PARTIE 1  (8 points) -  NOURRIR L'HUMANITÉ

La chabasite, une roche miracle !
En 1998, une canicule touche la partie côtière de l’Emilie-Romagne, région italienne réputée pour son jambon de Parme. Les odeurs qui s’échappent des élevages et du lisier* épandu dans les champs sont pestilentielles**. Le littoral est envahi d’algues vertes. Les riverains réclament le déménagement des porcheries, voire leur interdiction. Elio Passaglia, professeur en sciences de la Terre à l’université de Modène, effrite de la chabasite (roche volcanique), sur un échantillon de lisier. Les relents nauséabonds diminuent, jusqu’à quasiment disparaître.


L’azote ammoniacal contenu dans le lisier, sous forme d’ions ammonium (NH4+), est en partie responsable de l’odeur désagréable. Lors de l’épandage dans les champs, il pénètre dans le sol puis est transformé en ions nitrate (NO3-).
Devant ce constat, les éleveurs ont pris l’habitude de mélanger de la chabasite réduite en poudre à l’alimentation de leurs porcs. Et les algues ont pratiquement disparu.

* Mélange de déjections de porcs et d’eau qui peut être utilisé comme engrais.
** odeurs désagréables.

Document 1 : masse d’azote déversée par les rivières dans la mer et surface de littoral breton recouverte par les algues, en fonction du temps


Document 2 : impacts de l’utilisation de la chabasite pour l’élevage de porcs
Dans plusieurs élevages on a comparé l’évolution de différents facteurs mesurés dans deux salles comptant le même nombre de porcs, nourris de façon traditionnelle (salle témoin) ou avec 3% de chabasite dans la nourriture.

Élevage témoin Élevage avec chabasite
Gain moyen de masse (en g/porc/jour) 902 869
IC* 2,51 2,57
Ions ammonium (NH4+) présents dans les déjections de porc (en g/porc/jour) 7,55 6,18
Odeurs nauséabondes importantes faibles
*IC = indice de consommation, quantité de nourriture donnée pour obtenir un kg de viande consommable

Cette introduction de chabasite dans la nourriture entraîne un surcoût de 4 euros par porc, somme difficilement supportable pour les exploitants, compte tenu de la crise, dont une partie est prise en charge par les consommateurs.
D’après Ifip (Institut français du porc)
Par contre le coût du ramassage et du traitement des algues a atteint 20 euros par m3 pour l’ensemble des plages allant de la Basse-Normandie à l’île de Ré en 2012.
D’après http://www.developpement-durable.gouv.fr/

Document 3 : échanges d’ions dans la partie terminale de l’intestin du porc
La composition chimique de la chabasite est proche de celle des argiles. Globalement, la chabasite est formée :

*on s’intéressera uniquement aux ions NH4+ présents dans l’intestin.


Commentaire argumenté :

Certaines plages de Bretagne, région touristique qui compte de nombreux élevages porcins, sont régulièrement envahies par les algues vertes.
Expliquer comment l’incorporation de chabasite dans l’alimentation des porcs de cette région permettrait de diminuer la prolifération des algues vertes et préciser les limites de son utilisation.
Vous développerez votre argumentation en vous appuyant sur les documents et sur vos connaissances (qui intègrent, entre autres, les connaissances acquises dans les différents champs disciplinaires).

Éléments de correction:
(ce qui n'est pas dit dans le sujet et ce que j'ignorai totalement est que les chabasites forment un groupe de zéolites (silicate d'alumine microporeux) découvert au 18e siècle qui servent d'échangeur d'ions dans l'industrie et de substrat de croissance pour certaines plantes fragiles comme les bonzaïs... De plus on ignore totalement le mode d'action de ce substrat lorsqu'il est ingéré par les animaux... ce qui rend ce sujet pour le moins déconcertant).
On vous demande d'établir des relations logiques entre la chabasite et les nitrates (1), puis entre la chabasite ingérée et les nitrates des déjections porcines (2) et enfin entre la teneur en nitrates des injections porcines et les algues vertes (3). Seule la première relation est vraiment solide expérimentalement. La seconde est en voie d'exploration et la troisième un espoir.
La relation 1 n'est pas documentée dans le sujet sauf l'illustration du document 2. La chabasite est chargée négativement et fixe donc les cations comme les ions ammonium (NH4+) qui sont, d'après le texte du sujet, responsables des mauvaises odeurs. Cette fixation n'est pas très forte et les ions peuvent être échangés avec d'autres. L'ammoniac est transformé dans le sol en nitrates. Ce sont les nitrates qui, emmenés vers la mer par lesssivage, permettent les pics de croissance très importants des algues vertes à la saison chaude. Le document 1 est sans appel à ce sujet : les variations de la masse d'azote rejetée sont directement corrélées aux variations de la prolifération des algues vertes. Pour limiter les pics d'algues vertes, il faut limiter les apports de nitrates. Comme la fixation de l'ammoniac sur la chabasite n'est que transitoire, cela ne sert pas à grand-chose de l'épandre sur le sol avec les déjections, si ce n'est pour retarder le relargage.
En ce qui concerne la relation 2, le seul élément expérimental est donné par les résultats du tableau du doc.2 : chez le lot nourris avec apport de chabasite, le rendement est moins bon (plus faible prise de poids et plus fort indice de consommation, ce qui s'ajoute au coût du complément alimentaire) mais la réduction de la quantité d'ammonium dans les déjections et surtout la réduction des odeurs semblent être solides. L'illusration qui suit le tableau veut nous faire penser que la chabasite agit dans l'intestin comme elle le fait dans la nature en fixant les cations. Mais la question est : que deviennent ces cations ? Ils ne peuvent pas disparaître. S'ils sont rejetés en même temps que la chabsite dans les déjections, on a simplement trouvé un moyen de rendre les élevages moins malodorants.