PARTIE 1 (8 points) - NOURRIR L'HUMANITÉ

L’entomophagie au coeur de l’alimentation humaine du XXIème siècle

La croissance démographique, l'urbanisation et la montée des classes moyennes ont fait augmenter la demande mondiale en aliments, notamment en protéines d'origine animale. […] D’ici 2030, plus de neuf milliards de personnes devront être nourries, tout comme les milliards d'animaux élevés chaque année, entre autre, pour l'alimentation. La production animale intensive conduit à des effets néfastes sur l'environnement. De nouvelles solutions doivent être recherchées. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture s’intéresse à l’entomophagie c'est-à-dire à la consommation d’insectes par les humains.

D’après la FAO, organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, mai 2013

Document 1 : élevage de grillons domestiques : mode d’emploi

COMMENT DEMARRER UN ELEVAGE ?
Pour démarrer un élevage, il faut :
- quelques couples de grillons adultes reproducteurs ;
- un vivarium permettant aux grillons de bénéficier de 12 à 14h de luminosité par jour ;
- des cartons à oeufs pour que les grillons puissent se cacher, se protéger, muer et se reproduire ;
- deux ou trois pondoirs au fond du vivarium.
COMMENT FONCTIONNE L’ELEVAGE ?
Chaque femelle peut pondre une centaine d'oeufs en quelques jours.
Le contenu du pondoir doit toujours rester humide afin d'éviter le dessèchement des oeufs.
Au bout de 10 à 13 jours d’incubation, de minuscules grillons apparaissent. Ils deviendront adultes en huit à dix semaines. Les conditions d'élevage sont identiques pour les jeunes et pour les adultes. Les grillons adultes vivent deux ou trois mois. Il est possible d’en prélever régulièrement, en prenant soin de conserver toujours une dizaine de couples reproducteurs.

COMMENT ENTRETENIR UN ELEVAGE POUR QU’IL SOIT LE PLUS RENTABLE POSSIBLE ?
Pour un rendement optimal, les grillons ont besoin :
- d’une température constante de 30°C dans le vivarium
- de quelques gouttes d'eau par jour
- d'une nourriture végétale variée : flocons d'avoine, germe de blé, morceaux de fruits et de légumes frais.

QUEL EST LE RAPPORT ENTRE NOURRITURE FOURNIE AUX ANIMAUX ET QUANTITE DE NOURRITURE PRODUITE ?


Y A-T-IL UN IMPACT ENVIRONNEMENTAL POUR UN TEL ELEVAGE ?
Un grillon produit au maximum 0,09 g de CO2 par kg de masse corporelle et par jour contrairement au boeuf qui produit 7,08 g de CO2 par kg de masse corporelle et par jour.

Document 2 : méthodes de conservation des insectes et sécurité alimentaire

Dans les pays qui en consomment actuellement le plus (Afrique, Asie du Sud-est), plusieurs méthodes permettant la conservation des insectes existent : sécher au soleil, faire bouillir, frire ou rôtir, voire traiter au vinaigre.
Sur le marché européen, on trouve aujourd'hui des insectes entiers déshydratés (séchés) ou encore de la poudre d’insectes incorporée dans des gâteaux.

Les vers Buffalo : un exemple de conservation par ébouillantage* et séchage

* ébouillantage : action de faire bouillir



Ces méthodes de conservation sont déjà utilisées par l’Homme pour réduire le risque de pathogènes* alimentaires dans la viande. Pour la FAO, le risque pourrait être bien moindre qu’avec des animaux plus proches du point de vue évolutif, comme le boeuf qui héberge entre autres des Escherichia coli et des salmonelles (bactéries) : « De manière générale, les pathogènes des insectes sont différents de ceux présents chez les mammifères, et peuvent être considérés comme sans danger pour l’Homme ». Il n'y a aucun cas connu de transmission de maladies ou de parasites aux humains par la consommation d'insectes manipulés dans les mêmes conditions d'hygiène que tout autre aliment. Il peut y avoir des cas d'allergies, comparables aux allergies aux crustacés, qui sont également des invertébrés.

* pathogène : microorganisme responsable de maladie

 

Document 3 : valeurs nutritionnelles de différents insectes et d'aliments plus "traditionnels"
Animaux Insectes Autres animaux
Fourmi rouge Grillon Criquet Sauterelle Chenille Boeuf Poisson
(cabillaud)
Teneur en protéines (g) pour 100 g d’animal 13,9 19,8 12,9 20,6 6,7 27,4 28,5

Chez l’être humain, l’apport journalier de protéines recommandé est de 0,8 g par kg de masse corporelle et par jour. Pour une personne de 75 kg, cela correspond à 60 g de protéines par jour.



COMMENTAIRE RÉDIGÉ :

Un responsable d’une entreprise européenne élevant des insectes souhaite développer un site internet pour vendre les produits transformés issus de ses élevages.

Rédiger, pour ce site, un article présentant les arguments en faveur de l'entomophagie par rapport à une alimentation riche en viande bovine.

Vous développerez votre argumentation en vous appuyant sur les documents et sur votre culture (qui intègre, entre autres, les connaissances acquises dans les différents champs disciplinaires).


Éléments de correction (je n'ai pas pu m'empêcher d'ajouter quelques arguments à charge):
    Le développement de l'entomophagie dans les pays européens n'ayant pas cette pratique dans leur culture, est une des réponses culturelles à la demande de protéines animales croissante du fait de l'augmentation de la population mondiale.
    On affirme que l'élevage d'insectes ne produit pas les mêmes nuisances environnementales que l'élevage intensif d'un bovin. Les insectes produisent bien sûr des déchets azotés (sous forme de cristaux d'urates) qui ne sont pas forcément plus faciles à réutiliser dans le cycle de l'azote que l'urine et les bouses bovines qui sont utilisées comme engrais ou fermentées dans des méthaniseurs. Leur nourriture est d'origine végétale (ce sont des consommateurs de premier ordre ou des producteurs secondaires) : graines sèches et fruits frais par exemple, mais le rendement respiratoire énergétique est supérieur puisqu'ils ne rejettent que 0,09 g de CO2 par kilogramme de masse corporelle alors qu'un bœuf en produit près de 100 fois plus (7,08 g). Le CO2 est produit traduit la respiration. Le rendement de production de masse est quand à lui exprimé par la masse d'animal obtenue pour 10 kg de nourriture (doc 1) : 10% de rendement pour le bœuf et 90% de rendement pour "l'insecte". On pourrait enfin citer la facilité d'élevage ainsi que la faible occupation de l'espace pour les Insectes par rapport aux bovins. Mais pour obtenir 500 à 1000 kg d'insectes (poids d'une vache) il faut envisager des milliers de cages d'élevage (et pour un troupeau de 1000 vaches, on parle de millions de cages à Insectes....). La manipulation d'un insecte est simple et on ne risque pas de se faire écraser par lui, mais les nuages de criquets migrateurs qui dévorent tout sur leur passage ont un impact extrêmement négatif sur l'idée d'un élevage intensif d'insectes. Consommer des insectes que l'on trouve naturellement dans le milieu est tout à fait différent de l'idée de se lancer dans une production industrielle qui serait censée régler le problème de la faim dans le monde.
    La consommation d'insectes apporte des éléments nutritionnels comme les protéines qui ne sont pas forcément très éloignés de ceux apportés par la consommation de viande bovine. Il y a tout d'abord la teneur en protéines qui est (doc 3) nettement plus élevée dans le cas de la viande de boeuf (27%) que pour un insecte comme la fourmi (14%), mais le Grillon avec ses 20% de protéines en masse  s'approche de la viande bovine. Si l'on considère les apports journaliers en protéines conseillés (doc 3), qui sont de 60 g de protéines par jour pour un homme de 75 kg, il n'est pas rare qu'un Européen consomme davantage que cet apport préconisé en un seul repas (soit un peu plus de 200 g de viande). Si l'apport se fait par des insectes il faudrait consommer 300g de Grillons par exemple, ce qui est une quantité très importante. On peut donc penser qu'il est ainsi plus facile de fractionner et de diversifier les apports protéiniques. On pourra aussi remarquer que la qualité des protéines n'est pas forcément la même pour un insecte et un mammifère, mais n'ayant aucun document sur le sujet, il est impossible de préciser.
    Les problèmes sanitaires associés à la consommation de viande bovine ne se retrouvent pas pour la consommation d'insectes du fait de la grande différence entre un invertébré et l'homme alors que les parasites et maladies des bovins peuvent parfois affecter l'homme qui est aussi un mammifère (comme les Escherichia coli et Salmonelles comme il nous est rappelé dans le doc. 2).
La facilité de conservation et de préparation des Insectes est aussi bien plus attirante que la nécessité de l'abattage, de l'équarrissage, de la conservation au froid ou de l'intégration à des préparations industrielles que l'on réalise pour les bovins. Cependant il ne faudrait pas croire que sous nos latitudes on puisse faire sécher les grillons au soleil; il serait nécessaire d'utiliser des tours de séchage gourmandes en énergie. De même un insecte mort est extrêmement rapidement colonisé par des champignons, qui, pour ne pas être toxiques ou pathogènes, n'en sont pas moins peu appétissants et gâtent le produit qui devient vite non comestible. Donc l'ébouillantage et le conditionnement sous diverses formes restent nécessaires (comme pour les vers Buffalo du doc.2).
La plus grande barrière qui reste à franchir  reste la barrière culturelle avant que les insectes ne deviennent "la viande de demain", selon la jolie expresssion d'un élève.