur une parcelle expérimentale de blé l'effet direct des trois techniques sur le rendement (quantité de blé produite) au long de 12 années à raison d'une récolte annuelle. On peut penser que tous les autres facteurs sont identiques pour les trois parcelles (nature du sol, engrais, traitements phytosanitaires...). On note tout d'abord que les variations sont dues probablement en premier lieu aux variations climatiques : le rendement diffère chaque année. Ensuite, au fil des récoltes la technique du semis direct semble moins productive - à l'exception de 2007.  Sans aucune information sur les traitements ou amendements reçus par le sol il est impossible de se prononcer. A-t-on laissé chaque parcelle sans assolement ni engrais ? Peut-être pourrait-on dire que sur un court laps de temps, il n'y a guère de différence de rendement, mais que sur le plus long terme, le labour profond permet un rendement plus important ? Ces variations dans le rendement sont de l'ordre de la tonne par hectare soit 10%.

Le deuxième document permet d'affirmer que le labour détruit une bonne partie de la biomasse du sol : de l'ordre de 10% pour le labour superficiel et de 60% pour le labour profond. On sait l'importance de la faune du sol (en y incluant les innombrables champignons et unicellulaires) qui décomposent la matière organique morte et assurent de nombreux cycles de minéralisation (notamment celui de l'azote en mettant à la sisposition des plantes des nitrates nécessaires à leur croissance. Leur rôle est aussi important dans l'aération du sol et la formation du complexe argilo-humique qui permet de retenir les cations (en empêchant leur lessivage) et de les rendre disponibles pour les végétaux. On a donc tout intérêt à préserver la biomasse du sol si l'on veut limiter les apports d'engrais et le lessivage.

Le document 2b mesure le profil de la matière organique dans les 25 premiers centimètres de sol pour chacune des trois techniques. On note que le semis direct conduit à une masse de matière organique élevée (3,6%) dans les 5 premiers centimètres du sol, mais qu'ensuite la biomasse fait son travail et la matière organique est minéralisée (le taux résiduel est à 1,5%). Dans le cas de labour superficiel (à 10 cm probablement), c'est cette couche de 10 cm qui est plus riche en matière organique (2,7%) seulement, alors que pour le sol labouré profondément la matière organique est enfouie et le taux moyen de 2% persiste jusqu'à une profondeur de plus de 20 cm. Ce taux de matière organique conditionne l'action de la faune du sol. Un faible taux indiquant que le sol a été bien minéralisé.

La méthode des semis directs s'inscrit dans une démarche de type permaculturelle : laisser faire la nature : moins de travail de la terre et plus de respect de l'écosystème naturel.  Cette démarche, initiée par un paysan japonais :
Masanobu Fukuoka (La révolution d'un seul brin de paille : une introduction à l'agriculture sauvage, Guy Trédaniel Éditeur, 2015, original en japonais publié en 1975 à Tokyo et relatant plus de 25 années de recherche et d'essais) est présentée parmi de nombreuses autres initiatives dans le film "Demain" www.demain-lefilm.com). Les techniques de semi direct se développent avec des techniques d'assolement et de rotation des cultures (http://jardincomestible.fr/videos/2-techniques-de-culture-sans-labour/).

Le guide promotionnel des sociétés commercialisant le matériel et les semences dont sont extraits certains documents est disponible en ligne à l'adresse: http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/GUIDE_TCSL_Bretagne_cle866ec4.pdf. Les problématiques évoquées dans ce guide sont bien plus riches que celles citées dans le sujet (et dans mes élements de correction a fortiori) : porosité du sol, disponibilité des nitrates, lessivage, type de rotations, matériel spécifique et coût lié à la mécanisation spécifique, lutte contre le réchauffement climatique et stockage du carbone... On reste dans l'optique d'une agriculture intensive avec un changement de pratique culturale, mais on est loin de l'agroécologie.